À seulement 27 ans, Me Deena Bhoyroo, avocate, a déjà un parcours éloquent. Elle a été admise au barreau de l’Angleterre et celui de Maurice. Bénévole, humble dans l’âme, elle n’hésite pas à offrir ses services sous l’assistance juridique aux ONG et à ceux qui sont dans le besoin. Avocate de proximité, elle ne se cantonne pas qu’à Port-Louis, mais opère aussi dans plusieurs villages du pays, ainsi qu’à Rodrigues. Conférencière en droit, elle s’est vue décerner le titre ‘Lecturer of the Year’ par l’Université Aberystwyth. À ce jeune âge, elle a déjà visité plus de… 35 pays. Assoiffée de justice pour les humbles et les démunis, on peut parier qu’elle ira loin…
Deena Bhoyroo habite Terre-Rouge avec sa famille. En grandissant, elle a toujours été très entourée par ses parents, Aman et Ansoo Bhoyroo, ses grands-parents et son oncle et sa tante. « Avec leur amour et leur soutien inconditionnel, je n’ai pas l’impression d’avoir un seul père et une seule mère, mais trois pères et trois mères », dit-elle.
Les parents de Deena ont toujours mis l’accent sur l’importance de l’éducation et le ‘self-reliance’, et cela depuis son plus jeune âge. « Ils ont toujours voulu que je sois indépendante et que je sois capable de voler de mes propres ailes et de ne dépendre d’aucun mortel, mais seulement du Créateur. Ils m’ont également appris à toujours être humble, peu importe où je me situe dans la vie. Mes parents ne sont pas dans la profession légale. Mais ma maman m’a toujours dit que ‘When there is a will, there is a way’ », nous confie-t-elle. C’est ce conseil qui va toujours la guider, que ce soit dans ses études ou dans sa profession.
Après avoir fini ses études secondaires au collège Lorette à Port-Louis, et avec d’excellents résultats scolaires en main, la jeune fille entame son LLB (Honours) à la Middlesex University sur le sol mauricien, de 2011 à 2014. Elle met ensuite le cap pour l’Angleterre pour poursuivre son ‘Bar Professional Training Course’ (BPTC) à l’University of the West of England à Bristol, où elle est reçue avec la mention ‘Very Competent’. Elle est ‘called to the Bar in England and Wales’ en 2015 par l’Honourable Society of Middle Temple.
De retour à Maurice, elle entame son ‘pupillage’, où elle s’est perfectionnée sous la houlette de quelques grands noms de la profession légale, comme Yousuf Mohamed, Senior Counsel, ou encore Véronique Kwok Yin Siong Yen, aujourd’hui juge à la Cour suprême. Elle rejoindra ensuite Peeroo Chambers.
Elle est finalement appelée au barreau de la République de Maurice en 2016. Son domaine juridique principal : les droits de l’enfant et de la famille. Elle s’occupe essentiellement des problèmes de divorce, de droit de garde et de visite, la sortie de l’enfant de la juridiction mauricienne, la violence domestique et les ordonnances de protection. Elle assiste aussi beaucoup de clients lors des enquêtes policières, ou lors des comparutions devant un comité disciplinaire.
Elle offre aussi des conseils juridiques gratuits et travaille avec des ONG et des associations religieuses et sociales, pour aider ceux qui sont vulnérables ou qui ne connaissent pas leurs droits. Elle prend également en charge plusieurs affaires sous l’assistance juridique.
Son étude est à Port-Louis mais elle opère aussi depuis Pamplemousses, St. Pierre, Curepipe et Pierrefonds, pour être plus proche de ses clients et pour pouvoir aider encore plus de personnes. Elle exerce aussi à Rodrigues. « Ce n’est pas tout le monde qui peut voyager à Port-Louis », nous explique-t-elle.
Les affaires qui l’ont le plus marquée : les cas où il y a eu la violence contre les femmes et les enfants. « Certaines histoires que j’ai vues sont vraiment horribles », nous confie-telle.
En 2020, elle devait brillamment réussir son ‘Master of Laws (LLM), octroyée par la Nottingham Trent University.
Sur le plan académique, elle a été ‘lecturer’ en droit à YK Business School de 2016 à 2017. De 2017 à 2019, elle a exercé comme ‘Lecturer in Law’ et ‘Head of the Department of Law and Criminology’ de l’université d’Aberystwyth (campus mauricien). Elle a été nommée ‘Winner Lecturer of the Year 2019 par l’université d’Aberystwyth.
Elle travaille aussi occasionnellement pour la Banque mondiale en tant qu’experte en droit de la famille mauricienne, et elle est membre (‘Fellow’) de la Higher Education Academy au Royaume-Uni.
Son regard sur la profession d’avocate
En Form V, au Couvent de Lorette de Port-Louis, elle étudiait la littérature anglaise, notamment le livre To Kill A Mockingbird, de l’auteure américaine Harper Lee. Ce livre décrivait le combat d’un avocat blanc qui défendait un Noir injustement accusé du viol d’une femme blanche. L’action (fictive) se situe en Alabama en 1935, alors que la ségrégation battait son plein aux États-Unis.
« J’ai réalisé alors que c’était ma vocation et ce pour quoi je suis née », nous explique-t-elle. « J’étais aussi motivée par mes lectures sur les affaires judiciaires dans les journaux et par les séries télévisées policières. J’avais également réalisé que j’étais douée pour parler en public, que je pouvais beaucoup étudier et que j’avais une personnalité compatible avec la profession légale. En outre, je ne voulais pas d’un travail de 9 à 4 heures. Je voulais sortir dans le monde, rencontrer des gens et les aider avec les capacités dont Allah m’en a fait grâce », nous témoigne notre interlocutrice.
Quel regard jette-t-elle sur la profession d’avocate ? « C’est une profession noble, avec une éthique et une dignité élevée. Il y a un haut niveau de satisfaction si vous avez pu aider quelqu’un en détresse. Les duas et les bénédictions que vous recevez des gens sont plus importants que l’argent que vous obtenez dans ces affaires », affirme-t-elle.
Quels conseils voudrait-elle donner aux jeunes qui voudraient se lancer dans cette profession ? « S’ils aiment cette voie et s’ils sont disposés à travailler dur pour y arriver, je les encourage de tout mon cœur. Mais s’ils veulent emprunter cette voie juste parce que leurs parents ont été avocats ou parce qu’ils veulent porter le titre de maître, ou s’ils veulent le faire pour l’argent ou pour le prestige que cela confère, à mon avis ils ne devraient pas faire ce métier. Faites le droit pour de bonnes raisons », maintient-elle.
Ce qui l’a finalement convaincue dans son choix pour devenir avocate, c’est ce verset du Coran, connu comme Al-Qur’an Ul-Hakeem, qui parle de justice, en ces termes: « O you who have believed, be persistently standing firm in justice, witnesses for Allah, even if it be against yourselves or parents and relatives. Whether one is rich or poor, Allah is more worthy of both. So follow not personal inclination, lest you not be just. And if you distort your testimony or refuse to give it, then indeed Allah is ever, with what you do, Acquainted. » (Sourate du Coran An-Nisa Ayat 135)
Fiche Perso
Livre préféré : Le Qu’ran
Plat préféré : Les plats mauriciens
Passe-temps préférés : Les voyages, la photographie, le travail social
Destinations préférés : La Mecque, Rodrigues, les Maldives, Zanzibar, Dubaï, Londres et Paris (elle a visité plus de 35 pays)
Sarah Khodadin