Questions à…Jasmine Toulouse : « Je ne peux exprimer cette révolte que je ressens »

Jasmine Toulouse, artiste engagée contre la pauvreté, travailleuse sociale et candidate battue du MMM dans la circonscription n° 14 (Savanne-Rivière-Noire) lors des dernières législatives, nous a accordé cet entretien après que le Premier Ministre ait brandi une photo d’elle aux côtés de Jean Hubert Celerine, alias Franklin, lors de la rentrée parlementaires mardi dernier, tout en citant son nom. Choquée et révoltée par ce geste, cette mère de deux enfants, dont un âgé de deux ans seulement, dit craindre les retombées sur sa carrière.

Q : Que ressentez-vous après ce geste du Premier ministre ?

Je ne peux exprimer cette révolte que je ressens.Je suis toujours traumatisée par ce qui s’est passé. Je suis assez solide mais j’ai été secouée par cette situation. Cela m’a fait beaucoup de mal et m’a porté un grave préjudice. Je suis très triste que nous sommes arrivés à ce niveau dans le pays. C’est très ‘cheap’ ce qui s’est passé.

Ce n’est pas parce que Pravind Jugnauth jouit de l’immunité parlementaire qu’il peut se permettre de porter atteinte à la vie personnelle et professionnelle d’une personne qui n’est pas membre du Parlement. Je dois aussi faire ressortir que c’est le ministre Alan Ganoo qui avait glissé la photo au Premier ministre lors de cette séance parlementaire. Je lui en veux encore plus qu’au Premier ministre. Nous avons été adversaires aux dernières législatives, mais je suis actuellement une simple citoyenne qui travaille dur pour pouvoir nourrir sa famille. Je n’éprouve plus aucun respect pour le ministre Alan Ganoo.

Q : Craignez-vous d’autres répercussions ?

Le Premier ministre ne m’a pas seulement privé de ‘mo bouchée manzé’, mais il a aussi porté atteinte à mon image. Les gens peuvent croire que je suis impliquée dans le trafic de drogue. J’éprouve toujours une certaine appréhension car je pourrai subir d’autres discriminations à l’avenir. Les organisateurs pourraient ne pas m’inclure dans leurs évènements. J’ai déjà perdu un contrat. Mon travail me permet de contribuer aux dépenses familiales, d’autant que mon époux est  jardinier et que nous devons faire beaucoup d’efforts pour joindre les deux bouts face à la cherté de la vie. Ma maison est toujours en construction et à la fin de chaque mois, je dois débourser une somme d’environ Rs 13 000 pour payer mon emprunt.

Q : Quand cette photo de vous avec Jean Hubert Celerine, alias Franklin, a-t-elle été prise ?

Cette photo a été prise lors d’une fête en 2013, ce qui fait quand même assez longtemps. Comme artiste, je suis souvent invitée dans des évènements. À cette époque, je ne savais même pas que je serais candidate aux élections un jour. Je ne cacherai pas que Jean Hubert Celerine et moi avons grandi dans le même village. Même si je l’ai connu, cela ne veut pas forcément dire que j’étais au courant de tout ce qu’il faisait. J’ai pris des photos avec beaucoup de Mauriciens.

Q : Etes-vous interpellée par l’ampleur du fléau de la drogue ?

En tant que membre du MMM, artiste, travailleuse sociale et mère, je me sens concernée par le trafic de drogue. On veut assurer un meilleur avenir à nos enfants mais de nos jours, la drogue gagne du terrain et est en train de finir la jeunesse. J’estime que le gouvernement est en train de faire la sourde oreille sur plusieurs propositions qui ont été faites pour combattre la drogue. Que sommes-nous en train de faire pour les jeunes qui sont pris au piège de la drogue ? Dans le même élan, je pense que le sport aussi meurt à petit feu dans le pays. Quant aux artistes, on les a délaissés. Je pense que je serai candidate une nouvelle fois aux prochaines élections, car j’ai envie d’apporter un changement dans la vie des gens.