«Remotiver les femmes par l’inspiration » 

Prisheela Mottee, féministe et poétesse

Prisheela Mottee est âgée de 30 ans. Cette habitante de Vacoas est une Civil Status Officer au Bureau du Premier ministre. Mais ne vous fiez pas aux apparences : elle est très loin du fonctionnaire gratte-papier. Cette activiste se bat pour changer les mœurs patriarcales de la société mauricienne, et ayant une belle plume, elle a une méthode pour le moins originale pour inspirer les filles et les femmes.

Prisheela Mottee a fréquenté l’école primaire de Madho Gopaul et la State Secondary School (SSS) de Bambous. Elle complètera ses études secondaires au collège Hindu Girls. Ayant un véritable engouement pour parfaire ses connaissances, elle décrochera un ‘BSc Honours in Political Science’ et un ‘LLB Honours’ à l’Université de Maurice. Elle obtiendra aussi une maitrise en ‘Public Policy and Administration’ octroyé par cette même institution.

Mais Prisheela Mottee ne se contente pas d’évoluer dans le monde académique. Elle veut mettre ses connaissances au service du pays. Contributrice active de la société civile, elle se bat pour les droits des filles et des femmes. Notons d’emblée qu’elle a été ‘Second Runner’ de la SADC Protocol for Gender at Work en 2018  et compte parmi les ‘100 Most Influential Women’ de 2017 dans la catégorie ‘Emerging Leader.’

La présidente de Raise Brave Girls est aussi poétesse à ses heures perdues, une marotte qui lui est venue en écrivant sur les aspects  de la société mauricienne sur un blog. Elle est une farouche défenseuse de la langue kreol et fustige ceux qui ne voient pas la beauté et la richesse du linga franca mauricien  ou ceux qui essaient de contrefaire leur accents parce qu’ils se sentent embarrassés d’utiliser le créole. « Je crois que la langue kreol fait partie de l’identité mauricienne et lorsque nous l’accepterons, nous serons en symbiose avec la culture mauricienne », affirme-t-elle.

Elle a même rédigé un recueil Emoi enn perle, qui est basé sur les histoires humaines qu’elle recueillait tous les jours quand elle voyageait par autobus de Vacoas à Vieux Grand Port où elle avait été transférée dans le cadre de son travail. « Je voyageais plus de 6 heures par jour en autobus. Je suis tombé sur un certain nombre d’étrangers qui ont partagé leurs histoires, ce qui a été transcrit en poésie. »

Pourquoi avoir choisi le créneau féministe ? « Quelque part, la société mauricienne peut toujours être décrite comme étant une société patriarcale. Même au 21e siècle, un certain nombre de jeunes filles et de femmes ne sont pas motivées à poursuivre leurs rêves. Beaucoup de ces dernières sont encore ligotées aux chaînes de la société patriarcale. Par conséquent, elles ne sont pas en mesure de travailler à leur niveau optimal et de contribuer ainsi à notre communauté », nous explique-t-elle.

Prisheela décide alors de prendre le taureau par les cornes. Elle fondera ainsi l’association Raise Brave Girls en 2017. « Notre engagement est d’encourager les jeunes filles et les femmes à poursuivre leurs rêves. Ce faisant, elles pourront ainsi contribuer pleinement à la société », nous explique-t-elle.

Une énième association féministe ? Raise Brave Girls se démarque d’autres ONG de ce créneau par ses propositions parfois hautement techniques, parfois plus créatives et originales, reflétant quelque peu la personnalité et la philosophie de sa fondatrice.

Le vécu des femmes : une source d’inspiration

La méthode utilisée par cette association pour ‘empower’ les jeunes filles : recueillir des histoires véridiques des jeunes filles et des femmes et ensuite les diffuser pour inspirer les autres. « L’histoire de n’importe quelle femme vaut la peine d’être partagée car elle sera nécessairement source d’inspiration », affirme-t-elle.

Jusqu’à présent, Raise Brave Girls a lancé trois campagnes visant à autonomiser les femmes et les jeunes filles. Ainsi, pour la Journée internationale de la Femme en 2018, l’ONG a lancé la campagne ‘Be Your Wonder Woman’, où les femmes ont partagé leurs messages pour inspirer les jeunes filles. « Nous croyons que les femmes et les jeunes filles ont besoin d’une plateforme commune pour que leurs voix soient entendues et Raise Brave Girls offre cet espace particulier », explique la présidente de Raise Brave Girls. « Nous croyons qu’il faut mettre les femmes et les jeunes filles sous les projecteurs parce que leurs vécus et leurs expériences doivent être entendus ».

Le message qu’elle tient à faire passer aux jeunes : « Prenez le temps de vous découvrir et vous trouverez votre voie dans la vie. » 

Hors-texte

Raise Flag : halte aux mariages d’enfants !

Pour Prisheela Mottee, il est difficilement concevable que dans l’île Maurice d’aujourd’hui, on peut encore tolérer les mariages des adolescentes à peine pubères avec des hommes plus âgés, ce qui est une tare de la société patriarcale mauricienne.

Le cheval de bataille de  Raise Brave Girls : le combat contre les mariages d’enfants. « Nous essayons aussi de trouver des solutions sur la façon de réduire les grossesses chez les adolescentes », nous explique-t-elle.

L’association a conçu un système d’alerte connu sous le nom de Raise Flag. D’après ce système, toutes les parties prenantes, qui doivent faire partie d’un réseau de soutien, doivent donner l’alerte lorsque des situations spécifiques sont détectées. Cette proposition a déjà été soumise au ministère de l’Égalité des genres, à celui de l’Éducation et à l’Ombudsperson for Children. « Nous nous attendons à une réponse positive de la part des autorités », nous indique Prisheela Mottee.

Fiche Perso

Plat préféré : Chicken curry masala

Couleur préférée : Noir

Citation favorite : If you want something said, ask a man ; if you want something done, ask a woman (Margaret Thatcher)