Dénonciation de Paul Lam Shang Leen à l’ICAC : « Teeluckdharry fait fausse route » 

Sanjeev Teeluckdharry avait déposé une plainte à l’ICAC ce mardi 21 août contre Paul Lam Shang Leen, qui avait présidé la commission d’enquête sur la drogue. Son avocat, Me Ravi Rutnah a également envoyé une lettre à Navin Beekharry, le directeur de l’ICAC, et qui a été nommé par le gouvernement pour présider la Task Force mise sur pied pour passer au crible les recommandations du rapport de la commission d’enquête sur la drogue. Nous avons voulu en savoir plus et un avocat que nous avons interrogé mais qui a préféré garder l’anonymat nous explique les tenants et aboutissants de cette démarche.

Selon la lettre rédigée par Ravi Rutnah, Paul Lam Shang Leen aurait utilisé la commission qu’il présidait comme un « colourable device » pour couler le chambers de Sanjeev Teeluckdharry et promouvoir son propre chambers à lui. Ce qui constituerait pour Sanjeev Teeluckdharry d’un cas de « public official using his office for gratification » sous la section 7 du Prevention of Corruption Act (PoCA).

Toujours selon l’ex-Deputy Speaker, Paul Lam Shang Leen n’aurait pas divulgué qu’il était en situation de conflit d’intérêts dans cette affaire en omettant de mentionner qu’il est associé à Law Sure Chambers, où des juristes lui ont fourni du travail d’arbitrage alors qu’il était juge à la Cour suprême, et ces derniers ont à plusieurs reprises représenté des trafiquants de drogue notoires. Ceci constituerait une infraction à la section 13 du Prevention of Corruption Act (PoCA).

L’homme de loi  nous explique : « Sanjeev Teeluckdharry dit que Paul Lam Shang Leen a utilisé la commission pour couler son ‘chambers’ et promouvoir Sure Law Chambers. Il parle de ‘ulterior motives’ de la part du président de la commission antidrogue. Qui plus est, il parle de ‘overwhelming perception in obtaining gratification’. Mais comment pourra-t-il prouver cela dans les faits, devant une cour de justice ? Une cour de justice ne se base pas sur le ‘overwhelming perception’, mais sur des preuves concrètes. Il s’agit uniquement de sa parole contre celle de l’ex-juge. »

Toutefois, s’il avait demandé une ‘judicial review’ du rapport de la commission, comme Roubina Jadoo-Jaunbocus, selon l’homme de loi, il aurait eu un « arguable case ». « Un des principes sur lequel le ‘judicial review’ se base : une autorité décisionnaire doit démontrer dans les faits, et dans la perception, qu’elle est totalement impartiale. Est-ce que dans le cas présent, il y a eu conflits d’intérêts ? Seule une cour pourra trancher. Mais il y a là un ‘arguable case’. Idem si la commission n’a pas communiqué des preuves incriminantes à l’avocat et ne lui pas laissé une chance de se défendre. Dans ce cas-ci, on peut éventuellement parler de ‘procedural unfairness.»

Le juriste s’explique aussi sur le fait que la commission n’ait pas convoqué Navin Ramgoolam, selon la lettre de Ravi Rutnah. « Ce dernier fait déjà face à un procès en Cour intermédiaire. L’affaire est ce que l’on appelle ‘sub-judice’. C’est sans doute pour cette raison que le leader du Parti travailliste n’a pas été convoqué par la commission. » 

Par ailleurs, notre interlocuteur nous rappelle que l’ex-juge et ses assesseurs jouissent de l’immunité sous la Commission of Inquiry Act, et qu’ils ne peuvent être poursuivis au civil ou au pénal pour leurs agissements en tant que membres de cette instance (sauf pour la ‘judicial review’, qui est une procédure relevant de la loi administrative et constitutionnelle).