Fuite de papiers d’examens du PSAC : Vices flagrants de procédure

C’est lors d’une conférence de presse du MSM au Sun Trust hier que la ministre de l’Éducation, Leela Devi Dookun-Luchoomun, est montée sur ses grands chevaux pour accuser de nouveau des membres de l’opposition d’avoir voulu « faire de sensation », « semer des doutes dans la tête des élèves et des parents », et de « faire politique lor la tête bane zenfants » en dénonçant la fuite des papiers d’examens du PSAC. Elle reconnait néanmoins que le « Senior Research and Development Officer » a bel et bien copié des questionnaires sur une clé USB avant qu’il ne soit surpris par un autre officier qui se trouvait dans la même salle. Elle rassure les parents que toutes les dispositions ont été prises pour que les élèves du PSAC ne soient pas pénalisés. Et d’insister que ces papiers n’étaient pas encore finalisés.

Les coupables, semble dire la colistière de Pravind Jugnauth, n’est ni la ‘Mauritius Examinations Syndicate’ (MES) et encore moins le ministère de l’Éducation qu’elle dirige, mais plutôt des membres de l’opposition qui ont osé dénoncer cette affaire. Auraient-ils dû garder le silence ? « C’est ce qu’elle aurait aimé qu’on fasse. Li pe croire nou aussi nou ti bizin fer cover-up kouma gouvernement habitué faire », réplique sèchement le député travailliste Eshan Juman qui avait été le premier à lever le lièvre au Parlement. Pourtant, des vices de procédure il y en a bien eu. Et les autorités concernées, plus précisément la MES et le ministère de l’Éducation, auraient dû assumer l’entière responsabilité au lieu de trouver des boucs-émissaires.

« Kot mone fauté »

En premier lieu, comme nous explique l’ancien directeur de la MES, Lucien Finette, dans un entretien qu’il nous a accordé cette semaine (voir pages 6-7), tous les papiers n’auraient jamais dû être sauvegardés sur un seul et même ordinateur. Tel n’a jamais été le cas dans le passé, insiste-il. Car des risques de fuites existent toujours. Or, cette procédure n’a pas été respectée dans le cas présent. Dans lequel cas, la MES est fautive. Ainsi que la ministre de l’Éducation qui veut faire l’impasse sur cette faute grave.

Deuxièmement, un contrôle strict a-t-il été observé avant que les officiers n’aient accès à cette salle censée être une « restricted area » ? Il parait que non puisque le suspect a été pris la main dans le sac avec une clé USB en sa possession. La faute à qui, si ce n’est pas la direction de la MES d’avoir failli à mettre en place un système de sécurité fiable ? D’ailleurs, si l’utilisation d’une clé USB est permise à l’intérieur de cette salle, qui peut garantir qu’il n’y a pas eu de tels précédents sans que les autorités n’en soient au courant ?

De plus, il convient aussi de se demander pourquoi cet officier a eu accès à un ordinateur alors que les modifications sont censées être faites uniquement sur des ‘hard copies’. Cette procédure a-t-elle été changée ou a-t-elle été négligée ? Dans n’importe quel cas de figure, qui est responsable si ce n’est pas la MES ? Et finalement, pour quelles raisons surtout ce cadre incriminé a-t-il été autorisé à travailler sur des papiers d’examens ou d’accéder à cette salle alors que sa fille doit prendre part à ces mêmes examens en août prochain ?

Au lieu de se contenter de dire des généralités et de blâmer des membres de l’opposition, Leela Devi Dookun-Luchoomun aurait dû reconnaître les torts commis par la légèreté de la direction de la MES, en prenant les taureaux par les cornes pour redresser ce laisser-aller qui peut mettre en péril l’avenir de nos jeunes enfants. Minimiser l’impact de cette affaire n’aurait servi à rien. Au contraire, en l’ébruitant, les députés de l’opposition ont apporté une prise de conscience qui mènera, on l’espère, à un renforcement de sécurité quand il s’agit des papiers d’examens.

Eshan Juman : « La directrice et la ministre sont toutes les deux responsables »

Eshan Juman persiste et signe. Le député travailliste ne démord pas et accuse la directrice de la MES, Brenda Thanacoody Soborun, ainsi que la ministre de l’Éducation, Leela Devi Doohun-Luchoomun, d’être toutes les deux responsables de cette situation causée par le non-respect des procédures. « Après avoir nié qu’il y a eu de fuites, la ministre confirme maintenant qu’il y en a bien eues. C’est très grave car tout le système est corrompu. Elle dit avoir pris toutes les dispositions nécessaires. J’espère que tel est effectivement le cas et que tout le système sera dorénavant verrouillé. C’est ce qu’on lui avait d’ailleurs demandé dès le départ, mais elle avait préféré jouer aux abonnés absents », dit le député du no. 3.