« Je serai intransigeant sur la question de la sécurité publique » ; « Le law and order, la priorité des priorités » ; « Mo pou sans pitié envers les fauteurs de troubles » … Combien de fois avez-vous entendu le Premier ministre prononcer ces phrases ? C’est la même rengaine depuis la campagne électorale de 2014, me diriez-vous sans doute. Et vous aurez entièrement raison, bien entendu. Père et fils nous avaient promis de redresser le law and order. Trois ans plus tard, on aurait cru que les choses ont évolué dans la bonne direction. Que nenni ! Mise à part la création du syndicat de la police qui, selon les aveux de Mario Nobin lui-même, n’aurait pas démarré comme il le souhaitait, aucune mesure concrète n’a été prise pour régler l’épineux problème de l’ordre et la paix publique. Pourtant, rien que pour l’année financière 2017-2018, une enveloppe de Rs 8, 4 milliards a été allouée à la police pour la réalisation de divers projets visant à sécuriser le pays, dont la mise en place du ‘safe city project’ qui aura englouti, d’ici juin, Rs 440 millions.
Ce projet étant perçu comme LA solution phare pour régler la problématique du law and order, nous n’avons pas l’ombre d’un doute que le prochain budget lui consacrera encore quelques centaines de millions de roupies. Une bonne partie de cette allocation sera d’ailleurs gérée par le chéri de la cuisine, Mauritius Telecom ayant signé un accord avec le gouvernement quant à l’implémentation de ce projet. Celui-ci, ambitieux certes, suffira-t-il pour faire renverser la vapeur et ramener de l’ordre dans le pays ? En pratique, un redressement du law and order ne sera pas possible tant que nos élus, par exemple, n’arrêtent pas de s’immiscer dans le fonctionnement de la police. Aussi longtemps que celle-ci est contrainte de se plier aux ordres venus d’en haut et qu’elle est utilisée comme un moyen de répression pour sévir contre les opposants du gouvernement, la situation ne connaîtra guère d’amélioration.
Les policiers ont et auront toujours un rôle central à jouer dans le maintien du law and order. Il faut donc leur donner les moyens pour qu’ils puissent travailler dans des conditions acceptables. Ce qui est loin d’être le cas pour une bonne partie d’entre eux. Vous serez probablement aussi interloqués que moi si vous avez regardé la vidéo que Sunday Times a publiée sur son site web jeudi et dans laquelle vous pouvez constater, avec stupéfaction, les conditions inhumaines dans lesquelles certains policiers sont appelés à travailler en période de grosses pluies. Les limiers de la CID Sud se voient même forcés, en temps pluvieux, de patauger dans des matières fécales débordant des toilettes et envahissant leurs locaux. Ce n’est guère étonnant donc que des interrogatoires prévus pour vendredi ont dû être renvoyés en raison de l’insalubrité des lieux. Ces enquêtes vont traîner un peu plus. Mais que voulez-vous ?
Si Pravind Jugnauth veut effectivement remporter la bataille contre la criminalité, il lui faudra impérativement revoir sa copie. Miser sur la technologie, c’est bien. Mais il ne faut surtout pas qu’il néglige d’autres facteurs liés aux conditions de travail des policiers. D’autant que celles-ci ont une conséquence directe sur le law and order.