[EDITO] Visage d’un autocrate

Jamais deux sans trois. Une fois de plus, et ce pour la troisième année consécutive, Maurice est cité comme un pays en voie d’autocratie dans le rapport suédois, V-Dem. Alors qu’à côté de nous, Madagascar et les Seychelles font des progrès significatifs en matière de démocratie, notre pays figure, lui, parmi les douze pays autocratiques. « Democracy seems to hang by a thread in Mauritius », réitère V-Dem dans son dernier rapport publié cette semaine. La raison de ce nouveau constat : les tentatives répétées du gouvernement de censurer les médias. « Mauritius – once hailed as the only liberal democracy in Sub-Saharan Africa – recently introduced several regulations that restrict the work of broadcasting companies and journalists », souligne V-Dem.


Le deuxième mandat de Pravind Jugnauth est donc placé sous le signe de l’autocratie. Il entrera dans l’Histoire du pays comme le seul Premier ministre qui a tiré le pays vers le bas sur le plan démocratique, alors que le pays s’apprête à célébrer ses 56 ans d’indépendance. Un record que le ministre des Arts et du Patrimoine culturel serait peut-être avisé de transmettre au ‘Guinness World Records’. Le gouvernement de Pravind Jugnauth n’a laissé passer aucune occasion de transformer notre pays en une République bananière. L’image honorable dont nous jouissions jadis sur le plan international est constamment mise à rude épreuve. Pas seulement à cause de la mauvaise gestion d’Air Mauritius qui, ironiquement est même dénoncée par le très contesté et contestable Ken Arian lui-même, mais aussi par des décisions qui confirment l’emprise tyrannique de Lakwizinn sur des institutions clés du pays. La nomination de Navin Beekarry à la tête de la nouvelle ‘Financial Crimes Commission’ (FCC) en est l’illustration parfaite.


Mais ce qui est encore plus scandaleux, c’est que le chef du gouvernement ne semble guère se soucier du fait que notre démocratie ait été réduite à un gimmick. Ce qui l’intéresse réellement, c’est d’avoir le contrôle absolu de toutes les institutions clés du pays. Pravind Jugnauth règne comme un vrai autocrate. Il est même encensé, non seulement par ses ministres qui sont pour la plupart plus risibles que crédibles et par des chatwas patentés qui ne jurent que par « Pravind nou le roi », mais aussi par des associations dites socio-culturelles mais qui ne sont, en fait, concernées que par leurs propres intérêts. Ces dernières se mettront sans doute à l’œuvre cette semaine pour tirer un capital politico-ethnique en faveur de Pravind Jugnauth dans le sillage de la visite officielle du Président indien, Smt. Droupadi Murmu, dans le cadre des célébrations officielles de l’indépendance. Ces mêmes associations socio-culturelles n’ont pourtant pas élevé la voix pour demander que la taille des kanwars soit légiférée pour la sécurité des pèlerins alors que cela aurait dû figurer parmi leurs priorités.

L’on aura aussi remarqué cette semaine comment le Premier ministre a détourné les célébrations officielles de la Journée internationale des droits des femmes à des fins bassement politiques. Il en a profité pour faire une énième annonce concernant la pension de vieillesse. Sans doute parce qu’il savait que l’audience venue l’acclamer était composée principalement de vieilles personnes, ironisent les mauvaises langues. Mais il n’a pipé mot sur cette conseillère proche du MSM qui subit des injustices dans son propre camp parce qu’elle compte épouser un homme qui soutient le camp adverse. Il n’a pas, non plus, annoncé des sanctions contre ce PPS qui se prend pour un bouncer à chaque occasion qui se présente et qui a menacé une conseillère du PMSD la semaine dernière. Il n’a démontré aucune compassion envers Simla Kistnen dont l’arrestation par la police soulève des doutes dans la tête de la population. Mais Pravind Jugnauth, en bon autocrate, n’en a cure. Double visage, double langage… Au final, tout ce qui compte, c’est son agenda.