[EDITO] Delulu, Not the Solulu

Par Zahirah RADHA

Delulu. C’est un terme généralement utilisé par la Gen Z pour exprimer sa désillusion. Un terme qui s’applique parfaitement au dernier budget présenté par Renganaden Padayachy vendredi soir. Le budget a été plutôt fade, illusoire, incohérent et sans aucune ambition économique. Il ne comporte rien qui puisse tirer le pays vers le haut en termes de développement, de croissance, de création d’emplois, de nouveaux piliers et du Produit Intérieur Brut (PIB). Alors qu’il avait fait miroiter une vision sur le long terme précédent son Grand oral, celui-ci s’est révélé être davantage une manœuvre électoraliste qu’un exercice de planification économique tourné vers l’avenir et les nouveaux défis tant internes qu’externes. D’autant que nous ne sommes pas à l’abri des conséquences résultant des conflits géopolitiques, notre économie dépendant grandement – trop même – sur les importations plutôt que sur la production. Padayachy a ainsi raté le coche. Pas seulement sur le plan économique, mais aussi sur le plan social, voire même – osons le dire – électoral.  

Au lieu de se focaliser sur les moyens pour stabiliser la valeur de la roupie et rehausser le pouvoir d’achat, le ministre des Finances a fait ce qu’il sait faire de mieux : jouer la carte du ‘money politics’. Or, la distribution de l’argent à gauche et à droite, on l’a vu ces dernières années, n’est pas nécessairement la solution pour régler la cherté de la vie qui est l’ennemi no. 1 des familles et des foyers mauriciens. Nul besoin d’être économiste pour savoir qu’un excédent d’argent dans le circuit monétaire engendra une hausse des prix et de l’inflation. Pendant que les Mauriciens seront éternellement empêtrés dans la tourmente inflationniste, le gouvernement continuera, lui, à récolter les revenus provenant de la TVA. N’oublions pas que pas ces hausses des pensions et d’autres prestations sociales ne sortent que de nos poches et pas celles de Padayachy, de Pravind Jugnauth ou du gouvernement MSM. Tout comme les fonds gaspillés et engouffrés par la mauvaise gestion du dossier Betamax, des respirateurs défectueux de Pack & Blister, des contrats alloués aux proches, agents et amies d’enfance ainsi qu’aux quincailleries et bijouteries provenaient de nos poches.

Pire, rien n’a été mentionné dans ce budget concernant la rétention de notre jeunesse mauricienne au pays. On voit mal comment un jeune de 18 ans ne sera pas tenté d’aller voir ailleurs quand on lui dit qu’il peut s’endetter dès l’âge de la majorité pour se procurer du matériel informatique. Comme si la dette publique frôlant les Rs 400 000 qui pend sur la tête de chacun d’entre nous n’était pas suffisante pour lui faire « sauter la mer ». Et quid des jeunes professionnels de 25 à 40 ans ? Qu’a-t-il été prévu pour eux dans ce budget, outre une hausse des allocations de la CSG, une mesure temporaire dont la suppression a été recommandée par le Fonds International Monétaire (FMI) ? Comment le gouvernement contiendra-t-il la frustration de ces milliers d’employés diplômés qui ne percevront probablement pas plus que les Rs 20 000 dont bénéficieront des travailleurs professionnellement moins qualifiés qu’eux sous le Revenu Minimum Garanti ? Comment calmer la colère de ces centaines de milliers de travailleurs qui attendent avec impatience une révision salariale depuis plusieurs mois ou encore de ces fonctionnaires privés du paiement de leur overtime et autres allocations depuis le début de l’année ?

Malgré toutes ses acclamations et ses ‘tap latab’, que le gouvernement se rende à l’évidence. S’il voulait appâter l’électorat avec ce dernier budget, sa tâche sera beaucoup plus ardue qu’il ne le pense, surtout avec son bilan peu flatteur ponctué par des scandales, du total breakdown du law and order, et de la politisation outrancière de nos institutions, entre autres. Les yeux doux qu’il fait aux hommes religieux à travers les facilités duty free – une mesure on ne peut plus clientéliste – pour l’achat des véhicules ne lui rapportera probablement pas les dividendes attendus. Le flux de commentaires les uns plus acerbes que les autres sur les réseaux sociaux suffisent pour comprendre la désillusion des citoyens. Padayachy et son gouvernement dirigé par Pravind Jugnauth finira par comprendre que « delulu is NOT the solulu ! ».