Lovena Sowkhee : « La loi est mal appliquée »

Résurgence des cas de violence domestique

Des cas de violence domestique ressurgissent et nous donne froid dans le dos. Ce qui interpelle surtout, c’est que ces victimes, à l’instar de Tina Roy Thupsee, assassinée froidement dans un autobus, ont, dans la plupart des cas, un ‘Protection Order’. Mais en vain. L’avocate Lovena Sowkhee met ainsi en exergue les défaillances de la loi, ou plutôt, de son application. « Il y a la loi et l’application de la loi, qui sont deux choses différentes », nous fait comprendre d’emblée notre interlocutrice. L’avocate dit avoir observé que de nombreuses victimes de violence domestique sont celles qui ont délaissé leur propre famille d’une façon ou d’une autre, pour aller vivre loin ailleurs avec leur mari ou partenaire. Pour certaines raisons donc, tout retour au cocon familial peut se révéler problématique. 

Sous le ‘Protection From Domestic Violence Act’, toute femme victime de violence domestique peut obtenir un ‘Protection Order’ de la cour de district, qui sont émises de façon courante. Mais souvent, c’est la victime qui doit quitter le foyer conjugal. Il convient, selon Lovena Sowkhee, de se demander pourquoi est-ce la victime qui doit quitter le foyer conjugal alors que selon la loi, elle peut demander un ‘Interim Occupation Order’ ou ‘Interim Tenancy Order’, où c’est l’agresseur qui devra quitter le foyer et non la victime ? « Je n’ai aucun problème à ce que les cours de district continuent d’émettre des ‘Protection Order’, mais il faudrait passer à l’étape supérieure quand la violence domestique commence à prendre une tournure plus dangereuse », dit-elle.

Selon Lovena Sowkhee, il y a des demandes qui sont faites pour obtenir ce genre de mesures protectrices mais que les victimes ne sont pas en train de les obtenir. « À Maurice, ce n’est que dans très peu de cas que les cours émettent des ‘Interim Occupation Orders’ ou des ‘Interim Tenancy Orders’, alors que dans d’autres pays, lorsqu’une victime en fait la demande, elle les obtient avec rapidité », fait-elle ressortir. Pour l’avocate, la loi n’est pas appliquée comme il le faut. « Il est grand temps de revoir l’application de la loi », souligne-t-elle. D’autre part, elle se demande si l’actuelle loi contient assez de provisions pour assurer une protection adéquate aux victimes de violence domestique. Elle estime ainsi que cette loi est caduque à bien des égards.

« Nos parlementaires ont beaucoup débattu sur le sujet de la violence domestique mais sur le plan pratique, l’application des lois se fait toujours désirer car il n’y a pas eu de changement », lance-t-elle. Lovena Sowkhee dit aussi qu’il faudrait envisager un bracelet électronique anti-rapprochement. Ce bracelet est muni d’un dispositif de géolocalisation connecté à un récepteur en possession de la victime. Lorsque celle-ci porte le récepteur, un signal d’avertissement est émis non seulement pour la prévenir, mais aussi alerter les autorités quand l’agresseur s’approche d’elle au-delà d’un certain périmètre. En ce qui concerne l’application l’Espwar, elle salue cette initiative du  gouvernement mais dit toutefois que cette application a ses limites. « Il faudrait prendre le taureau par les cornes et il faudrait des actions immédiates des autorités pour tacler le problème de la violence domestique », conclut-elle.