Propos méprisables de l’internaute Rubina Seetharamdoo : « Les préjugés sont toujours présents contre les personnes en situation de handicap à Maurice »

Quelle importance accordons-nous au droit des personnes qui se retrouvent en situation de handicap ? Est-ce que leurs droits sont bien respectés à Maurice ? C’est la question que des milliers des personnes se posent, après qu’une internaute bien connue, qui se fait appeler ‘Chachi Rubina’, ait mis en ligne une vidéo ce jeudi 1er juillet, dans laquelle elle tient des propos blessants et haineux contre les personnes en situation de handicap. Pour les travailleurs sociaux, si on en est arrivé là aujourd’hui, c’est parce que le gouvernement et la société mauricienne ne font vraiment rien de bien concret pour inclure les handicapés. 

Après que des dépositions ont été consignées aux Casernes centrales vendredi matin, Rubina Seetharamdoo a été arrêtée pour infraction à l’ICTA et elle passera le week-end en cellule.

Selon le travailleur social Ally Jookhun, qui a été la première personne à porter plainte contre Rubina, une personne ne peut pas se permettre de parler comme elle l’entend sous prétexte qu’elle jouit du droit à la parole. Il estime que c’est blessant que des personnes puissent tenir de pareils propos, ce qui révèle un manque d’éducation. Ally Jookhun ne connaissait pas Rubina Seetharamdoo jusqu’au moment où sa vidéo a commencé à circuler sur les réseaux sociaux. Selon lui, si cette internaute s’est permise de tenir de pareils propos, c’est qu’elle pense qu’elle a une audience qui serait réceptive. « À travers le monde, il y a encore beaucoup de préjugés contre les personnes en situation de handicap », soutient le travailleur social. La loi a ainsi un grand rôle à jouer dans ce genre de cas.

Il souligne que Maurice est signataire de la Convention sur les droits des handicapés depuis 2010. « Qu’est-ce qu’on a donc fait après ? », se demande-t-il. Ally Jookhun fait ressortir qu’il y a 50 articles dans cette Convention qui portent sur les droits des personnes en situation de handicap. L’article 33 indique qu’un pays signataire de cette Convention doit avoir un ‘Monitoring Committee’ pour voir comment il fait respecter les droits des personnes en situation de handicap. Ally Jookhun devait dénoncer le fait que ce comité n’existe pas à Maurice. Le travailleur social indique que même les personnes en situation de handicap, ou leurs parents, ne sont pas conscients de leurs droits sous la Convention.

Les Nations-Unies, poursuit Ally Jookhun, tentent de créer une société inclusive, et tous doivent être sur la même longueur d’ondes. Au niveau du gouvernement et du ministère concerné, dit-il, c’est une bonne occasion de se ressaisir et de relancer la campagne de sensibilisation en ce qui concerne les personnes autrement capables. Il pense toutefois que cela doit être une ‘ongoing campaign’.

Yasseen Edoo : « Le ‘Disability Discrimination Bill’ toujours aux calendes grecques »

Yasseen Edoo, ardent défenseur du droit des handicapés, et qui se retrouve lui-même dans une situation de handicap, déplore l’absence de campagne de sensibilisation pour éduquer la population mauricienne sur les droits des personnes en situation de handicap.

Pour lui, le système éducatif mauricien n’est pas vraiment inclusif, vu que les enfants souffrant de  surdité ou de cécité, entre autres handicaps, ne peuvent fréquenter une école normale, comme les autres enfants. Or, une telle inclusion aidera, selon Yasseen Edoo, à changer la mentalité des Mauriciens. Yasseen Edoo est d’avis que c’est à travers ces manquements que des personnes comme Rubina Seetharamdoo tiennent de pareils propos.

Il devait aussi dénoncer l’absence de loi-cadre pour les autrement capables. « Le ‘Disability Discrimination Bill’ n’a pas encore été présenté au Parlement, une loi que ce gouvernement avait pourtant promis dans son manifeste électorale en 2014. Voilà donc le résultat sept ans après, en 2021 : l’internaute Rubina débite les propos qu’elle veut. C’est vraiment écœurant », martèle-t-il. 

Le militant pour les droits des handicapés insiste que les personnes en situation de handicap contribuent beaucoup dans la société. Toutefois, travailler est un problème majeur pour ces derniers à Maurice, bien qu’il existe une loi qui fasse obligation à une compagnie privée ou à un corps paraétatique de recruter un certain nombre de personnes en situation de handicap. « Or, il est malheureux que le gouvernement ne donne pas l’exemple, car cette loi ne fait aucune obligation au secteur public de recruter des personnes en situation de handicap », devait-il dénoncer.  La faute vient ainsi, selon lui, du gouvernement, qui ne fait rien pour que les personnes en situation d’handicap puissent obtenir un emploi dans le secteur public. Il fustige le fait que le ministère de la Sécurité sociale ne fait rien pour faire respecter la loi quand les compagnies ne recrutent pas un certain nombre d’handicapés.

Yasseen Edoo demande la mise en place d’un système de télétravail pour les personnes en situation de handicap, cause pour laquelle il milite depuis des années, mais en vain.