54 ans : Sous le signe d’un recul de la démocratie

1968 – 2022. 54 ans depuis que le pays a accédé à l’indépendance. Notre pays est donc une jeune et vulnérable démocratie. Malheureusement, au lieu d’œuvrer pour sa consolidation, le pays glisse lentement mais surement vers une autocratie. Le nouveau rapport suédois V-Dem, publié au début de mars 2022, épingle encore une fois Maurice. Bien qu’il ne nous classe pas comme une autocratie électorale en dépit des irrégularités aux dernières élections générales de 2019 et confirmées par la Cour suprême, le ‘V-Dem Institute – Democracy Report 2022’ (lire : https://v-dem.net/media/publications/dr_2022.pdf) nous cite comme l’un des 21 pays où « increased media censorship took place ». Guère surprenant. On l’anticipait même, au vu des atteintes répétées contre la liberté de la presse, comme en atteste la récente ‘IBA (Amendment) Act’. Un autre coup dur que le pays est contraint d’endurer par la faute de ce gouvernement irresponsable qui ne se soucie point de ses actions irréfléchies et insensées.

À l’aube de ce 54eme anniversaire de notre indépendance, notre cœur pleure. Parce que le destin de notre ‘Motherland’ se retrouve entre les mains de dirigeants incompétents, ignares et égoïstes. Des gouvernants dépassés qui n’arrivent pas à retirer le pays de l’abîme où il s’est enfoncé. Au lieu de progresser, Maurice a fait un bond en arrière, en dépit de la modernisation du pays, d’une démocratisation en demi-teinte de l’économie et des développements infrastructurels dont certains sont tout sauf prioritaires. Le coût de la vie grimpe en flèche.  Nos portemonnaies pleurent. Des familles n’arrivent plus à manger à leur faim. Les ménages s’appauvrissent. L’éducation et l’avenir de nos enfants s’assombrissent. Le tissu social se fragilise. Le pays est outrancièrement endetté. Notre économie s’écroule alors qu’une crise sociale se profile dangereusement à l’horizon. En même temps, nos institutions sont excessivement politisées. La démocratie parlementaire est bafouée. Notre pays est littéralement inondé à chaque pluie torrentielle. Bref, la liste est longue.

Toute la faute revient bien entendu au gouvernement. Et celui-ci ne peut pas tout mettre sur le dos de la Covid-19 et l’actuelle guerre entre la Russie et l’Ukraine, car la plupart de ces maux qui rongent notre pays sont liés en grande partie à sa mauvaise gouvernance et son cruel manque de prévoyance et de vision. Mais malgré les innombrables défis qui menacent de nous guillotiner socialement et économiquement, le gouvernement ne donne aucun signe de vouloir changer son train-train quotidien extravagant, en consentant à des sacrifices en attendant de venir avec un véritable programme de relance lors de son prochain exercice budgétaire. C’est là tout le drame de notre pays. Une tragédie que nous devons subir pendant encore un demi-mandat ou même plus si l’Opposition n’arrive pas à accorder ses violons.

Cette même Opposition qui est censée représenter l’alternance au pouvoir en place, mais qui s’enlise vainement dans des épisodes ‘koz kozé’ qui n’en finissent plus. Autant on souhaite une réunification des partis de l’Opposition pour botter le gouvernement de Pravind Jugnauth hors du pouvoir, autant on se désole de la tournure pitoyable que prennent ces négociations devenues carrément lassantes. La population n’en a cure des formules à l’israélienne qui puent les calculs communaux et castéistes. Ce qu’elle demande après 54 ans de l’Indépendance, c’est une véritable politique de rupture telle que prônée par le PTr. Une nouvelle gouvernance basée, entre autres, sur la compétence, la méritocratie, la justice sociale et surtout l’égalité hommes-femmes qu’on semble avoir jusqu’ici relégué au second plan. Rupture, il ne peut y en avoir tant qu’on brandisse les mêmes et éternelles « winning formulas » et tant qu’on fasse de l’attribution des postes une obsession indigeste et risible. Il est temps pour que l’Opposition se ressaisisse. On veut bien d’une Opposition réunie, mais pas à n’importe quel prix.

Entretemps, le gouvernement, bien que politiquement affaibli, se frotte les mains devant le spectacle gratuit qu’offre l’Opposition et poursuit imperturbablement son exercice de débauchage. La plus grande perdante : la population, cette orpheline dont personne ne s’en soucie.