Bills Gate : L’ICAC enquêtera-t-elle ?

L’Independent Commission Against Corruption (ICAC) étudie actuellement deux dossiers pour savoir s’il y a matière à enquête sous la « Prevention of Corruption Act » (POCA) dans l’affaire Sinatambou. Une décision sera prise sous peu.

Le premier dossier concerne la publication dans la presse de plusieurs articles, ainsi que la publication des photos des différentes factures de restaurant et d’hôtel, portant les signatures du ministre. Le deuxième dossier fait suite à la déposition de l’homme d’affaires Rigg Needroo contre Étienne Sinatambou.

Jeudi dernier, c’est accompagné de son avocat, Me Akil Bissessur que l’homme d’affaires Rigg Needroo s’est rendu au Réduit Triangle pour consigner une déposition contre Étienne Sinatambou. Il s’est basé sur la section 43 de la PoCA pour porter l’affaire devant la commission anticorruption. Ce texte de loi stipule que tout individu soupçonnant un acte de corruption peut le notifier à la commission anticorruption, en oral, en écrit ou même anonymement. Dans le présent cas, l’homme d’affaires a affirmé qu’il n’avait aucun souci à dévoiler son identité.

Selon les dispositions de la loi, une fois en présence d’un dossier, c’est un comité au sein de l’ICAC qui étudie s’il y a matière à enquête sous la PoCA. Le comité en question est déjà en présence des deux dossiers. Du côté de l’ICAC, on reste très avare de commentaires, vu qu’il s’agit d’une affaire sensible, car impliquant un ministre. Mais toutefois, on assène que la décision du comité sera prise selon les dispositions de la loi. Enquête ou pas, personne ne croit cependant que la commission anti-corruption ira jusqu’au bout…

D’autres factures se profilent à l’horizon

Les détracteurs du ministre Etienne Sinatambou, paraît-il, sont très nombreux. Après que ses factures de l’hôtel Labourdonnais ou celles du CEB se soient étalées dans la presse, d’autres viendront bientôt s’ajouter à cette liste. En effet, il semblerait que le ministre doit des dizaines de milliers de roupies à la municipalité de Port-Louis. Les factures concernant le paiement de ses taxes municipales, plus précisément celles de son cabinet de notaire se trouvant à la rue Sir Virgile Naz à Port-Louis, s’entassent sans qu’elles ne soient réglées. Une situation qui exaspère l’administration municipale de la capitale. Sunday Times sera d’ailleurs en mesure de les publier sur son siteweb dans les jours à venir.

Enquête similaire en 2006

Ce n’est pas la première fois qu’Etienne Sinatambou se fait rattraper par des dettes ou des factures impayées. Dans notre édition du 9 juillet 2017 intitulé « Non-paiement d’une transaction immobilière effectuée en 2012 – Rs 11 millions réclamées à Etienne Sinatambou », on avait révélé les dessous d’une mise en demeure servie à Etienne Sinatambou par la compagnie « ZT Investment Ltd ». Bien que le ministre avait nié qu’un de ses clients lui avait remis la somme de Rs 7, 5 millions pour remettre au promoteur « ZT Investment Ltd », ce dernier avait quand même obtenu son paiement peu après la parution de notre article.

Il faut aussi rappeler qu’Etienne Sinatambou avait fait face à un procès similaire en 2006. Il avait été dénoncé à l’ICAC par un « whistleblower ». Il avait, à l’époque, réservé une « single room » à l’hôtel Maritim pour une nuit. Or, il y avait été vu en compagnie d’une invitée. Ce qui avait fait croire à certains que celle-ci y avait également passé la nuit. L’ICAC avait d’ailleurs ouvert une enquête et plusieurs employés de cet établissement hôtelier avaient été interrogés. Mais personne ne connaît les conclusions de cette enquête. Cette affaire avait aussi donné lieu à une enquête interne ordonnée  par la direction de l’hôtel Maritim et présidée par Désiré Basset, pour situer la responsabilité de cette fuite d’information. Plusieurs employés avaient été entendus dans le cadre de cette affaire.

Deux journalistes interrogées

Alors que l’ICAC hésite toujours avant d’ouvrir son enquête, le CCID a, lui, déjà procédé à l’interrogatoire de deux journalistes durant la semaine suivant une déposition faite par Etienne Sinatambou à leur encontre. La rédactrice en chef de Sunday Times, Zahirah Radha, a ainsi passé plus de deux heures dans les locaux de l’IT Unit du CCID, jeudi. Accompagnée de son homme de loi, Me Yousuf Mohamed, elle a été interrogée « under warning » concernant la publication d’un article en ligne en date du 10 août dernier. Cependant, aucune charge n’a été retenue contre elle. Un dénouement salué par Me. Yousuf Mohamed. « Si jamais l’affaire devait aller en cour, je me rejouis quant au contre-interrogatoire de Sinatambou et des préposés de l’hôtel. J’ai beaucoup de munitions et je vais sortir l’arsenal voulu », a cependant averti le Senior Counsel.

Anju Ramgulam, chef d’édition à l’Express, a également été entendue par les limiers du CCID, vendredi. Elle a également été autorisée à partir après son interrogatoire.