[EDITO] Une victoire, d’innombrables tromperies

Par Zahirah RADHA

Ce mardi 7 novembre 2023 marquera les quatre ans du deuxième mandat de ce gouvernement au pouvoir. Mais cela fait neuf ans depuis que le MSM règne. D’abord par le père, qui a ensuite légué le primeministership, tel un héritage, à son fils, sans passer par des élections qui lui aurait donné une légitimité. Le ‘Government House’ était donc devenu le Sun Trust des Jugnauths. Par la suite, il y a eu les élections truquées et truffées d’irrégularités de 2019. « Une élection, deux victoires », s’est targué le MSM après le jugement du Privy Council le 16 octobre dernier. Or, cela devait être « Une élection, d’innombrables tromperies ». Car le gouvernement n’a cessé de tromper les 27% de votants qui l’ont plébiscité aux dernières élections. À commencer par la pension de vieillesse.

Alors que nos aînés attendent toujours les Rs 13 500 promis, la caisse de la ‘Contribution Sociale Généralisée’ (CSG), introduite entretemps sans qu’elle ne soit incluse dans le manifeste électoral, contrairement à la hausse de pension sur laquelle toute la campagne électorale du MSM et de ses alliés était axée, est aujourd’hui à plat. Et pourtant. Rs 25 milliards ont été récoltés en trois ans. Et ces mêmes Rs 25 milliards ont tous été dépensés, détournés de leur but principal, destinés à la pension. Les pensionnaires ont été leurrés. Les travailleurs ont été dépouillés. Pendant que le gouvernement leur fait croire qu’il leur vient en aide. En puisant dans les réserves de la pension comme si c’était la caisse du Sun Trust.  

Quant à la corruption, n’en parlons même plus. Elle est enracinée dans les arcanes du pouvoir. Hyperpharm, Pack & Blister, Molnupiravir, Constituency clerk, sniffing gate… Que n’a-t-on pas vu ? Des ministres, y compris le Premier ministre, PPS, nominés politiques éclaboussés par des allégations, et non des moindres. Quelques-uns ont été contraints à la démission. Certains ont été entendus par la police ou l’ICAC. D’autres ne sont même pas inquiétés. Le même gouvernement qui avait promis de mener une politique de tolérance zéro contre la fraude et la corruption ferme aujourd’hui les yeux sur les siens qui sont impliqués. Le Premier ministre n’a dans son radar que des opposants au pouvoir tandis que des criminels et des trafiquants de drogue courent librement.

La police, elle, est prompte lorsqu’il s’agit d’obéir aux ordres de Lakwizinn, mais ne connait rien quand il faut protéger les citoyens et prévenir des incidents, comme dans le cas de La Citadelle. Beaucoup de monde, y compris le conseiller du vice-Premier ministre Anwar Husnoo, était au courant des risques de possibles incidents, sauf la police d’Anil Kumar Dip. Notre police ne lésine pas sur les moyens quand il s’agit de faire des arrestations intempestives, même sans mandat d’arrêt, chez des opposants politiques du régime en place, mais elle n’a aucun mal à battre en retraite lorsqu’elle est refoulée par des membres d’un service de sécurité privé. Quelques individus encagoulés sont donc plus puissants et efficaces que la police de Dip. Bravo ! Voilà à quoi est réduit notre law and order sous l’ère Jugnauth, en dépit de toutes les belles déclarations du Premier ministre.

La Santé publique ne se porte pas mieux. Elle est malade. Car sa prise en charge se trouve entre les mains d’un amateur. Emergency procurements, décès des patients dialysés, médicaments expirés ou en rupture en stock, aliments pourris et périmés, absence d’hygiène dans des salles et des cuisines, lits et matelas soutenus par des boîtes en carton… Comment ne pas rendre encore plus malades les patients qui se rendent à l’hôpital pour des traitements ? Au fur et à mesure que les députés travaillistes Shakeel Mohamed et Eshan Juman, qu’on salue très bas d’ailleurs, révèlent des photos ou des vidéos de la situation déplorable et inexplicable dans les hôpitaux, la population s’indigne de plus en plus de ce manque d’égard de la part des autorités hospitalières. Et ce n’est pas par faute de ressources financières. Ce ministère bouffe annuellement l’un des plus gros budgets. Pour l’année financière en cours, il dispose d’une enveloppe financière de Rs 15, 7 milliards. Mais la qualité de service n’est visiblement pas à la hauteur de ce budget colossal. Le ministre de la Santé Kailesh Jagutpal a vraisemblablement du mal à gérer efficacement son ministère et les responsabilités qui en découlent.

Au niveau du combat contre la drogue, le constat est tout aussi ahurissant. On se targue du nombre record de saisies de drogues. Par contre, le nombre de trafiquants arrêtés et traduits devant la justice reste relativement bas, voire inexistant. Dans l’affaire Franklin, par exemple, il n’y jusqu’ici eu aucun volet sur un possible trafic de drogue. Inouï, surtout quand on sait qu’une jeune femme, Shazia Oozeerally-Jaffar, a, elle, été vigoureusement arrêtée pour être prétendument à la tête d’un grand réseau de trafic de drogue après une opération policière de grande envergure. Mais les charges provisoires contre elle ont été abandonnées en Cour vendredi parce que les substances saisies chez elle n’étaient pas de la drogue. Ce qui interpelle le plus dans cette affaire, outre le fait que la vie et la réputation d’une jeune femme innocente ont été ternies à jamais, c’est que la police se soit laissée embobiner aussi facilement par l’escroc qu’est Hussein Abdool Rahim. Et le Premier ministre osera encore dire qu’il mène un combat sans relâche contre la drogue.

Le pays se retrouve aujourd’hui à genoux. Sur tous les plans. Situation sociale suffocante, économie en lambeaux, éducation défaillante, méritocratie inexistante, fléaux ravageurs, démocratie en recul et autocratie en devenir… Suffisant pour que nos jeunes aillent voir ailleurs, là où l’herbe est plus verte. Alors que ceux qui restent continuent de payer les pots cassés d’un gouvernement pilleur et sans vision. De 2014 à 2023, le pays a régressé de façon drastique. Le bilan du MSM à ce jour est cataclysmique.