À l’occasion de la Journée internationale de la Femme, nous avons fait la rencontre de deux coupeuses de cannes, âgées d’une cinquantaine d’années et habitant Gros-Cailloux. Laboureuses depuis plus de 30 ans, le 8 mars leur semble être un jour comme les autres. Malgré les dures journées sous le soleil et la pluie, elles se disent honorées de s’occuper des richesses naturelles de l’île Maurice, qu’est la canne à sucre.
Il est 6 h du matin, nous nous sommes rendus à Gros-Cailloux, dans l’ouest de l’île. Comme tous les jours, Taramatee Ramduth, 59 ans, et Etwaya Ramkistoo, 58 ans, vêtues d’un ensemble bleu, avec des bottes et des gants, sont enfin équipées pour se mettre à l’œuvre aux petites heures du matin. Les deux arboricultrices sont aussi munies de faucilles, avec un bandeau enroulé ou un chapeau de paille sur la tête pour se protéger du soleil ou du mauvais temps. Coupeuses de canne de profession, en attendant la saison en juin, les quinquagénaires gagnent leur vie en dépouillant de l’herbe sur les terrains en friche. Ce dur métier a permis aux deux veuves de subvenir aux besoins de leur famille pendant des années.
Elles sont déjà sur pied à 4 h du matin. Toutes les deux mères de quatre enfants, dont deux qui habitent toujours avec elles, les laboureuses s’occupent de leur foyer, préparent le petit déjeuner et le déjeuner, et font un bref ménage avant de se rendre au travail.
À 6 h du matin, il fait plus de 300 C, le plus dur de la journée débute. Taramatee et Etwaya, au service de Gamma Civic, sont accompagnées de deux autres laboureurs pour dépouiller le terrain en friche de 150 arpents à Gros-Cailloux. Une tâche qui durera environ une ou deux semaines, six heures par jour. Ce jour-là, dans ce champ, faucille en main, elles se courbent pour couper de l’herbe, et assurent le ramassage de cailloux et le grattage du sol. Elles ne s’arrêtent que pour souffler un peu puis recommencent.
En dépit des douleurs de dos, les dames se disent fières de leur profession et ne cesseront qu’à la retraite. « Noun habitié, ki pou faire, c’est nou premier métier, la vie cher et nou bizin pa plaigner », disent-elles. Les conditions climatiques ne les arrêtent pas pour autant. Soleil de plomb, vent et intempéries, elles n’ont pas froid aux yeux et restent fidèles à leur poste. Elles précisent que depuis l’âge de vingt ans jusqu’aujourd’hui, la fatigue et le découragement prennent le dessus très souvent, mais elles ont pu se relever avec l’aide de Dieu. « Nou bizin l’argent pou survive, nou bizin prend courage », ajoutent-elles.
Lorsque la saison de la canne à sucre est ouverte, la coupe commence au mois de juillet et se termine en novembre. Leur tâche consiste alors à couper les cannes. Heureusement, avec la mécanisation, des machines agricoles ramassent les tiges.
Leur salaire est d’environ Rs 300 par jour. L’une d’elles, la fatigue visible sur le visage, essuie la sueur de son front et ajoute que les laboureurs n’obtiennent pas de bonus à la fin de l’année.
La Journée de la Femme, une journée comme les autres
Lorsqu’on leur a demandé leur point de vue sur la Journée internationale de la Femme, elles nous répondent : « Péna okene différence, ce ene jour normal ». Cependant, elles songeraient à organiser une sortie familiale ce dimanche. Leur week-end leur est sacré, c’est le seul moment où toute la famille se retrouve.
Ce travail leur a aussi permis de renforcer leur amitié. Elles se connaissent depuis 30 ans et se donnent mutuellement du courage. Ces deux amies de longue date font preuve de patience et de débrouillardise. Leur veuvage n’a jamais été un obstacle insurmontable.
Le sourire jusqu’aux oreilles, les deux paysannes sont fières d’être parmi les dernières générations de laboureuses, car leurs enfants ne songeraient pas à prendre la relève.
Fiche perso
Nom : Taramatee Ramduth, veuve
Enfants : Quatre enfants, soit une fille et trois fils et cinq petits-enfants
Ma devise : « Toujours être fier de ce qu’on fait »
Nom : Etwaya Ramkistoo, veuve
Enfants : Quatre enfants, soit deux filles et deux fils et cinq petits-enfants
Ma devise : « Avoir la foi en Dieu »
