Prix de l’essence
Megh Pillay, ancien directeur de la STC :
Alors que les consommateurs attendaient une baisse des prix des carburants, ceux-ci sont restés inchangés. La STC (State Trading Corporation) avait recommandé une hausse de Rs 5,05 sur le diesel, mais le ministre du Commerce, Soodesh Callichurn, dit avoir refusé cette augmentation, en vertu des dispositions du règlement 8A de la ‘Consumer Protection (Control of Price of Petroleum Products) Regulations 2011’. Le prix de l’essence et du diesel a donc été maintenu à Rs 74,10 et Rs 54,55 respectivement.
C’est la troisième fois consécutive que le ‘Petroleum Pricing Committee’ (PPC) recommande une hausse des prix des carburants à l’île Maurice, mais le ministre a, à nouveau, désapprouvé cette proposition. Certains se demandent si cela fait partie d’une ruse pour que Renganaden Padayachy présente un budget avec des mesures populistes, comme une baisse des prix des carburants.
La question se porte désormais sur le rôle du mécanisme de fixation des prix des produits pétroliers. Selon Megh Pillay, ancien directeur de la STC, le fond du problème est que ce mécanisme ne fonctionne plus. La cherté des carburants est due en grande partie aux prélèvements des taxes dans la structure des prix pétroliers, qui coûtent environ Rs 22 par litre d’essence.
« Il n’y a plus de mécanisme de stabilisation des prix depuis plusieurs années car le ‘Price Stabilization Account’ (PSA) n’est plus alimenté en surplus obtenus des prix bas à l’importation. Par conséquent, le prix augmentera automatiquement si la structure de prix existante reste inchangée et si le gouvernement n’intervient pas en autorisant des dérogations aux dispositions légales ou en avançant des fonds à la STC. Pour épargner les consommateurs et notre économie insulaire des fluctuations du cours mondial, il faudra revoir de fond en comble la politique de fixation des prix et mettre fin à l’exercice de “fire-fighting” permanent mis en évidence par le directeur de l’Audit. Il est également nécessaire de cesser la pratique consistant à appliquer une charge additionnelle sur le prix, puis à ne pas transférer les fonds collectés à qui de droit, pour finalement utiliser ces fonds pour substituer au PSA afin de mitiger une augmentation rendue inévitable par l’application d’une ‘’pricing structure’’ », soutient-il.
Modulation de la structure du prix
Le comité, qui s’est réuni le jeudi 11 mai, a noté que le déficit d’environ Rs 4,7 milliards du compte de stabilisation des prix est dû au fait que les précédentes réunions du CPP n’ont pas répercuté la totalité de l’augmentation des prix du Mogas et du Gasoil sur les consommateurs, en raison de la limite de 10 % d’augmentation autorisée par les règlements, malgré la forte hausse des prix mondiaux qui a entraîné des augmentations de plus de 10 % du prix de détail calculé.
Cependant, Megh Pillay ne comprend pas cette logique. « Lorsque les prix ont augmenté plusieurs fois à l’international, le déficit du PSA a été évoqué pour justifier les hausses. Mais quelle est la logique de dire que le prix ne baissera pas parce que le fonds est déficitaire ?», s’interroge-t-il. « Il est facile de dire que le PSA n’a pas d’argent. Ce fonds était alimenté par l’argent qui est récolté lorsque le prix à l’international baisse. Il y avait tout un mécanisme mis en place. Mais depuis 2015, le gouvernement a redirigé l’argent qui devait aller dans ce fonds vers sa caisse à travers une multitude de taxes. Il est donc normal qu’aujourd’hui, le fonds soit déficitaire. Le prix fluctue tous les jours. Comme il n’y a pas d’argent pour stabiliser le coût, les futures hausses seront répercutées à la pompe », a-t-il ajouté, tout en suggérant de réduire certaines taxes ou de renflouer le PSA pour faire baisser le prix des carburants.
Megh Pillay prévoit que le prix moyen annuel du baril de pétrole se situera entre 85 et 90 dollars en 2023, ce qui signifie que la STC devra acheter des carburants plus chers. « Le coût d’importation par la STC sera donc inévitablement plus élevé que ce qu’elle a payé au cours des 13 derniers mois », explique-t-il. Toutefois, il recommande de ne pas céder à la panique et de suivre le ‘Petroleum Pricing Mechanism’ original, qui prévoit de se baser sur l’historique du cours du Brent et de temporiser par les contrats de livraisons futures. Il suggère également de moduler la structure du prix en tenant compte des attentes légitimes de l’État en matière de subventions croisées, jugées nécessaires pour ses besoins budgétaires. « Toutes ces exigences peuvent être conciliées de manière ordonnée et crédible en laissant le Petroleum Pricing Committee et la STC gérer en toute indépendance », conclut-il.