Le gouvernement a-t-il une dent contre les marchands ambulants, vu les tracasseries que ces derniers sont en train de subir, cela alors qu’ils n’ont pas pu travailler pendant deux ans consécutifs à cause de la pandémie ? Après les problèmes rencontrés par les forains du Victoria Urban Terminal, ceux de la foire de Cité Martial ont failli se retrouver dans une situation similaire, jusqu’à ce qu’ils élèvent la voix…
C’est le ras-le-bol des marchands opérant à l’Ibrahim Abdoolah Fair Market à Cité Martial à Port-Louis. En effet, ces marchands ont reçu, en début de semaine, une lettre de la part des autorités, faisant état d’une rénovation qui devait débuter dès cette semaine. Or, cette réfection de ce bâtiment nécessite l’évacuation des marchands. Et, selon ces marchands, les dispositions de la loi prévoient que les autorités doivent accorder un délai de 14 jours pour qu’un marchand puisse évacuer l’endroit où il opère. Ce qui n’a pas été appliqué dans le cas présent.
Les marchands concernés déplorent la façon de faire du gouvernement. La décision du gouvernement de les évacuer du marché alors que les festivités de fin d’année approchent à grands pas leur est préjudiciable. Ces marchands font ressortir qu’ils n’ont pas travaillé pendant deux ans à cause de la pandémie de covid-19. Ils sont en train de faire difficilement face à la cherté de la vie et beaucoup n’arrivent pas à joindre les deux bouts. Ils comptent ainsi beaucoup sur les ventes qu’ils vont réaliser pendant les mois de novembre et de décembre pour se faire un peu d’argent.
Saoude, le porte-parole de ces marchands, ne voit aucune nécessité d’une rénovation des lieux vu que le bâtiment de cette foire est toujours en bon état. La construction de ce bâtiment avait couté environ Rs 60 millions alors que le gouvernement compte investir, selon lui, une somme de Rs 45 millions pour sa rénovation. « Pourquoi rénover un marché qui est toujours en bon état ? Pourquoi priver les marchands de leur lieu de travail pendant la rénovation alors que les festivités approchent à grand pas ? », se demande-t-il. « Nous ne sommes pas contre la rénovation de la foire, mais ce n’est pas le moment de le faire », assène-t-il. Qui plus est, « le gouvernement n’est pas en train de résoudre les multiples problèmes qui existent au sein de ce marché, mais il est en train de créer d’autres problèmes pour les marchands ».
Shenaz, une marchande, ne cache pas sa colère. « Ce n’est pas possible que, du jour au lendemain, une personne doit quitter son emplacement dans le bâtiment pour aller travailler dehors sous le soleil ou la pluie. C’est inacceptable », fulmine-t-elle. Du doigt, elle nous indique le plafond du bâtiment. Selon elle, cela fait plus de six mois qu’il n’y a plus d’éclairage électrique, vu que les autorités n’ont pas levé le petit doigt pour faire remplacer les ampoules. « On ne fait pas ce qu’il faut faire. On est en train d’injecter de l’argent pour rien. Kifer bizin kass ceki bon ? Kot bizin ranzer pa pe ranzer. Bizin geter kot ena problem», lance-t-elle.
Eshan Juman : « Ene décision bancal »
« C’est ene décision bancal que le gouvernement pe prend », martèle le député travailliste du no.3, Eshan Juman. Ce dernier a rencontré les marchands de la foire de Cité Martial, qui se trouve dans sa circonscription, jeudi. Suivant son intervention auprès des autorités, il a été décidé que les travaux de rénovation seront effectués uniquement les jours durant lesquels les marchands ne travaillent pas. Ce qui ne nécessitera pas leur délocalisation. « Pou fer bane travay la boute par boute », explique-t-il.
Il se désole que des travaux de rénovation de cette envergure soient entrepris alors qu’il y a d’autres problèmes plus pressants à s’y adresser. Cette réfection, insiste-t-il, n’est pas une nécessité, bien qu’il faille résoudre certains problèmes, comme des fuites d’eau par ci et là. « C’est un énorme gaspillage des fonds publics », regrette-t-il.
Victoria Urban Terminal : Rs 10 pour utiliser les toilettes
Au Victoria Urban Terminal, les marchands se plaignent toujours de la rareté des clients, alors qu’ils doivent payer Rs 4 000 pour la location de leur étal à la fin du mois. Ils avaient demandé aux autorités de leur accorder un moratoire sur le paiement de cette somme, pour qu’ils puissent engranger suffisamment d’argent. Mais valeur du jour, les marchands sont toujours dans le flou. Et ce, en dépit d’une lettre qu’a adressée officiellement le député travailliste Eshan Juman aux autorités, dont le lord-maire et les ministres Husnoo et Padayachy, pour réclamer un moratoire pour le paiement de ces loyers.
Les marchands du Victoria Urban Terminal déplorent le manque d’animation. Il est vrai que l’atmosphère y est plutôt triste. Dans leurs anciens emplacements, les marchands avaient l’habitude de donner de la voix pour attirer la clientèle, ce qui n’est pas permissible au Victoria Urban Terminal. Farzanah, une marchande, nous explique que « souvent des fois, nous rentrons à la maison sans avoir effectué ne serait-ce qu’une seule vente. Le loyer de Rs 4 000 est exorbitant. Nous ne travaillons pas assez pour pouvoir payer cet étal à ce prix-là. » Elle dit être « découragée » par la façon de faire du gouvernement. « Alors que le gouvernement devrait venir en aide aux marchands, il fait tout pour nous rendre la vie plus difficile ». Shabneez, une autre marchande, a déjà descendu les volets de son étal, et se prépare à rentrer chez elle alors qu’il n’était que 13h. Elle nous indique que depuis le matin, pas le moindre client n’était venu acheter ses articles.
Par-dessus le marché, un autre problème est venu corser les choses pour les marchands du Victoria Urban Terminal. Ils devront dorénavant payer Rs 10 pour l’utilisation des WC. « Si un marchand utilise les WC cinq fois par jour, il devra s’acquitter de Rs 50 par jour. Imaginez ce que cela fait pour un mois », se plaint Shabneez. « Alors que nous sommes en train de payer une mensualité de Rs 4 000 pour les étals, maintenant nous devrons payer Rs 10 pour chaque utilisation des WC. Il aurait été facile pour les autorités d’imposer cette mesure sur les membres du public seulement. C’est aberrant que les marchands doivent subir toutes sortes d’injustices et de tracasseries.»
Les marchands disent ne plus savoir quoi faire, ni vers qui se tourner.