Alors que la pénurie d’oignons continue à hanter les ménagères, une question taraude les esprits. Pourquoi ne pouvons-nous pas produire nos propres oignons localement dans un pays tropical comme le nôtre ? Qu’en est-il de la sécurité alimentaire dans le pays ? Ces interrogations persistent parmi de nombreux consommateurs, acteurs du secteur alimentaire et cultivateurs. Des porte-parole de petits planteurs ont déjà soulevé cette préoccupation par le passé, mais malheureusement, aucune mesure n’a été prise depuis. De nombreux petits planteurs sont même contraints d’abandonner leurs exploitations.
Nous avons rencontré des cultivateurs dans l’est du pays. Ces derniers déplorent le manque d’attention du gouvernement envers eux, et estiment qu’il les a laissés à l’abandon. Selon eux, Maurice doit mettre en place un vaste programme pour anticiper les problèmes alimentaires découlant des impacts du changement climatique.
Agriculteur depuis plus de 25 ans, Sadanand explique que la variété d’oignons appelée « toupie » ne trouve plus sa place. « Nous menons une lutte depuis une vingtaine d’années pour sauver cette variété d’oignons, cultivée à Maurice depuis au moins 150 ans », dit-il. Il souligne les problèmes auxquels les petits planteurs font face, notamment le manque de considération de la part du gouvernement. Bien que des alertes aient été lancées à plusieurs reprises concernant le secteur agricole, aucune action concrète n’a été entreprise pour remédier à la situation.
Plusieurs facteurs expliquent cette crise que traversent les petits planteurs. Le manque de certaines semences disponibles auprès de l’’Agricultural Marketing Board’, des problèmes d’irrigation exacerbés pendant la période sèche, le vieillissement de la main-d’œuvre, ainsi que la diminution progressive des terres agricoles au profit de projets immobiliers. Une augmentation significative des prix des intrants, tels que les fertilisants et les pesticides, contribue également à la situation.
Les causes
- Pas de fixation des prix pour la vente
Les planteurs regrettent qu’après la récolte des oignons, les prix de vente chutent malgré leurs efforts. « Ban prix la pe tomber nous pas envi planter paski pena profit », déclare l’un d’entre eux. Ils soulignent non seulement l’absence de prix fixe pour la vente, mais également les pertes financières en termes d’investissement. Les petits planteurs investissent considérablement dans leurs plantations, mais cela ne se traduit pas par des bénéfices. Face à cette situation persistante, l’enthousiasme pour cultiver la variété d’oignon « toupie » a considérablement diminué.
- Manque de main d’œuvre
La culture des oignons n’est plus aussi attrayante qu’auparavant. Les planteurs sont découragés en raison du manque de main-d’œuvre dans le secteur. Les jeunes ne montrent aucun intérêt pour ce domaine, préférant des emplois plus faciles pour gagner de l’argent rapidement. Personne ne semble s’intéresser à la culture de l’oignon « toupie ». Ce manque de main-d’œuvre n’a pas encore été résolu, et les petits planteurs sont affectés non seulement par le coût élevé de la main-d’œuvre, mais aussi par la rareté de travailleurs qualifiés.
- Manque du soutien du gouvernement
Les planteurs affirment mener une lutte pour préserver cette culture locale, mais regrettent le manque de soutien gouvernemental. Ils expliquent que cette situation n’est pas nouvelle et que l’industrie risque de disparaître si elle continue d’être négligée. Les rencontres régulières avec les planteurs pour discuter de leurs problèmes ont disparu, et les politiciens ne se manifestent qu’avant les élections. Les initiatives visant à redresser le secteur agricole sont devenues rares, donnant l’impression que le gouvernement n’est plus engagé dans ce domaine. Malgré les nombreuses doléances exprimées, aucune action concrète n’est entreprise.
- Hausse des prix des fertilisants
La hausse des prix des fertilisants est également un facteur qui pousse les planteurs à abandonner leurs exploitations. Bien que le gouvernement annonce des mesures d’aide lors des séances budgétaires, la mise en œuvre de ces mesures prend trop de temps. Autrefois, les planteurs achetaient des fertilisants à des prix permettant des récoltes rentables. Actuellement, les prix exorbitants ne correspondent plus aux rendements escomptés. Bien que les planteurs aient lancé un appel au gouvernement et au ministère de l’Agriculture pour trouver une solution, ils restent dans l’attente de mesures concrètes.
- Qualité des semences déplorée
Les planteurs déplorent également la mauvaise qualité des semences d’oignons « toupie ». Mantee, une autre planteuse, explique qu’elle en a acheté auprès de l’’Agricultural Marketing Board’ l’année dernière, mais n’a obtenu aucune récolte. Certains planteurs conservent leurs propres semences, mais cela ne suffit pas. Ils ont demandé à l’AMB d’assurer la qualité, mais en vain. « Ena ceki franchia la so qualité pas trop bon », déclare-t-elle.