Relogement des marchands ambulants du Ruisseau du Pouce

De grandes enseignes occupent un place de choix au Victoria Urban Terminal alors que les marchands ambulants devront, eux, composer avec des étals étroits

« Une décision inhumaine et injuste ! »

  • La municipalité de Port-Louis convoquée devant la juge-en-chambre

21 marchands ambulants opérant au Ruisseau du Pouce ne comptent pas se laisser faire, et contestent en Cour suprême la décision de la municipalité de Port-Louis de les reloger au Victoria Urban Terminal. Les marchands ont toutefois perdu une première manche le vendredi 1er avril 2022 après que la juge-en-chambre, Gaytree Jugessur-Manna, eut refusé d’émettre une injonction intérimaire contre la municipalité de Port-Louis.

La juge a toutefois ordonné que les représentants de la municipalité soient convoqués le 14 avril prochain ‘to show cause’ pourquoi une injonction interlocutoire ne doit pas être émise en attendant que le ‘main case’ logé par les marchands ambulants ne soit entendu en Cour suprême. Ce qui conduira alors à un jugement final de la Cour (sauf appel) dans ce litige.

Selon les marchands ambulants, c’est depuis 2009 qu’ils occupent chacun un étal au Ruisseau du Pouce, qui leur a été concédé par la municipalité de Port-Louis, selon les termes d’un contrat renouvelable chaque trois ans, et qui avait été paraphé la dernière fois en 2020. Les marchands s’acquittent d’un loyer mensuel de Rs 500. Les 21 marchands ambulants avaient reçu une lettre en date du 7 décembre 2021 émanant de la municipalité de Port-Louis à l’effet qu’ils seront relogés au Victoria Urban Terminal. Ces derniers avaient cru que cet exercice de relogement sera effectué après l’expiration de leur contrat de location au Ruisseau du Pouce.

Ce qui a mis le feu aux poudres : une déclaration du lord-maire de Port-Louis, Mahfooz Cadersaib, sur les ondes de Radio-Plus, où il avait affirmé que les marchands seront relogés au Victoria Urban Terminal. Le lord-maire devait récidiver dans un article de l’express, en date du 29 mars, à l’effet qu’ils « n’auront pas d’autre choix. Car nous allons devoir évacuer cette région. » Il devait renchérir sur les ondes de Top FM, en disant que « mo ena pu pull down sa pont la. Zot pena choix. Zot bisin aller ». Les marchands ambulants maintiennent que la municipalité de Port-Louis ne leur a fourni aucun préavis comme stipulé dans le contrat entre eux et la municipalité, ce qui fait que cette dernière commet une rupture de contrat et agit de façon arbitraire.

Les marchands sont tombés des nues en prenant connaissance du nouveau contrat, qui ne leur a pas été remis, mais dont une copie a été affixée à la municipalité de Port-Louis, « on a window pane », selon les dires des marchands dans leur plainte. Ces derniers devaient ainsi apprendre que leur nouveau loyer pour occuper un étal au Victoria Urban Terminal sera de Rs 4 000 mensuellement, contre le loyer de Rs 500 qu’ils payent actuellement au Ruisseau du Pouce. Ils ont aussi été surpris en voyant les dimensions des nouveaux étals sur un plan, qui sont bien plus petits que leurs étals au Ruisseau du Pouce. « Comment allons-nous faire pour caser notre attirail, comme les frigos, les étagères et les équipements de cuisine ? », se demande un marchand ambulant.

Les marchands ont insisté dans leur plainte que la municipalité ne doit pas se servir du rapport de l’enquête judiciaire sur les inondations meurtrières de 2013 comme prétexte pour démolir le pont du Ruisseau du Pouce, vu que d’autres infrastructures, qui ont été épinglées dans le rapport comme faisant obstruction à l’écoulement de l’eau comme les parkings d’Air Mauritius et de Rogers n’ont jamais été inquiétées par la municipalité. « Il est clair que la municipalité de Port-Louis fait preuve d’un favoritisme flagrant envers ces grosses compagnies », nous affirment-ils.

 « Durant cette décennie, où nous avons occupé notre emplacement au Ruisseau du Pouce, nous nous sommes constitués une fidèle clientèle, que nous allons perdre en étant délocalisés. Nous avons aussi beaucoup investi pour rendre attrayants nos étals, et plusieurs d’entre nous ont même contracté des emprunts pour cela », nous expliquent-ils.

« C’est là une décision inhumaine et injuste de la part de la municipalité de Port-Louis. Nous sommes dans une situation économique difficile. La pandémie de coid-19 a chamboulé toute notre existence. Maintenant, avec la décision de la municipalité de Port-Louis, avec Rs 4 000 à casquer mensuellement, comment voulez-vous sortir la tête hors de l’eau ? Il est clair que la municipalité de Port-Louis est en train de favoriser la Victoria Station Ltd (NdLr : la compagnie qui a été choisie pour gérer le Victoria Urban Terminal) à notre détriment », dit le marchand.

Les marchands ambulants demandent ainsi à la Cour suprême dans leur ‘main case’ d’émettre un ordre pour empêcher la municipalité de Port-Louis de les relocaliser au Victoria Urban Terminal.