Décès tragique du petit Matteo : Sa mère révèle ”Obeegadoo ine dire moi zot pe fer santaz pu gagne l’argent !”

Les squatters de Pointe-aux-Sables sont en deuil. Matteo Béguë, un nourrisson âgé de 7 mois, a rendu l’âme vendredi dernier vers 22 h à l’hôpital du Nord. Le bébé, avec un seul rein, avait été admis à l’ICU après que son état de santé fut jugé préoccupant. Il était aussi handicapé d’un pied et souffrait de plusieurs autres complications de santé.

Joella, la mère, âgée de 20 ans, est dévastée après le décès de son bébé, qu’elle adorait. Cette jeune femme nous explique qu’elle s’était installée sur un terrain à Pointe-aux-Sables, avec ses trois enfants et son mari. Elle explique qu’avec l’aide de son mari, ils ont pu construire une petite maison, mais Matteo était déjà souffrant à cette époque.

Leur calvaire commence quand le gouvernement a démoli leur maison pendant le confinement. La famille Béguë est restée sans un toit pendant quelques jours. Ils avaient pu trouver refuge dans un centre social. La famille faisait le va-et-vient à l’hôpital pour Matteo, qui a passé plusieurs jours à l’ICU. La dernière fois, c’était vendredi dernier, la nuit où il est décédé.

La jeune mère raconte qu’elle est sans emploi. Son mari, âgé de 22 ans, a été mis à la porte injustement par son patron. Le père du petit Matteo travaillait dans un atelier, et touchait Rs 350 la journée. Il devait aussi nettoyer le parc des bœufs de son patron pour un salaire de misère. Joella raconte qu’elle a joint le patron de son mari au téléphone. Elle voulait passer le message que Matteo avait été admis à l’ICU. Elle affirme que le patron était furieux et l’a informée que son mari a été mis à la porte.

Pendant le confinement, après la démolition de leur maison, les Béguë ont connu l’enfer car il n’y avait plus d’argent pour acheter de la nourriture, du lait et des couches pour les enfants surtout pour le petit Matteo.

Steven Obeegadoo lance à la mère : «  Zot pe fer santaz pu gagn l’argent ! » 

Joella nous explique qu’elle a fait les démarches nécessaires auprès du ministère de la Santé pour le traitement de son bébé car cela coûtait de l’argent pour le soigner mais les réponses étaient négatives. Elle était très découragée de pouvoir voir un sourire sur le visage de son bébé un jour. Elle a aussi contacté le ministère de la Sécurité sociale afin de bénéficier d’une pension d’invalidité, mais cela n’avait pas abouti. Elle affirme qu’elle a en sa possession tous les documents attestant de l’état de santé du bébé.

Le plus étonnant,  elle est aussi entrée en contact avec le ministre du Logement et des Terres, Steven Obeegadoo, qui lui aurait lancé : « Zenfant la pa malade. Zot pe fer santaz pu gagn l’argent ! » 

Elle nous a aussi partagé les moments pénibles que le petit Matteo avait dû subir après la démolition de leur maison. Elle dit que Matteo dormait dans sa tente de fortune à la rue Jean Blaise, et que c’est à cause du froid que sa santé s’est détérioré. « Nu dormi enba. Ena la poussière partout. Nu pena choix. Kot nu pu aller ? », déplore la jeune mère.

Elle affirme que si Matteo avait été placé dans une maison convenable, le pire aurait pu être évité. Après la démolition de leur maison, des policiers effectuaient des patrouilles sur les lieux où s’abritaient les squatters. En constatant que Matteo était dans un état critique un jour, elle a tenté de demander de l’aide à un policier mais ce dernier a répondu sur un ton arrogant, « Pran zenfant la, bour dans couvent ! » 

Un grand vide dans la famille

La jeune mère nous dit que le départ de Matteo laissera un grand vide dans sa famille.  « Li ti bien cocasse, li ti ena ene zoli sourire. So la sante ti paret korek mais ene sel kout, lin gagn ene attak, lin mort dans mo la main mem », pleure-t-elle à chaudes larmes.

Elle déplore la façon faire des autorités car elle n’a pas reçu un seul appel de sympathie auprès de la ministre de l’Egalité des genres, Kalpana Devi Koonjoo-Shah.

Anastasia, une habitante de Pointe-aux-Sables, est une amie de Joella. Elle explique qu’elle est toujours sous le choc car le petit Matteo était très proche d’elle. « Mo leker gro zordi  et mone trap Joella, mone plorer », dit-elle.

Jeudi dernier, la mère de Matteo lui a rendu visite pour lui annoncer que son bébé est dans l’ICU. Anastasia avait encouragé Joella de garder l’espoir mais elle ne s’attendait pas à ce que Matteo partirait aussi tôt. Tout le monde dans l’entourage aimait Matteo, nous confirme-t-elle.

Trois bébés vivotent parmi les squatters

Stephan Ross, le porte-parole des squatters à Pointe-aux-Sables, explique qu’après la démolition de la maison où vivaient Matteo et ses parents, ils ont séjourné pendant deux semaines dans une tente de fortune. Il dit que Matteo avait une santé très fragile et à son avis, le remue-ménage a contribué à son décès. « C’étaient des volontaires, des ONG qui se sont occupés de ce bébé, et à aucun moment, le gouvernement lui a porté une quelconque assistance, malgré que sa vie était en danger », dénonce-t-il.

Selon lui, il y a 15 familles de squatters  qui habitent toujours à Pointe-aux-Sables, dont 23 adultes. Il y a aussi 13 enfants, dont trois bébés. Il espère qu’il n’y aura pas d’inondations dans les jours à venir car il se demande qui portera secours à ces familles indigentes. De plus, il fait une demande à la députée de la circonscription, Dorine Chukowry, élue du gouvernement, de venir en aide aux squatters.

 

                                                                                                                                                            Asraf Aullymun