Détour kilométrique pour éviter Angus Road

Que tente encore de cacher le gouvernement à la population sur le dossier Angus Road ? Une question parlementaire qu’a adressée le député travailliste Patrick Assirvaden au Premier ministre, mardi, est restée sans réponse. Ce dernier voulait savoir où en était l’enquête initiée par la police et d’autres autorités sur l’acquisition de terrains par Pravind Jugnauth et son épouse à Angus Road, à Vacoas. Or, tout semble avoir été fait, peut-être même planifié, pour que cette interpellation ne soit pas répondue, évitant ainsi au Premier ministre un embarras de taille puisqu’il était directement concerné.

D’abord, il y a eu le « walk-out », inespéré, indécent et anti-démocratique, du Speaker durant la tranche de la ‘Private Notice Question’ (PNQ). Ce qui a fait perdre à la Chambre une bonne quinzaine de minutes avant que les travaux ne reprennent. Ensuite, suivant la réponse kilométrique, s’étalant sur une demi-heure, du Premier ministre sur la carte d’identité, il y a eu au moins trois questions supplémentaires de la part des députés de la majorité sur le même sujet. Cela alors que les députés Reza Uteem et Kushal Lobine, qui avaient posé la question initiale sur la carte d’identité, aient préféré renoncer à toute question supplémentaire et que le député Fabrice David a, lui, choisi de retirer une de ses questions à l’agenda du « Prime Minister’s Question Time » (PMQT) pour laisser suffisamment de temps à Pravind Jugnauth pour répondre à la question sur Angus Road et que tout le monde attendait avec impatience.

La manœuvre des députés du gouvernement, avec la complicité du Speaker, a ainsi permis à Pravind Jugnauth de se lancer dans des réponses lassantes et répétitives, malgré un « point of order » soulevé par Patrick Assirvaden. Au final, la question sur Angus Road n’a pu être répondue, laissant la population sur sa faim. On ne saura donc pas si cette enquête avance ou pas et si Loganaden Govinden, qui était à Maurice en octobre 2020 selon l’Express, a été interrogé par l’ICAC ou pas, d’autant que le Parlement est en congé jusqu’au 26 octobre. Ce qui laisse croire qu’il y a eu une action concertée par le gouvernement sur le dossier Angus Road, bafouant ainsi les principes démocratiques et la bonne gouvernance.

Précédente tentative de leurrer le Parlement

Ce n’est pas la première fois que Pravind Jugnauth a tenté de déjouer les questions de l’opposition sur cette affaire. On se souviendra comment il avait, selon le Dr Arvin Boolell, induit le Parlement en erreur lors d’une PNQ le 17 novembre 2020 en soutenant que « a first investigation started on 15 March 2011 and was discontinued on 09 May 2011 as no evidence for offences was disclosed under the Prevention of Corruption Act or the Financial Intelligence and Anti-Money Laundering Act. A second investigation was started on 20 October 2013 and was discontinued on 27 June 2014 ». Le leader de l’Opposition d’alors avait argué que l’ICAC n’a pas l’habilité de clore un dossier sans l’aval du Bureau du Directeur des Poursuites Publiques. Le DPP, Me Satyajit Boolell, à qui nous avions adressé une correspondance officielle datée du 19 novembre 2020, nous avait alors confirmé que « ICAC or its Director General has never, at any point in time, referred to our Office any file pertaining to any investigation into a purchase of immovable property at Angus Road, Vacoas ».

La seule explication plausible : Pravind Jugnauth a une peur bleue de l’affaire Angus Road. D’où ses tentatives répétées de l’esquiver. S’il n’avait rien à craindre et rien à se reprocher, pourquoi maintenir toute cette opacité ?