Élections ‘mardayes’ confirmées

La seule et plus grande confirmation que nous avons obtenue à l’issue du ‘recount’ pour la circonscription no. 19, c’est qu’il y a réellement eu des « mardayes » durant les dernières élections. Après le jugement de la Cour suprême faisant état des « glaring discrepancies », les graves irrégularités notées mardi ne laissent plus aucun doute quant à l’ampleur de ce tripotage du processus démocratique que sont les scrutins. Quand les élections sont truquées, c’est toute la démocratie qui est atteinte. Face à la mise à nu de ces flagrantes irrégularités, c’est avec un effarement sans parallèle que nous réalisons qu’il y a carrément eu, depuis novembre 2019, un hold-up démocratique. Parce que le vœu de l’électorat n’a pas nécessairement été respecté. Parce que la confiance de la population dans notre système électoral a été ébranlée.

En attestent les erreurs décelées dans les ‘recapitulation sheets’ utilisées pour la proclamation des résultats. En attestent également les bulletins errants dans la nature après les élections, tout comme les 73 bulletins manquants à l’appel lors du ‘recount’ ordonné par la Cour suprême, le bulletin intrus du no. 1 dans les urnes du no. 19 ou encore les bulletins sans sceaux officiels de la commission électorale. Trop de coïncidences pour qu’on les mette sur le dos de l’erreur humaine. N’en déplaise au Commissaire électoral qui tenait étonnamment un langage similaire au ministre Kailesh Jagutpal, surtout en parlant des fonctionnaires. Serait-ce l’œuvre des papiers rangés devant lui et dans lesquels il se perdait souvent ? Son discours aurait-il été dicté alors qu’il est censé être indépendant ?

À Irfan Raman de choisir s’il veut terminer sa carrière en disgrâce ou pas. Sa position concernant la pétition électorale au no. 15 trahit d’ailleurs la voie qu’il a choisie, aussi irrationnelle qu’elle soit pour un homme de son calibre. Mais la population, elle, l’a déjà jugé et condamné, tout en l’affublant du sobriquet « Irfan chatwa ».  C’est dire à quel point ce dernier a perdu toute crédibilité, ayant osé franchir l’interdit pour donner un parfum politique au poste qu’il occupe, mais aussi pour avoir failli à préserver la sacro-sainteté des urnes dont il avait la responsabilité au même titre que l’ESC et la police. Nous ne pouvons, dans de telles circonstances, que nous rejoindre à ceux qui donnent de la voix pour réclamer la démission du Commissaire électoral. ‘The guy must go’.

Mais ce qui nous apparait encore plus insensé, c’est la validité de ce recomptage alors que l’exercice était faussé dès le départ et dont l’issue ne pouvait logiquement être juste et fiable. Il est clair pour nous que ce ‘recount’, effectué dans les conditions que l’on sait et censé pourtant dissiper tout doute, n’a fait que pervertir un processus démocratique. Y a-t-il eu une complicité pour que les pétitions électorales n’aboutissent pas, ou presque ? Cette question, nous ne pouvons nous empêcher de la poser au vu des événements. D’ailleurs, on doute fort qu’Ivan Collendavelloo aurait accepté l’issue de ce ‘recount’ s’il n’avait pas finalement été en sa faveur. Les guignols qui parlent de « double victoire » du gouvernement feraient mieux de nous expliquer comment, sous le règne de ce régime, tous les processus démocratiques sont systématiquement tronqués, mutilés, assassinés.

Le Premier ministre lui, semble, comme d’habitude, coupé de la réalité. Après avoir incroyablement trouvé que le cyclone Batsirai n’avait pas causé de gros dégâts alors que des milliers de foyers ont été privés d’eau et d’électricité pendant presque deux jours et qu’un homme ait perdu la vie dans des circonstances tragiques, Pravind Jugnauth a remis ça en disant que l’Opposition n’avait pas de preuves que les élections étaient truquées tandis que des « mardayes » venaient d’être mis à jour, provoquant le courroux de son partenaire d’alliance, Ivan Collendavelloo. Mais nous concédons volontiers que Pravind Jugnauth est « constant », comme il s’est lui-même qualifié hier, dans son approche. Oui, il est constant dans ses démagogies, sa politique « noubanisme », sa mauvaise gouvernance… Bref, il est constant dans ses démarches de garder notre pays dans un hold-up démocratique perpétuel.