La chronique de …
Les relations PRESSE/POUVOIR ont toujours été conflictuelles. Et c’est tant mieux ! Parce qu’au moins on peut se dire nos quatre vérités en face, sans se cacher derrière de fausses conciliabules du genre “I scrach your back and you’ll scrach mine…”
De mémoire de journaliste issu de l’après-indépendance, il y a eu deux événements qui m’ont marqué : d’abord la censure de la presse pendant l’Etat d’urgence de 1971 et la présentation avortée, en 1984, du Newspapers and Periodicals Bill.
Le premier consistait à imposer une censure policière sur les journaux soutenue par un boycott publicitaire avec l’aide des agences de publicité que constituaient le grand capital. L’objectif principal, c’était de fermer le robinet financier qui servait à financer les journaux jugés hostiles au gouvernement en place. Je l’ai déjà écrit et je le redis, aujourd’hui, de toutes ces firmes publicitaires acquises à la cause du gouvernement, une seule firme offrait de la publicité aux journaux, c’était la firme Kalachand…
Quand la censure fut levée en 1976, et après les élections qui s’ensuivirent, le pays a connu les premières 60-0 de son histoire à la faveur d’une coalition MMM-PSM. Un nouveau souffle semblait redonner au pays l’élan qu’il fallait pour élargir l’espace démocratique de cette île Maurice aux aspirations nouvelles. Mais, c’était sans compter de ces forces, que je ne voudrais pas qualifier d’occultes, qui oeuvront dans l’ombre pour faire tomber cette coalition MMM/PSM. On connaît la suite : le PSM de Harish Boodhoo s’effacera devant un MSM naissant, mais revanchard. Une cilble est toute trouvée, la presse !
Comme toujours, ce corps de métier était devenu le nouveau souffre-douleur du gouvernement. Alors, il faut le mettre au pas, le broyer, ne lui laisser aucun moyen de subsister. Ainsi, le pouvoir vint avec son Newspapers and Periodicals Bill, qui avait pour objectif d’imposer une caution financière imposée à chaque journal pour pouvoir paraître. Ainsi, les “petits” auraient disparu…
Forts d’un élan de solidarité, le jour où le Bill devait être débattu au Parlement, la presse se manifesta devant le Parlement pour un moment inoubliable de son histoire. Il y avaient, là, une quarantaine de journalistes, mais aussi quelques patrons de presse, aujourd’hui disparus, dont le Dr. Philippe Forget de l’express, Bickramsingh Ramlallah du Mauritius Times, sir Kher Jagathsingh, mais aussi notre ami Jean-Claude de l’Estrac, alors député de l’Opposition.
Quand nous fûmes “ramassés” par les gros bras de la force policière et conduits aux Casernes centrales, le doyen de la presse, Bickramsing Ramlallah,se fit dire par un policier :”Chacha, nou pa pou kapav met ou dan camion…” Et le courageux Bickram nou rejoignit aux Casernes, à pieds…
Entretemps, l’évêque de Port-Louis et le futur Cardinal ,Jean Margéot, nous rejoignit, pour offrir l’aide financière du Diocèse aux journalistes qui ne pouvaient pas payer leur caution… On connaît la suite : _Une campagne fut organisée dans l’ensemble du pays et elle avait atteint un tel momentum que le procès contre les journalistes fut rayé…
Et le Media Trust devint une réalité ! Ce Trust, émanant du Parlement, avait pour principal objectif de venir en aide pour la formation des journalistes. J’en fus le premier président après un vote concensuel de mes pairs et il incombait au premier ministre, sir Anerood Jugnauth, d’en informer ses pairs au Cabinet. Quand je suis parti, Jean-Claude de l’Estrac a pris la présidence du Media Trust et Finlay Salesse s’est par la suite installé au River Court.
Aujourd’hui, qu’entend-t-on ? Un ancien fonctionnaire du Government Information Services va présider aux destinées du Media Trust ? Mais alors, c’est inconvenant et scandaleux. Et que font les journalistes professionnels ? Vont-ils se laisser entubés par l’Etat ? Quelles sont les compétences et les références de ce monsieur ? Réveillez-vous, Bickramsingh, Henri Souchon, Philippe Forget, Kher Gagathsingh…
S. Gérard CATEAUX
Media Consultant