Sheila Bappoo : « La situation reste alarmante »

Depuis le début de l’année, plusieurs cas de négligence et de maltraitance dans les crèches ont été signalés. A titre d’exemples, le 8 mars 2023, Winsley Appou, un nourrisson de trois mois, est décédé d’asphyxie après avoir ingéré le contenu de son estomac dans une crèche située à Triolet. Une autre tragédie a touché la petite fille Grace Cadapen, âgée de trois mois, dans une crèche opérant illégalement à Rose Hill, où elle est également décédée d’asphyxie due à l’ingestion du contenu de son estomac. Plus récemment, un autre cas de maltraitance a été signalé dans une crèche à Beau Champs, où un bébé a été blessé au visage et présentait des ecchymoses sur le corps. Un incident supplémentaire s’est produit la semaine dernière, lorsque qu’un ventilateur est tombé sur un bébé dans une crèche.

Malgré les tollés soulevés par les membres de l’opposition, la situation des enfants dans les crèches demeure préoccupante. Il est important de noter que des mesures ont été mises en place pour assurer la sécurité des enfants dans les crèches, mais des incidents récents ont mis en lumière des problèmes persistants.

Le rapport du ‘Public Accounts Committee‘, publié le 10 mars 2022, avait déjà souligné la gravité de la situation. Il a mis en lumière que certains agents ne respectaient pas la législation et les règlements applicables aux établissements de soins résidentiels ainsi qu’aux garderies pour enfants, qui fonctionnaient sans les autorisations requises. En outre, des demandes d’ordonnances d’incarcération ont été présentées devant les tribunaux, conduisant ainsi à la mise en refuge d’enfants maltraités dans des établissements non sécurisés, en violation manifeste de la loi.

Dans le rapport, il est également notifié que le ministère avait été informé depuis août 2021 que parmi les 371 garderies pour enfants, 210 d’entre elles ne détenaient pas de certificat d’enregistrement en raison du non-respect des conditions énoncées dans le règlement. Il y est aussi mentionné que le ministère devrait faire respecter strictement le règlement concernant les garderies ne se conformant pas aux normes. S’il estime nécessaire de revoir les conditions d’enregistrement, des modifications appropriées devraient être apportées immédiatement au règlement. Les garderies en infraction devraient être rapidement informées des sanctions applicables en cas d’exploitation sans un certificat d’enregistrement valide.

De plus, selon le rapport, il est impératif de dispenser une formation adéquate aux agents pour qu’ils comprennent l’importance de se conformer à la loi, et ne pas l’appliquer pour des raisons de commodité administrative. Dans le cas contraire, ces agents devraient assumer l’entière responsabilité de leur inaction et, si nécessaire, leur dossier devrait être soumis à la Commission de la fonction publique pour l’application de sanctions disciplinaires appropriées.

Sheila Bapoo : « La réintroduction du ‘Child Watch Network’ pourrait être un élément crucial »

Pour l’ancienne ministre de l’Égalité des genres, Sheila Bappoo, la situation est préoccupante. Elle souligne que le PAC a soulevé de nombreuses questions concernant les cas de maltraitance et de négligence envers les bébés. Depuis la publication de son rapport, aucune mesure n’a été prise. Ce n’est que lorsque la mort d’un bébé est survenue dans une crèche à Rose Hill, que les membres du gouvernement, y compris le ministère de l’Égalité des genres, ont réagi à cette situation. C’est à ce moment qu’ils ont entrepris des actions pour identifier les crèches illégales et sanctionner celles qui n’avaient pas les autorisations nécessaires pour fonctionner.

Selon elle, la situation s’est aggravée en raison de l’inaction prolongée du ministère. « Il aurait dû y avoir une équipe, ce que l’on pourrait appeler un ‘squad’, pour mener des opérations sur le terrain, en collaboration avec d’autres fonctionnaires. Cette équipe aurait dû être composée de policiers, de fonctionnaires municipaux ou de membres des conseils de district, ainsi que de partenaires, afin d’étudier en profondeur la situation et d’inspecter toutes les crèches opérant illégalement dans les villages et les villes. Or, rien n’a été fait pour mettre en place une telle équipe. Comment le ministère peut mener à bien ces démarches s’il n’y a pas une équipe spécialisée pour cela ? », s’étonne-t-elle.  Elle s’interroge sur qui sera chargé de cette tâche, et combien de personnel sera sur le terrain pour la mener à bien. Toutes ces questions restent sans réponse.

Elle insiste également sur l’importance de la formation des personnes s’occupant des enfants, les ‘caregivers’, qu’elle estime inadéquate actuellement. Sheila Bappoo ajoute qu’il est impératif de leur fournir une formation de qualité, afin qu’ils puissent prendre soin des bébés de manière appropriée et éviter toute forme de négligence. Selon elle, il s’agit d’un problème sociétal qui met en danger la vie des tout-petits. Elle souligne que le contexte des crèches est bien plus délicat et sensible que celui des garderies, car les enfants en garderie peuvent parler et signaler tout problème, tandis que les bébés ne peuvent pas s’exprimer.

De plus, elle évoque l’importance de la réintroduction du ‘Child Watch Network’, qu’elle considère comme un élément crucial dans la lutte pour la sécurité des enfants. Pendant son mandat au gouvernement, elle affirme avoir mis en place ce système, dans le but d’étudier la situation dans les différents endroits où ces crèches opèrent.