Amendements proposés à l’ICTA : Un grave danger pour la démocratie et la sécurité des internautes mauriciens

Nous publions ci-dessous un condensé des commentaires de l’ONG mondiale bien connue, ‘Centre for Law and Democracy’ (CLD), qui tire la sonnette d’alarme sur les amendements proposés à l’Information and Communication Technologies Act.

Pour rappel, ces amendements viseraient les messages avec un contenu « harmful and illegal ». Il y aurait ainsi une interception et archivage de tout le trafic sur les réseaux sociaux par l’ICT Authority.

Selon le gouvernement, Maurice serait impuissant à faire respecter un ordre légal par les compagnies des réseaux sociaux, vu que ces compagnies n’ont pas une présence physique à Maurice. Une affirmation qui est suspecte, selon le CLD.

Les ‘misleading justifications’ du gouvernement

Le ‘Consultation Paper’ fait état que la censure des réseaux sociaux se limitait aux violations de leur politique d’utilisation, sans tenir compte des lois nationales d’un pays. Or, le CLD dit sans ambages que « This is false. » Le CLD fournit ainsi plusieurs exemples où les réseaux sociaux ont supprimé des vidéos qui étaient conformes à leur politique d’utilisation mais qui contrevenait aux lois nationales d’un pays.

Selon le CLD, les réseaux sociaux emploient plusieurs ressources pour tâcler les problèmes comme l’incitation à la haine raciale, la pornographie infantile et le terrorisme.

Violations graves au droit à la vie privée et à la liberté d’expression

Le gouvernement propose que chaque internaute mauricien qui voudrait utiliser les réseaux sociaux installe un logiciel qui, selon le CLD « would effectively empower the ICTA to impersonate each Mauritian social media user», et qui lui permettra de décrypter les messages privés. Or, c’est là une atteinte intolérable à la vie privée, selon le CLD.

Le CLD revient sur la section 46 de l’ICTA, qui criminalise l’envoi de messages de nature « obscene, indecent, abusive, threatening, false or misleading » et qui pourraient causer « annoyance, humiliation, inconvenience, distress or anxiety. » Pour le CLD, cette section va à l’encontre de l’International Covenant on Civil and Political Rights (ICCPR) sur la liberté d’expression, dont Maurice est un signataire, car les termes utilisés sont trop élargis.

L’archivage de tout le trafic des réseaux sociaux pose aussi problème. Ces informations bénéficieront-elles vraiment de la protection fournie par la ‘Data Protection Act’ ?

Le CLD devait aussi mettre à l’index les peines qui sont actuellement applicables sous l’ICTA, notamment l’amende de Rs 1 M et la peine de dix ans de prison, qui parraissent disproportionnées.

Le CLD note que l’lCT Authority n’est nullement indépendante

Le CLD tire la sonnette d’alarme car les gouvernants pourraient identifier et persécuter leurs opposants politiques, ou encore ils pourraient bloquer toute page qui ne leur plairait pas.

Le CLD dit noter que l’ICT Authority n’est pas indépendante, vu que ses membres sont pour la plupart des représentants des ministères. En outre, le ministre de tutelle de l’ICT Authority peut émettre des directives, que l’ICT Authority est tenu de suivre.

Les retombées négatives de ces amendements

Le CLD avertit que les géants des réseaux sociaux tels que Facebook peuvent refuser entièrement leurs prestations à Maurice pour ne pas être associés avec des violations massives de la démocratie.

En outre, l’entièreté du système proposée par ces amendements sera vraisemblablement contournée par les utilisateurs dangereux et sophistiqués, qui utiliseraient des outils comme les ‘Virtual Private Network’ (VPN).

Qui plus est, les problèmes majeurs que ces amendements essaient de tâcler, dont le hacking ou le vol d’identité, ne seraient nullement affectés par ces mesures.

Plusieurs alternatives existent

Selon le CLD, il y a plusieurs alternatives que le gouvernement mauricien peut considérer, qui seraient plus logiques et plus compatibles avec les droits humains.

Par exemple, le gouvernement mauricien devrait travailler en étroite collaboration avec les réseaux sociaux. Qui plus est, le gouvernement devrait, dans un souci de transparence, rendre publique toute discussion qu’il a pu avoir avec les compagnies des réseaux sociaux, avant de venir affirmer que ces entités ne vont pas collaborer avec lui.

Ensuite, le gouvernement devrait envisager de mettre sur pied un programme de ‘media and information literacy’ pour que la population soit plus éclairée quant aux contenus problématiques, comme préconisé par l’Unesco.

Le CLD recommande ainsi au gouvernement d’abandonner entièrement les amendements proposés.

Hors-texte

L’Internet en entier moins sécurisé pour tous les Mauriciens

Deux géants des réseaux sociaux, notamment Google et Mozilla, ont réagi au ‘Consultation Paper’ du gouvernement mauricien.

Dans un document conjoint, ils font ressortir que « The proposed approach would however, have severe and disproportionate implications for privacy and security for Mauritian citizens, as well as others abroad, while doing little to address the stated concerns. »

Premièrement, ces amendements porteraient atteinte à la sécurité des sites web, notamment ceux qui sont impliqués dans des transactions financières.

Par ricochet, tout l’Internet sera moins sécurisé pour tous les Mauriciens, où ils seront plus exposés aux dangers comme les fraudes ou les vols d’identité. En outre, le système proposé ne marcherait pas sur des applis mobiles.

Les deux géants concluent : « We urge the Authority not to pursue this approach. »