Rama Valayden et les Avengers ne comptent pas baisser les bras dans l’affaire Angus Road après le décès inopiné de Loganaden Govinden ce 3 novembre 2021 au Royaume-Uni. En effet, Rama Valayden et son équipe viennent d’envoyer un dossier contenant plusieurs informations, pour le moment confidentielles, au ‘Home Office’ britannique (ministère de l’Intérieur), qui a juridiction sur toutes les forces de police du Royaume-Uni. Il n’est pas à écarter que cela débouche éventuellement sur l’équivalent d’une enquête judiciaire à Londres, ou encore devant le Coroner’s Court, qui est une cour de justice spécialisée pour enquêter sur les morts suspectes.
Rama Valayden nous explique que contrairement à ce que beaucoup croient et disent ces derniers jours, la mort de Loganaden Govinden n’a pas mis fin au scandale Angus Road. Selon lui, les ‘documentary evidence’ suffisent amplement dans cette affaire pour démontrer qu’il y a eu maldonnes, notamment les transactions bancaires effectuées par Loganaden Govinden à Londres pour l’acquisition des terrains à Angus Road. Selon Rama Valayden, avec la disparition de ce dernier, il y a bien un « missing link » dans l’enquête sur l’affaire Angus Road, mais les preuves existantes en Angleterre permettraient de combler les lacunes.
Dans un premier temps, durant la semaine écoulée, l’homme de loi a pris contact avec Graeme Biggar, le directeur de la National Crime Agency (NCA) au Royaume-Uni. Dans une lettre en date du 4 novembre 2021, il demande à ce dernier d’initier une enquête approfondie sur la mort de Loganaden Govinden, car il pense qu’il pourrait y avoir un lien entre cette mort et les multiples « political killings » qui ont eu lieu à Maurice, dont celui de Soopramanien Kistnen. « Il y aura toujours une suspicion entourant ce décès. Alors, il est important d’établir dans quelles circonstances est mort Loganaden Govinden. Si c’est une mort naturelle, tant mieux. Mais pour l’heure, je n’écarte aucune possibilité », nous dit-il.
Il devait aussi dénoncer l’Attorney-General, Maneesh Gobin. Selon lui, il n’a pas encore approuvé la demande de l’ICAC qui voulait des compléments d’enquête des autorités britanniques dans l’affaire Angus Road. En effet sous la ‘Mutual Assistance in Criminal and Related Matters Act’, l’Attorney-General est tenu d’approuver une telle demande émanant d’une quelconque autorité mauricienne. Selon lui, Maneesh Gobin dort sur cette demande depuis un bout de temps déjà. Rama Valayden devait rappeler qu’il avait agi promptement comme Attorney-General dans toute demande d’assistance mutuelle, par exemple dans les affaires impliquant Tereen Appasamy, Siddick Chady ou encore l’ex-président sud-africain Jacob Zuma.
Loganaden Govinden, un cinéaste au passé trouble
Loganaden Govinden, aussi connu comme Alan Govinden, est décrit comme « cinéaste ». Il est né à Maurice en 1955 et avait 66 ans au moment de son décès au Royaume-Uni.
C’est la famille de Loganaden Govindenqui a annoncé sa mort sur les réseaux sociaux, après « un short period of illness ». Apparemment, il avait contracté la covid-19 trois semaines de cela et avait été admis dans un hôpital.
Cet homme s’était établi en Angleterre depuis plus d’une quarantaine d’années, et il avait fondé deux studios cinématographiques, notamment AMG Films Ltd et AMG (International) Films Ltd. Il avait été impliqué dans un premier temps dans la première enquête que l’ICAC avait initiée sur Angus Road en 2011, ensemble avec Pravind Jugnauth.
Malgré la fermeture de nos frontières, il avait pu entrer à Maurice en août 2020. Il était accompagné de ses « acteurs et actrices » pour le tournage du film ‘Prisoners of Paradise’. L’Economic Development Board (EDB) lui avait octroyé un certificat sous le ‘Film Rebate Scheme’ où il a été remboursé par le gouvernement mauricien à hauteur de 40 % en ce qui concerne les dépenses du tournage. Il avait par la suite obtenu un prêt de Rs 90 millions de la State Bank of Mauritius (SBM) pour le tournage du film.
Par ailleurs, des interrogations s’élèvent sur l’entrée à Maurice de Govinden alors que nos frontières étaient fermées en 2020, ou s’il a été inquiété par l’ICAC.
Le rôle de Loganaden Govinden dans l’affaire Angus Road
En 2001, Loganaden Govinden à versé Rs 20 millions sur le compte de Patrick Rountree, un actionnaire de Bel Air Sugar Estate (BASE), basé à Londres, somme destinée à réserver les deux terrains d’Angus Road. Sans qu’aucun titre de propriété ne fût émis en son nom. Sept ans plus tard, en 2008, le titre de propriété est émis aux noms de Pravind et Kobita Jugnauth pour être par la suite transféré aux noms de leurs filles.
Selon une déposition d’Anil Nemchand, un ancien cadre de BASE, à l’ICAC, en date du 21 avril 2014, Loganaden Govinden n’avait pas réclamé de bordereau (document attestant qu’un acquéreur potentiel d’un terrain a versé une somme pour faire réserver un terrain) à BASE. Selon Roshi Bhadain, leader du Reform Party, la direction de BASE ne connaissait même pas l’existence de Loganaden Govinden.
Le scandale Angus Road éclate en juillet 2020, quand Roshi Bhadain, leader du Reform Party, devait annoncer que ni Pravind Jugnauth ni sa femme ont payé BASE, pour les terrains d’Angus Road alléguant qu’il s’agissait la d’un « cadeau » de Govinden.
Selon Pravind Jugnauth, en 2008, Loganaden Govinden n’était plus intéressé à acquérir ces terrains. Il les lui avait alors rachetés en s’engageant à lui rembourser par tranches, ce qu’il a fait, selon lui, de 2008 à 2013.
Toutefois, selon Roshi Bhadain, c’est en 2004 que Pravind Jugnauth a acquis ces terrains, alors qu’il était vice-Premier ministre et ministre des Finances. La vente de ces deux terrains a été conclue pour la somme Rs 20 M, mais un document notarié précise que cette vente a été effectuée « hors de la vue et sans le concours du présent notaire. »
La question que tout le monde se pose : saura-t-on un jour pourquoi Loganaden Govinden a-t-il payé de sa poche Rs 20 millions pour faire réserver des terrains à Angus Road pour Pravind Jugnauth et sa famille ? Affaire à suivre.
