Dr Farhad Aumeer, député du PTr : « Mon colistier et moi ensemble, nous sommes imbattables »

Des « divergences », il n’y en a pas entre lui et son colistier. C’est le Dr Farhad Aumeer, député du PTr au no. 2 qui le dit. Malgré les « petits manquements de communication » qu’il concède qu’il y a entre eux, il se dit confiant de pouvoir éventuellement trouver un terrain d’entente. D’autant que, dit-il, « si ou ajoute mo la force et so la force, li formidable ». Voilà un entretien qui risque de freiner les ardeurs de certains…

Zahirah RADHA

  • « Ce n’est pas une obsession pour moi de devenir ministre, PPS ou autre. Je fais de la politique parce que je sais que, sous le leadership de Navin Ramgoolam et du PTr, le peuple connaitra des jours meilleurs »

Q : Vous êtes dans l’actualité pour plusieurs raisons. Il parait qu’il y a toujours des divergences entre vous et votre colistier au no. 2. Quelle est l’origine de ces divergences ?

Merci pour cette question. C’est très important de souligner que ce ne sont pas des divergences. J’ai de différentes opinions sur certains sujets sur lesquels je m’exprime. J’ai été élu dans la circonscription no. 2 pour aider ceux qui m’ont élu aussi bien que ceux qui n’ont pas voté pour moi. Je fais mon devoir. Deux facteurs seront déterminants aux prochaines élections. D’abord, la performance du député et deuxièmement, la décision du leader du parti.

Jusqu’ici, à aucun moment n’ai-je eu de confrontation directe avec n’importe quel élu de la circonscription. Si vous regardez les réseaux sociaux, vous verrez qu’au no. 2, il y a beaucoup d’aspirants candidats, politiciens et députés. Je pense que, des fois, les différences d’opinion que j’ai par rapport à la façon de faire de la politique auraient pu donner lieu à certaines appréhensions, que ce soit à mon colistier du PTr, mais aussi à d’autres députés de la circonscription.

J’ai toujours prôné un esprit de dialogue et j’ai toujours dit que nous, au PTr, nous ne devons pas voir l’arbre, mais plutôt la forêt. La forêt, c’est que nous devons remporter les prochaines élections et mettre dehors ce gouvernement. Pour le faire, nous devons pouvoir travailler en unité et en synchronisation. Cela s’applique à moi aussi bien qu’à n’importe quel autre député du parti dans la circonscription ainsi qu’à d’autres nouveaux candidats. Si nous avons des différends, nous devons les assainir pour que nous puissions avoir les résultats escomptés, c’est-à-dire la conquête de l’électorat et du gouvernement.

Q : Avez-vous eu une discussion franche avec votre colistier pour tenter de résoudre ces différences d’opinion que vous dites avoir ?

Je pense que c’est là où nous avons peut-être certains différends. Moi, je suis quelqu’un qui parle, qui m’exprime et je dis ce que j’ai à dire. Mon colistier a une différente façon de faire et une différente personnalité. Mais je peux vous dire que jusqu’à maintenant, nous nous entretenons comme des ‘gentlemen’ quand nous nous rencontrons et nous n’avons jamais eu de problèmes quand nous assisté à des fonctions ensemble. Je sais que vous m’allez m’interroger sur l’incident survenu durant la marche contre la drogue à Vallée-Pitôt, dimanche dernier…

Q : Exactement ! Parlez-nous-en…

C’est très simple. Je subis toutes sortes de coups bas, de racontwar zistwar et on véhicule des informations, vraies ou fausses, sur moi. Arrivé un moment, je devais m’exprimer. C’est ce que j’ai fait. Mais à aucun moment n’ai-je cité le nom de qui que ce soit. Je me suis exprimé politiquement. En bref, seki mo fine dire c’est aret créé des zistwar sur moi. Il n’y avait pas que mon colistier qui y était présent. Le député du MMM était également sur place. L’ex-conseiller travailliste viré au MSM était aussi là. Ti ena 5-6 MSM parmi. Ma remarque n’est pas visée envers quelqu’un de spécifique. C’était une déclaration politique pour dire haut et fort que je ne laisserai personne marcher sur mes pieds.

Q : Ce n’était donc pas visé contre Osman Mahomed ?

Ce n’était pas visé contre quelqu’un en particulier. C’était un message politique suite à une remarque anodine qui m’a été lancée. J’ai parlé sur ce ton parce que j’étais agacé et j’ai voulu dire à tout bon entendeur, salut. On ne peut pas prétendre que je l’ai dit uniquement pour Osman Mahomed. Non, loin de là ! C’était adressé à tout le monde.

Q : Vous n’avez ainsi aucun problème pour travailler ensemble avec lui à l’avenir ?

Je le confirme et je l’ai dit à plusieurs reprises, que ce soit à mon leader, au secrétaire-général et à d’autres, surtout lorsque nous parlons des bisbilles en politique. Je m’étonne que L’Express et Le Défi ne publient que celle-là. Où sont les bisbilles entre Tania Diolle et Kavy Ramano ou celles entre Teeluck et le Dr Ramdhany ? Pas azordi kine commence ena biz biz dan politique

Q : Cette affaire a été ‘blown out of proportion’, selon vous ?

Totalement ! Nous sommes deux différentes personnes. Nous aurons des différences d’opinion. Moi, je peux travailler avec n’importe qui.

Q : Même si vous êtes catapulté dans une autre circonscription ?

J’ai dit à Navin Ramgoolam que je peux travailler avec n’importe qui, dans n’importe quelle conjoncture, sous son leadership. Il n’y a personne d’autre que le leader qui décide du choix d’un candidat pour une circonscription. Il faut qu’on le respecte.

Q : Avez-vous personnellement reçu des propositions ou des sollicitations pour joindre le MSM ?

Je ne suis pas à vendre et je ne peux pas être acheté. C’est très clair. Je suis redevable envers le PTr et le leader Navin Ramgoolam, de par ma sincérité et l’amitié que j’ai pour ce dernier, parce que c’est le parti et lui qui m’ont permis d’être candidat et député. Quand je m’étais présenté comme candidat, je n’avais qu’un seul but:pas celui d’être ministre, PPS, ‘Deputy Speaker’, ‘Chief Whip’ ou ‘chairman of committee’. Mon but, c’est d’apporter ma pierre à l’édifice pour que Navin Ramgoolam puisse redevenir Premier ministre. Si ce scénario n’existe plus demain, je verrai alors si je devrais de nouveau me porter candidat ou pas.

Q : Votre combat politique ne se résume qu’à cela ? N’avez-vous pas le désir de servir le pays ?

Je sers le peuple très bien en tant que député. Je les aide selon mes capacités. C’est malheureux que parfois je suis ‘targeted’, en faisant croire que je suis ‘into money politics’. Mais, en tant que député de l’opposition, que puis-je faire pour un mandant hormis d’effectuer quelques appels pour soulager ses problèmes ou l’aider à travers d’autres moyens, d’autant que la circonscription no. 2 compte beaucoup de familles qui se retrouvent dans des situations difficiles ? Je dois leur venir en aide.

Ce que je veux dire, pour répondre à votre question, que ce n’est pas une obsession pour moi de devenir ministre, PPS ou autre. Je fais de la politique parce que je sais que, sous le leadership de Navin Ramgoolam et du PTr, le peuple connaitra des jours meilleurs. Si demain je suis élu, et si le leader me demande d’accepter un poste sous un gouvernement travailliste, j’aurai un choix à faire. Soit je l’accepterai, soit je le refuserai. Mais ce ne sera pas une obsession. Je ne mettrai pas un couteau sous la gorge de Navin Ramgoolam pour lui dire ‘si to pas donne moi sa, mo pas pou pose candidat, mo pas pou reste dans to parti’.

Q : Pourriez-vous dire non à Navin Ramgoolam ?

Oui. Je peux le lui dire et il le sait aussi. Il me connait extrêmement bien. Il sait que je suis très direct, très discipliné, très droit. Si je ne suis pas habilité à faire quelque chose, je le lui dirai. J’étais vraiment ému quand j’ai assisté à la fête de fin d’année de la circonscription no. 3 mercredi. J’étais ému quand j’ai vu la synergie et la synchronisation qu’il y a entre les députés et leurs conseillers. Je souhaite du fond de mon cœur que nous puissions faire pareil. Je garde toujours espoir. Le jour où nous aurons une meilleure synchronisation et cohabitation – que je sais arrivera un jour -, ce sera la fin des autres partis au no. 2. Mo koné ki mo pe kozé. Mon colistier et moi ensemble, nous sommes imbattables. Après trois ans de politique sur le terrain, je sais de quoi je parle. Je suis d’ailleurs le premier à le dire : mon colistier travaille très bien sur le terrain. Je n’ai aucun problème dessus.

Q : Vous êtes donc conscient qu’il vous faut régler ce manque de communication et de différences d’opinion entre vous deux pour ne pas faire le jeu du MSM au no. 2 ?

Effectivement. C’est pour cela que j’essaye, à chaque fois, de lancer un rameau d’olivier pour que nous puissions travailler ensemble. Je ne le dis pas que pour mon colistier, mais en général pour les habitants de la circonscription qui ont diverses opinions et allégeances politiques. Moi je suis là pour aider tout le monde, sans mo guet so kouler politique. Dimoune pauvre pena kouler. Dimoune dans le besoin pena kouler.

J’ai ouvert un cabinet de consultation à Vallée-Pitôt. Je ne demande jamais à une patiente sa couleur politique avant de l’ausculter. J’ai traité 1 400 femmes gratuitement à Vallée-Pitôt depuis que j’ai été élu. Il n’y a pas une seule parmi elles qui est partie avec insatisfaction. Je le redis : je travaillerai avec tout le monde. Nous sommes déjà présents sur le terrain. Si ou ajoute mo colistier so la force avec mo la force, mo pensé li formidable. Il n’y a pas de doute dessus. Concernant les petits manquements de communication entre nous, nous trouverons éventuellement un terrain d’entente. J’en suis sûr.

Q : Laissons de côté le volet politique. Il semble qu’il y a eu un autre incident vous impliquant à la clinique Wellkin. De quoi s’agit-il exactement ?

Cet incident ne concerne pas ma patiente et il s’est déroulé à la salle de maternité. Je ne connais pas le monsieur en question et il n’a rien à voir avec moi, que ce soit sur le plan médical et professionnel. Cette personne se comportait d’une façon très brutale et agressive envers le personnel avec qui je travaille à la maternité. Je lui ai demandé de bien se comporter puisqu’il insultait une femme. Il m’a alors lancé « pou ki to pe prend toi ? ».

J’ai ainsi fait appel à la sécurité, conformément aux règlements de la clinique. Je pense qu’il s’est alors senti très frustré. He has dropped lots of ministers’ names en m’insultant. Je ne pense pas que ces ministres lui ont demandé de prendre leurs noms, mais il l’a néanmoins fait. Il m’a apostrophé de nouveau le soir et j’ai dû quitter la clinique par la porte de secours pour éviter d’être agressé physiquement. Je ne l’ai pas vu par la suite. Les caméras de la clinique prouvent ce qui s’est passé.

Mais pire, le lendemain soir, il s’est mis à attaquer le personnel, en les photographiant et en les intimidant. J’éviterai de relever tous les détails. L’affaire a été rapportée à la police, pas par moi, mais par les médecins concernés, le ‘Duty Manager’ et les sages-femmes. Mais étrangement, c’est moi qu’il a rapporté à la police, en prétendant que je lui ai parlé sur un ton agressif. Suis-je agressif quand je fais appel à la sécurité pour protéger une doctoresse et des femmes faisant partie du personnel soignant ? C’est mon devoir de les protéger. On ne peut pas agresser verbalement des femmes sur leurs lieux de travail.

Je sais que je suis une cible parce que je suis un ‘public figure’. Cela ne m’empêchera pas de continuer d’être aux côtés du peuple, y compris les femmes. Je laisse le soin à la police de faire son travail. Mais quand vous êtes un gros bras à la solde du gouvernement et que vous obtenez des contrats dans tous les hôpitaux et infrastructures publiques, ou pa kapave vine fer désordre dans clinique.

Q : Vous qui travaillez principalement avec les femmes, que pensez-vous des cas de violence domestique et de féminicides qui sont en hausse dans le pays ?

(Rires) Mo la vie fini autour de bane madames. Missié la bien rare mo zoine zot. C’est pour cela peut-être que je communique quelque peu difficilement avec les hommes. (Reprenant un air sérieux) C’est très inquiétant ce qui se passe. Dans tous les cas qu’on voit, il y avait un genre de préméditation et de précédents incidents. Je pense qu’il nous faut ‘empower’ les femmes pour qu’elles puissent se protéger en cas de problèmes, comme c’est le cas en Europe. Il nous faut être plus proactifs. Il nous faut aussi communiquer et sensibiliser davantage.

Q : Y a-t-il une volonté politique pour le faire, sachant que la plupart des politiciens qui prennent les décisions pour protéger les femmes sont des hommes ? Devrions-nous, par exemple, nommer un homme comme ministre de l’Égalité des genres pour qu’il y ait une meilleure prise de conscience ?

Les droits de l’égalité des genres et des chances sont très clairs. Qu’il y ait un homme ou une femme à la tête du ministère de l’Égalité des genres ne fera aucune différence. C’est la façon d’agir, de gérer et l’humanisme dont vous faites preuve qui font toute la différence. C’est justement par humanisme que j’ai défendu cette doctoresse et cette infirmière. Ce qui m’a poussé sous les feux des projecteurs vis-à-vis de cet homme qui m’a accusé. Combien de personnes prendront ce genre de risques ? Pas beaucoup. Les ministres doivent aussi faire preuve d’humanisme, de compassion et ils doivent agir promptement. S’il faut améliorer ou renforcer les lois, qu’on le fasse. J’ai personnellement deux tantes qui voulaient obtenir une ‘protection order’, mais elles ont dû affronter d’incroyables ‘red tapes’.

Q : Si vous devez choisir entre un portefeuille ministériel à la Santé ou à l’Égalité des genres, pour lequel opteriez-vous ?

Mon cœur balance plus en faveur d’un poste de député qui me permettrait de poser des questions pour apporter un changement, que ce soit pour la santé ou pour la protection des femmes et l’égalité des genres. Si demain, je dois accepter la responsabilité d’un de ces ministères, ce sera alors à mon leader de me dire ce que je dois faire.

Q : Vous laisserez donc le choix à votre leader ?

Je vous ai déjà répondu. Il faut lire entre les lignes.

Q : Doit-on comprendre que vous préférerez être député que d’être ministre ?

Je préfère être quelqu’un qui peut servir son peuple au mieux de ses capacités dans n’importe quelle position que son leader le juge apte à occuper.