« Ine fer MIC zis pou soutire copain-copines »

Vinaye Ancharaz, économiste :

La ‘Mauritius Investment Corporation’ (MIC), créée en juin 2020, continue d’alimenter les polémiques, et d’attirer les critiques, dont celles du Fonds Monétaire International (FMI). Sur les Rs 82 milliards disponibles dans les caisses de la MIC, Rs 64,1 milliards ont été engagées en investissements. Selon son site officiel, Rs 49 milliards ont déjà été versés à 50 établissements au 30 avril 2023.

Le gouvernement a créé la MIC dans le but de venir en aide aux entreprises systémiques dans le sillage de la Covid-19. À qui a profité cette initiative ? Rs 25 milliards ont été injectées dans la compagnie nationale d’aviation, Air Mauritius, en 2021, afin de la sauver d’un crash causé par une mauvaise gestion bien avant la pandémie. En échange de cet investissement, la MIC est devenue actionnaire majoritaire (49 %) d’Airport Holdings Ltd (AHL), qui est devenue propriétaire d’Air Mauritius. Les 51 % restants appartiennent au gouvernement.

La MIC a également pris des participations dans des groupes privés, notamment Rs 3,5 milliards dans MIC Smart City, Rs 2 milliards dans le groupe Médine et Rs 990 millions dans le groupe Omnicane, pour un total de Rs 42,4 milliards. Cela représente la moitié des Rs 82 milliards mises à sa disposition par la Banque centrale lors de sa création. À ce jour, Rs 49 milliards ont déjà été déboursés.

La banque centrale mauricienne a subi des pertes de Rs 811,7 millions pour l’année financière terminant le 30 juin 2022. Les investissements de la Mauritius Investment Corporation (MIC), sa filiale, dans MIC Smart City Ltd et Airport Holdings Ltd, y ont grandement contribué. Pour l’économiste Vinaye Ancharaz, c’est sans surprise que la Banque de Maurice (BoM) accuse des pertes significatives à cause de la MIC qui, selon lui, n’a aucune raison d’être.

« Pena okenn pays dans le monde kinn fer saki Maurice inn fer, le ministre des Finances en connivence avec le gouvernement konn tré bien ki zot finn fer – zot inn fer enn compagnie privé ki permet pren cash publik sous zot control et kot pena transparence ni accountability, ki pays ou trouv fer sa ou ? Inn fer MIC zis pu soutir copain copine des membres du gouvernement », martèle Vinaye Ancharaz.

À la fin d’octobre de l’année dernière, la ‘Bank of Mauritius Statement of Financial Position’ confirme un total « comprehensive loss » de l’ordre de Rs 11 milliards, littéralement le double en un mois. Car au 30 septembre dernier, ces pertes étaient de Rs 6,8 milliards. Selon l’économiste, la Banque de Maurice dévie de son mandat qui est d’assurer une stabilité monétaire et de contrôler l’inflation. « Ce n’est pas la responsabilité de la Banque centrale de gérer une compagnie privée. Le FMI a fortement recommandé à la Banque de Maurice de se désengager de l’actionnariat de la Mauritius Investment Corporation (MIC), voire de son contrôle, et avait réclamé que son financement passe par le processus budgétaire de l’Etat. Le gouvernement a fait fi de cette recommandation, pourquoi ? » se demande l’économiste.

La création de la Mauritius Investment Corporation (MIC) par la Banque de Maurice avait pour objectif d’aider l’économie mauricienne en période d’incertitude due à la pandémie de Covid-19. La MIC avait également pour mission d’investir dans de nouveaux secteurs afin de stimuler l’économie du pays.

Vinaye Ancharaz qualifie la Mauritius Investment Corporation d’”éléphant blanc”. « L’argent publique finn être distribué à gauche et à droite… Ena compagnie finn être créée pendant la pandémie zis pu bénéficié boku millions de la MIC… Inn fer bann investissement artificiel, eski ena retour lor sa bann investissement la ? MIC pena okenn accountability, pa kav mem poz kestion lor la dans parlement », martèle l’expert en économie.

Selon lui, la création de la MIC n’avait aucune “logique économique”. Il la considère comme un moyen de distribuer Rs 80 milliards aux personnes proches du pouvoir et aux grandes entreprises. Il mentionne notamment les Rs 650 millions accordées à la société “Mauriplage Beach Resort Limited”, appartenant à la belle-famille du Premier ministre Pravind Jugnauth, ainsi que les Rs 350 millions allouées à “Luxury Retirement Village Ltd”, une entreprise gérée par Avinash Gopee, un proche du pouvoir. Au 30 juin 2021, cette dernière avait déjà reçu Rs 175 millions de ce montant.

Selon Vinaye Ancharaz, utiliser des fonds publics pour créer une entreprise privée va à l’encontre de l’éthique des économistes. Modifier le “BoM Act” dans le but de servir les intérêts d’un petit groupe est encore plus préoccupant ! « Le ministre des Finances inn fer enn kitsoz ki pa ditou ethic… Eski sa cash kinn tir depi reserve la banque centrale la pa pe impacté nou roupie zordi.. ? pouvoir d’achat de la population inn baissé ek nou roupie per est dévalué.. li pa ti enn décision responsable pour créer MIC », déclare-t-il.

À plusieurs reprises, le grand argentier a affirmé que les détails concernant l’argent prélevé sur les réserves de la Banque centrale et distribué à des entreprises privées via la MIC ne peuvent être révélés.