La femme, moteur ou sacrifiée du Renouveau ?

En cette Journée internationale de la femme célébrée ce lundi 8 mars dans un contexte où il est de plus en plus question de renouveau, de réinvention, de changement de profondeur ou même de rupture, un constat s’impose. Bien que la femme représente plus de 50 % de la population mauricienne et qu’elle est statistiquement plus éduquée et plus qualifiée que les hommes, elle peine toujours à se faire une place dans la vie publique. Ailleurs dans le monde, des femmes accèdent graduellement au sommet de l’État, la dernière en date étant Kamala Harris, première vice-présidente des États-Unis. Plus près de nous, aux Seychelles, cinq des onze ministres fraîchement nommés en novembre 2020 sont des femmes.

Maurice, par contre, est toujours à la traîne. La femme est éternellement sous-représentée au Parlement. Celui-ci ne compte actuellement que 20% de femmes. Triste et révoltant ! Très souvent d’ailleurs, les femmes parlementaires font profil bas. Soit par choix, soit parce que leurs collègues hommes leur font de l’ombre. Mais c’est aussi un fait qu’elles n’élèvent pas suffisamment leurs voix pour se faire entendre. Combien, parmi les 14 élues sur le nombre total de 70 parlementaires, se sont-elles exprimées ouvertement et publiquement sur le renouveau tant réclamé par le peuple, par exemple ? Que dire de ces femmes ministres, PPS ou autres députées de la majorité qui n’ouvrent leurs bouches que pour tarir d’éloges leur jeune Premier ministre ? Où sont-elles quand il s’agit de débattre, de dialoguer ou de sensibiliser sur les problèmes de société, la corruption et la bonne gouvernance, entre autres ?

Il est important de faire ressortir que l’empowerment des femmes en politique, n’implique pas uniquement une représentation adéquate de la femme au sein des diverses instances des partis politiques et au Parlement, mais il faut aussi une prise de conscience en termes de la qualité des femmes qui sont d’abord alignées et présentées comme candidates. Le but final quand on parle de représentativité féminine n’est pas qu’on ait des vases à fleurs au sein de l’hémicycle, mais qu’on ait des femmes valables et capables de hausser le ton quand et où il le faut. Même si leur prise de position ne plaît dans son propre camp. Et même s’il faut tenir tête à leur leader ou collègues. C’est ce qu’il nous manque cruellement sur le plan politique actuel.

Pourquoi donc cette lacune ? Il n’y a certainement pas de carence de femmes professionnelles, intègres et compétentes à Maurice. Si elles restent loin de la chose politique, c’est surtout parce qu’elles ne sont pas valorisées, mais aussi parce que la politique telle qu’elle est pratiquée chez nous n’attire guère. Il faut que plus d’efforts soient faits pour les attirer dans la vie publique. Il faut aussi qu’elles aient la garantie qu’elles ne seront pas sous-estimées, évincées, négligées, dévalorisées et défavorisées au profit des hommes. Et cela doit passer inévitablement par une législation qui garantit au moins une représentativité féminine de 30% dans la politique, mais aussi ailleurs dans les secteurs privés et publics. Mais encore faut-il qu’il n’y ait plus d’hypocrisie entourant la question. Principalement par des hommes et des leaders politiques qui sont numériquement supérieurs au Parlement et pour qui, la participation et la représentativité féminine n’ont jamais été une priorité.

Néanmoins, ces derniers ont maintenant l’opportunité de se rattraper. Notamment en s’assurant que la femme puisse être partie intégrante des consultations, de la rédaction et éventuellement de la mise en œuvre d’un nouveau projet de société. Il ne peut y avoir de renouveau sans que l’épineuse question de participation et de représentativité féminine ne soit enfin réglée. La femme peut même être le moteur de ce Renouveau. Rien n’empêche les femmes de se regrouper pour réfléchir, débattre et faire des propositions pour l’avancement du pays. L’ancienne députée Nita Deerpalsing, maintenant à la tête d’un groupe de réflexions, ne le fait-elle pas d’ailleurs de son plein gré ?

La femme ne peut pas, et ne doit pas, être l’éternelle sacrifiée. Son avancement en politique ne peut plus se mesurer en micro-avancées. Il ne peut y avoir de vrai renouveau sans une représentativité féminine honorable et valable. Pour y arriver, il faut impérativement que les femmes citoyennes, de toutes classes professionnelles ou sociales confondues, commencent à se faire entendre tout en prenant leurs destinées en mains. Mesdames, réveillez-vous ! Anou aide à la reconstruction de nou pays…

 

Zahirah RADHA