Dr Mamood Hassam Karimboccus, physiothérapeute
À 62 ans, ce médecin – physiothérapeute, originaire de Port Louis, nous livre son parcours riche en expériences. Du Pakistan aux États-Unis, en passant par le Royaume Uni, Mamood Hassam Karimboccus a passé une trentaine d’années de sa vie loin de son pays natal. Mais il ne regrette rien et n’aurait pas rêvé mieux comme parcours.
Assis dans son cabinet médical à Port-Louis, juxtaposant sa résidence, le physiothérapeute, qui effectue aussi des visites à domicile, replonge dans les souvenirs de son passé. C’est en 1973 qu’il quitta nos rivages pour le Pakistan pour des études de vétérinaire. « C’était le rêve de mon père. Mais une fois arrivé à Multan après avoir passé mes études pré-médicales à Karachi, j’ai changé d’idée. Multan ne me plaisait pas… », dit-il, satisfait de sa décision.
Un jour, l’ambassadeur de Maurice au Pakistan le persuada d’entamer des études en physiothérapie au Jinnah Postgraduate Medical College à Karachi. Son diplôme en poche, il rentre au pays, avec une licence et une maitrise en physiothérapie. Il était le seul physiothérapeute exerçant dans le privé à l’époque. Mamood Hassam approfondira ses connaissances auprès des professionnels en physiothérapie à Maurice.
Alors qu’il est appelé pour un entretien par la Public Service Commission pour un poste de physiothérapeute, il reçoit un appel de sa sœur établie en Angleterre qui l’informe que sa demande pour pratiquer dans ce pays a été acceptée. Une fois sur place, il fit une demande à l’East London University pour faire son doctorat. Il choisira comme thèse ‘Shoulder pain in stroke patients.’ Il dut faire ses propres recherches et trouver des médecins pour l’encadrer dans des hôpitaux.
« L’apoplexie touchait uniquement des vieilles personnes à cette époque-là et 75 % des patients se plaignaient des douleurs d’épaules. Il fallait donc me documenter et chercher tous les facteurs qui pouvaient expliquer ce lien », explique-t-il. Le physiothérapeute se rendra vite compte que sa thèse ne se limiterait pas à l’orthopédie, la gériatrie et la réhabilitation. Mamood Hassam doit ainsi se rendre dans plusieurs hôpitaux afin de se documenter et cumuler de l’expérience. C’est dans quatre institutions hospitalières de Kent que le médecin y puisera ses documentations.
Pendant quelques mois, il visitera le ‘general hospital’ et les autres mois, il est placé dans les maisons de repos. Il passera beaucoup de temps à traiter des escarres des patients atteints d’apoplexie. Il met le cap pour l’hôpital de Canterburry, toujours dans le Kent, où il a travaillé dans la salle gériatrique-orthopédique. Il traitait des personnes âgées ayant des fractures ou ceux qui nécessitaient des remplacements du genou ou de la hanche. Mais cela ne suffisait pas pour sa thèse.
Il lui manquait l’expérience dans le domaine de la psychologie, un aspect important qui lui permettrait de trouver le lien avec l’apoplexie. Il choisit alors le St Augustine Mental Hospital à Canterbury. Mais il est choqué de voir comment les personnes atterrissent dans cet hôpital. « Pour un simple problème ou handicap mental, les parents y admettaient leurs proches. Et c’est là que j’ai développé une approche différente avec les patients qui avaient besoin de plus d’attention », relate-t-il.
Il fait ses preuves aux États-Unis
En 1987, le physiothérapeute décide de changer de trajectoire. Il fait une demande pour un poste aux États-Unis. Il est embauché. On le place dans un centre de physiothérapie à Nashville à Tennessee. « Je me souviendrai toujours que lorsque je suis arrivé là-bas, j’avais deux valises dont une était en carton », dit-il avec un brin de nostalgie. Mais il conquit ses collègues très vite grâce à son expertise. Le Centre de physiothérapie à Nashville travaillait avec une école qui assurait la formation des personnes autrement capables.
La responsabilité de Mamood Hassam consistait à trouver des moyens pour aider les patients à travailler avec aise. Il nous confie qu’une fois il a été confronté à un cas rare où une jeune fille handicapée de deux mains et d’un pied nécessitait des prothèses. « La fille utilisait son pied pour faire tout ce dont elle avait besoin ; se brosser les dents, manger et même écrire. Mais cela abimait ses hanches. Il fallait qu’on trouve une solution à cela. L’État voulait qu’on la déclare ‘fully handicapped’ pour ne pas débourser de l’argent pour son traitement. Mais je ne voulais pas qu’elle atterrisse dans un home », nous-confie-t-il. De ce fait, il a tout fait pour créer des bras artificiels, qui ont rendu la fille indépendante.
C’est alors qu’il vient avec des idées de créer des prothèses qui facilitent le déplacement et les mouvements de ces patients. Ainsi, il aidait à mettre en place des ‘aiding tools’ tels que des supports pour aider un handicapé qui éprouvait des difficultés à tenir une plume pour écrire, et d’autres soutiens adaptés aux besoins de chaque malade.
Après un autre séjour à l’hôpital psychiatrique à Tennessee, il décroche un poste d’Adaptive Equipment Specialist à la North Princeton Development Centre. Dans ce centre il est appelé à mettre en place des ‘aiding equipments’ à l’intention des personnes handicapées souffrant de problèmes mentaux. Mamood Hassam devient alors spécialiste des outils spécialisés et travaille en collaboration avec des prothésistes, spécialistes qui fabriquent des chaussures particulières pour les patients et des ergothérapeutes. Ensemble, ils conçoivent des prothèses, des chaises roulantes, et même un casque spécial qui servit à une femme qui avait l’habitude de se cogner la tête contre le mur.
Il arrive alors à un point tournant de sa carrière où il choisit de se remettre à la pratique privée et ouvre finalement son cabinet à Philadelphie, où il habitait. En même temps, il effectuait des visites à domicile et proposait ses services aux plus démunis, dans des ghettos.
De retour au bercail en 2010, il commence à travailler comme consultant à la City Clinic de Port-Louis. Aujourd’hui, Mamood Hassam fait la consultation à domicile et compte bientôt ouvrir un service de physiothérapie à la City Clinic de Grand Baie. Parfois, il revient sur son parcours qui le surprend encore.