Laina Rawat : « Ils nous ont déjà tout pris. Que veulent-ils d’autre ? »

  • « Nous aimons trop notre père pour lui dire de venir dans un lieu où il serait en danger »

Les récentes attaques contre son père, Dawood Rawat, la fait sortir de ses gonds. Laina Rawat ne s’explique pas les raisons de cet acharnement contre sa famille presque quatre ans après le démantèlement du groupe BAI. Raison pour laquelle elle ne veut pas que son père retourne à Maurice. « Mon père voulait rentrer à Maurice. Mais ce sont ses enfants qui l’ont empêché de le faire […] Nous aimons trop notre père pour lui dire de venir dans un lieu où il serait en danger », nous confie-t-elle dans l’entretien qui suit.

 Q : Votre père Dawood Rawat a été une nouvelle fois ciblé par le Premier ministre et une section de la presse cette semaine. Ces attaques sont-elles justifiées ?

Non, pas du tout ! Mon papa a clairement dit l’autre jour qu’Ireko n’avait jamais eu de contrat pour rénover le Parlement. Ireko avait été appelé pour effectuer les travaux de rénovation de l’hôtel du gouvernement uniquement.

Q : Pourquoi ne rendez-vous donc pas le contrat d’Ireko public dans un souci de transparence et de vérité ?

Si nous avions des documents en notre possession, nous aurions pu faire éclater beaucoup de vérités. Mais malheureusement, quand ils ont stoppé les opérations de la Bramer Bank à une heure du matin, suivie de la fermeture des autres branches de la BAI, entre autres, ils ont saisi tous les documents. Ils avaient même bloqué nos emails. Nous n’avons donc aucun document concernant les compagnies du groupe BAI. Mais je suis certaine qu’il doit y avoir une copie du contrat dans les ministères concernés.

Q : Envisagez-vous de prendre une action légale contre la publication de ces informations erronées ?

Nous sommes en consultation avec nos hommes de loi et nous déciderons prochainement de la marche à suivre.

Q : Après ces récentes attaques, avez-vous le sentiment que votre famille est toujours persécutée par le pouvoir presque quatre ans après le démantèlement du groupe BAI ?

Nous ne le sentons pas, nous SOMMES persécutés ! Pendant presque quatre ans, nous essayons par tous les moyens de relever la tête, pour trouver de l’emploi et pour recommencer à vivre normalement. Après avoir travaillé pendant une dizaine d’années à la BAI, on m’avait mise à la porte sans qu’on m’accorde le moindre sou en guise compensation alors que les autres employés en ont, eux, bénéficié. Mais passons. Il y a eu des affaires en cour et nous avons quand même dû débourser de l’argent pour payer les cautions. Nous avons dû également nous acquitter des taxes auprès de la MRA. Ce n’est déjà pas évident pour que nous reconstruisions nos vies et pour que nous assurions l’avenir de nos enfants après tout ce qui s’est passé, mais voilà qu’ils continuent de nous persécuter. Ils nous ont déjà tout pris. Que veulent-ils d’autre ? Ce n’est plus Dawood Rawat seul qu’ils attaquent maintenant, mais aussi ses petits-enfants. Comment arriverons-nous à leur garantir un meilleur avenir si on continue de nous attaquer ainsi ?

Q : Et votre père, comment a-t-il réagi en apprenant cette nouvelle ?

Il est quelque peu choqué. Il se demande jusqu’où ça ira. Je crois même qu’il est très inquiet pour notre sécurité, surtout à l’approche des prochaines élections. Nous n’avons rien à faire avec la politique. Je peux comprendre quand ils évoquent l’affaire BAI, mais qu’ils nous insultent ainsi en public, c’est inacceptable. Cela peut même s’avérer dangereux pour nous. Ce qui explique les inquiétudes de mon père.

Q : Compte-t-il donc retourner à Maurice ?

J’aimerais justement clarifier quelque chose. J’ai souvent vu des commentaires disant qu’il nous a laissé seuls dans ces périodes difficiles. Il y avait même eu un article de presse où le chef du gouvernement s’était permis de juger mon père en disant que lui, il n’aurait jamais abandonné ses filles dans des moments pareils. En vérité, mon père voulait rentrer à Maurice. Mais ce sont ses enfants qui l’ont empêché de le faire. Nos parents nous ont toujours tout donné et il est désormais de notre devoir de nous occuper d’eux. Mon papa a maintenant 75 ans. Je n’ai pas vu l’utilité de lui demander de retourner à Maurice pour qu’ils le maltraitent. Nous aimons trop notre père pour lui dire de venir dans un lieu où il serait en danger.

Q : Mais n’aurait-il pas été mieux pour lui de se défendre s’il était physiquement présent à Maurice ?

Nous sommes en 2018 et il peut toujours le faire là où il est. D’ailleurs, je ne pense pas qu’il aurait eu la chance de se défendre s’il était ici.

Q : Cette campagne de dénigrement vous démoralise-t-elle ?

Il y a des jours où nous sommes vraiment fatigués, surtout quand nous lisons certains articles ou commentaires, bien qu’il y en eût nettement moins ces derniers temps. Sinon, nous nous sentons beaucoup plus forts qu’avant. Nous ferons tout ce qu’il faut pour que nos enfants puissent toujours garder la tête haute. Nous sommes bien déterminés à nous battre jusqu’au bout.

Q :  Comment ?

Nous faisons confiance à la justice. Nous avons entré des actions en cour. Mon époux et moi-même, nous poursuivons tous les deux le gouvernement. Lui aussi il n’a pas eu de compensation après qu’il ait été mis à la porte après tant d’années de service. Il n’avait même pas eu son salaire pour le dernier mois qu’il avait travaillé. Nous avons donc saisi la justice et nous nous attendons à ce que les choses s’arrangeront tôt ou tard.

Q : Votre père vient justement de remporter un procès contre un groupe de presse français. Comment votre famille vit-elle cette victoire ?

C’est une grande victoire pour nous. C’est inconcevable qu’on dise tout ce qu’on veut sur quelqu’un sans que ce soit justifié. Si vous allez sur le net aujourd’hui et que vous tapez Dawood Rawat, Laina Rawat ou les noms de mes sœurs, vous ne verrez que le mot ‘ponzi’. Nous avons été blâmés au niveau mondial, et ce, sans qu’il n’y ait eu un jugement de la cour. Ceci dit, j’ai entendu certains commentaires à l’effet qu’on n’a pas eu de grosse somme d’argent en guise de dommages pour le procès qu’on vient de remporter. Mais le but n’était pas d’obtenir de l’argent. Il s’agissait plutôt de démontrer qu’on ne peut pas détruire la réputation d’une personne sans que vous ayez des preuves contre elle.

Q : Vous maintenez qu’il n’y avait pas de ‘ponzi’ au sein du groupe BAI ?

Il n’y en a jamais eu. J’ai toujours maintenu sur ma page Facebook que ceux opérant un ‘ponzi’ l’auront fait dans un pays étranger et ils se seraient assurés que leurs enfants y restent à l’écart. Il n’y aurait pas eu d’hôpital, par exemple. Mon père a, lui, fait des choses dont on ne peut qu’être fier. C’est sûr et certain qu’il n’y avait jamais eu de ‘ponzi’.

Q : Vous qui étiez très active au sein d’Apollo Bramwell, avez-vous un regret quand vous regardez cet hôpital aujourd’hui ?

Le seul regret que j’ai, c’est qu’on ne reconnait pas que Dawood Rawat ait œuvré dans l’intérêt du pays. Il avait rehaussé le niveau du service de la santé à Maurice, mais on ne lui donne pas ce crédit. Il avait déjà écrit les raisons qui l’avaient poussé à créer l’Apollo Bramwell et je les avais postées sur ma page Facebook. J’invite d’ailleurs tout le monde à les lire pour savoir vraiment ce qu’il avait dans le cœur en créant cet hôpital. Mais qu’est-il devenu aujourd’hui ?

Q : Vous disiez plus tôt que vous êtes en train de reconstruire votre vie. Est-ce facile de tout recommencer à zéro, même si la justice vous est favorable à l’avenir ?

Il s’agit surtout d’être blanchi et de rétablir notre honneur. Ceci dit, aujourd’hui, nous avons une famille forte. Nous puisons notre bonheur dans les bonnes choses que Dieu et la vie nous offrent. Je ne me plains plus beaucoup. Je regarde les choses différemment et je dois avouer que je suis beaucoup plus heureuse.