Malaise

Le défi lancé par Roubina Jadoo-Jaunbocus à Reza Uteem pour qu’il démissionne et la confronte – sous-entendant dans une élection partielle sans qu’elle ne le dise explicitement – est aussi hilarant qu’absurde. Il symbolise, en fait, l’illusion dans laquelle vivent le gouvernement et ses proches. C’est cette même illusion qui a fait dire à Joe Lesjongard que le MSM va de nouveau remporter les prochaines élections, basée sur les 20 000 personnes (des calculs à la Rutnah ?) qu’il dit avoir trouvé à Vacoas le 1er mai. L’heure est maintenant venue pour eux de snap out of their illusion et d’être confrontés à la réalité: le test électoral. Pourquoi devraient-ils hésiter à venir prouver ce qu’ils avancent ?

Si le gouvernement se sent aussi fort qu’il le prétend, comme le supputent ses membres et ses proches, autant qu’ils donnent les élections municipales, dont l’échéance arrive à terme le 13 juin prochain. Mieux encore, ces sous-fifres pourraient convaincre leur leader et Premier ministre de laisser de côté son entêtement d’aller jusqu’au bout de son mandat, soit jusqu’en 2024, et de dissoudre l’Assemblée nationale et de tenir les élections générales anticipées, préférablement avant la tenue des auditions de la pétition électorale de Suren Dayal contre Pravind Jugnauth au Privy Council le 10 juillet prochain. La balle est dans leur camp, et non dans celui de l’opposition.

Mais pour que le gouvernement puisse joindre le geste à la parole, it needs to have balls, surtout dans la conjoncture actuelle qui joue contre lui. Scandales à gogo, économie à genoux, incompétence criante, pays au bord d’une explosion sociale, libertés restreintes, démocratie en ruine, corruption galopante, drogue ravageuse, institutions ébranlées, favoritisme puant, police répressive… Le bilan de Pravind Jugnauth est d’une ineptie mortifère. Malgré l’assurance qu’il veut projeter quant à l’estime et la popularité dont jouissent son gouvernement, le Premier ministre doit savoir que le terrain glisse, même dans des régions rurales, et que le mécontentement gronde dans les rues.

Ivan Collendavelloo en a même rajouté une couche, en confirmant publiquement, lors du meeting gouvernemental du 1er mai à Vacoas, le malaise qui existe au sein de son parti quant à la présence du Muvman Liberater (ML) aux côtés du MSM. Une fronde dans les rangs du ML, provoquée par les actions du MSM, et qui se soldera probablement par certaines démissions dans les jours à venir, ne jouera pas en faveur du parti soleil dans l’éventualité des prochaines élections, surtout dans les villes, plus précisément dans le fief du MMM à Beau-Bassin/ Rose-Hill, où le ML avait quand même permis au MSM de récolter des sièges lors des derniers scrutins. Avec le ML qui s’effrite, le gouvernement n’a que très peu de chance de pouvoir y faire une nouvelle percée.

Même à Port-Louis, soit aux nos. 2 et 3, le gouvernement aura fort à faire pour tenter d’asseoir son assise, malgré l’adhésion au MSM de certains transfuges qui ne représentent que l’ombre d’eux-mêmes. Même dans les villages, le MSM n’a plus la même cote, surtout depuis l’affaire Franklin, à laquelle s’ajoutent les allégations de pots-de-vin et de ‘Cerf and Black Label party’ contre Maneesh Gobin et Rajanah Dhaliah. La grogne au no. 7 était d’ailleurs palpable lors d’une réunion du PTr au Collège Universal, jeudi. La danse nonchalante de Maneesh Gobin sur l’estrade du 1er mai n’a fait, semble-t-il, que jeter de l’huile sur le feu, en faisant penser aux ‘rave parties’ qui ont eu lieu à proximité de Grand-Bassin.

Dans un tel contexte, les conséquences ne pourront qu’être lourdes pour le gouvernement.