Non-respect d’un jugement de la Cour suprême : Une enquête initiée sur ordre du DPP

Au moins huit personnes seront appelées à la barre des témoins

Le bureau du Directeur des poursuites publiques (DPP) a ordonné qu’une enquête soit ouverte dans l’affaire de la déportation du Slovaque Peter Uricek en dépit d’un ordre de la Cour suprême de ne pas procéder à cette extradition. Celle-ci sera présidée par un magistrat siégeant à la Cour de district de Port-Louis.

Cette démarche du DPP est saluée par l’avocat du Slovaque, Me Yatin Varma. Dans une brève déclaration à Sunday Times, il a exprimé sa satisfaction quant à la décision du DPP d’initier une enquête. « Au moins la vérité sera tirée au clair autour de ce comportement des officiers du PIO », a-t-il laissé entendre. Dans le sillage de cette enquête, pas moins de huit personnes seront appelées à la barre des témoins. Le Commissaire de police doit faire venir en Cour tous les officiers de police qui sont impliqués dans cet acte de déportation du Slovaque.

Le directeur de l’Aviation civile doit, de son côté, faire venir l’officier concerné afin qu’il s’explique sur l’arrivée et du départ de l’appareil A 319 sur le sol de SSR International Airport appartenant au gouvernement de la Slovaquie. Le surintendant de police 9-11, attaché au PIO, doit aussi se présenter en Cour alors que l’Attorney General doit, lui, déléguer en Cour l’officier impliqué dans le dossier de Peter Uricek. La même démarche doit être entreprise par le Bureau du Premier ministre. Le bureau du Master & Registrar doit, de son côté, se faire représenter par un officier qui expliquera les procédures et l’ordre émise par la Cour dans cette affaire. Me Yatin Varma fera partie aussi des témoins en tant que l’avocat du Slovaque dans cette affaire.

Rappelons que les membres du Bar Council participeront à une marche pacifique le 13 mai prochain pour exprimer leur désaccord de ce non-respect d’une décision de la Cour suprême. Ils sont unanimes à dire NON à ce comportement de la police qui non seulement a fait fi d’un ordre de la Cour suprême, mais qui a aussi malmené Me Yatin Varma. Celui-ci a le soutien sans faille de tous ses membres. D’où leur marche de protestation le 13 mai prochain dans les rues de la capitale pour démontrer d’une part, leur solidarité avec le président du Bar Council, et de l’autre, de condamner les agissements de la police qui a malmené un avocat alors qu’il faisait son travail.

ASH

Enquête faite par un magistrat, et non par la police

Sanjay Bhuckory : « Le DPP aura un dossier plus étoffé »

Me Sanjay Bhuckory, SC, se réjouit que l’enquête instituée par le DPP se fera par un magistrat de la cour de district, et non pas par la police. Ce magistrat sera choisi par ceux siégeant en Cour de district qui sont au nombre de trois. Cette démarche, explique Me Bhuckory, comporte plusieurs avantages. D’abord, elle se tiendra dans une « open court », donc accessible aux journalistes et au public. Deuxièmement, les personnes qui seront appelées à la barre des témoins ne pourront pas se prévaloir de leur droit au silence, comme cela aurait été possible lors d’une enquête policière. Ensuite, les témoins pourront être interrogés par les représentants du bureau du DPP et contre-interrogés par les avocats des personnes ayant un intérêt dans l’affaire.

Le magistrat en question pourra également interroger les témoins, car il aura un rôle inquisitoire. Ce qui n’est généralement pas le cas dans un procès classique où le magistrat est un libre arbitre dans un procès accusatoire. « Le magistrat pourra poser des questions pour aller au fond de l’affaire afin de connaître les circonstances dans lesquelles cet étranger a été enlevé de Maurice », nous affirme Sanjay Bhuckory. D’ailleurs, une telle enquête avancera bien plus vite qu’une enquête policière. « La police aurait pu trainer les pattes et faire ce qu’elle veut, comme on en a vu dans certains cas récemment », poursuit le ‘Senior Counsel’.

Finalement, le magistrat aura le champ libre de faire des suggestions au DPP dans le rapport qu’il soumettra à ce dernier. Recommandations qui ne seront cependant pas rendues publiques. Il incombera alors au DPP de décider s’il les appliquera ou pas, car c’est lui qui aura le dernier mot. Le DPP aura ainsi, selon Me Bhuckory, un dossier bien plus étoffé de ce qu’il aurait eu en cas d’une enquête policière. « Le DPP pourra, à la lumière de ces recommandations, diligenter une enquête policière à sa façon », conclut Me Sanjay Bhuckory.