Questions à…Raouf Gulbul, Senior Counsel « J’ai subi une grande injustice »

  • « Quand ou okup ene position important, dimoune avoy kout roches »

Son passage d’avocat à politicien n’a pas été de tout repos. D’autant que la politique ne semble pas lui avoir porté chance. Battu au no. 3 où il s’était présenté sous la bannière de l’Alliance Lepep aux élections générales de 2014, il avait été nommé à la présidence de la GRA et de la LRC. Mais il n’y a pas fait long feu, miné par de graves allégations dans le sillage de la commission d’enquête sur la drogue. Mais tout cela n’est désormais que du passé pour Raouf Gulbul qui se dit soulagé d’avoir enfin obtenu justice.

Propos recueillis par Z. RADHA

Q : Quel est votre sentiment après avoir obtenu gain de cause suivant votre demande de révision judiciaire en Cour suprême dans le sillage du rapport de la Commission Lam Shang Leen ?

Je remercie d’abord Sunday Times d’être venu vers moi pour me demander mes sentiments et ma réaction car vous aviez à l’époque publié des articles sur moi basé sur les travaux de la Commission. J’avais, durant ces travaux, refusé de faire des déclarations pour que la Commission puisse travailler en sérénité. Mais dans son rapport, ‘zot tou koner ki kalité critique line fer contre moi’. Je n’avais pas attendu la publication du rapport pour démissionner comme ‘chairman’ de la « Gambling Regulatory Authority » (GRA) et de la « Law Reform Commission » (LRC) en novembre 2017, surtout quand des allégations avaient été faites contre moi à la Commission.

Dans ma demande de révision judiciaire, j’ai argué que la Commission n’avait pas respecté la loi du pays, que mes droits constitutionnels étaient bafoués par le Commissaire parce que ‘li mem ti pe sauter’ pour me dire que je n’avais pas le droit de poser des questions, d’avoir accès aux documents ou de contre-interroger les accusateurs. En tant qu’ancien juge, il sait bien que n’importe quel citoyen de Maurice dispose de ces droits. La Commission a bafoué mes droits et a fait des remarques désobligeantes dont je ne méritais pas.

Aujourd’hui, des ‘sitting judges’ de la Cour suprême ont statué que la Commission a agi sur des « one-sided versions ». Je le trouve très désolant qu’un ancien juge de la Cour suprême ait agi de la sorte. Je suis néanmoins satisfait d’avoir enfin obtenu justice.

Q : Vous avez contesté les paragraphes vous concernant, mais remettez-vous en cause ce rapport dans son intégralité ?

Je ne parle qu’en ce qui me concerne. C’est grave quand une Commission bafoue ainsi les droits constitutionnels de ceux qu’elle a convoqués et qu’elle a dû être rappelée à l’ordre par la Cour suprême. Je ne m’attarderai pas sur les autres aspects qui ne me concernent pas.

Q : Qu’en est-il des allégations faites contre vous dans le sillage de cette Commission ?

Elles sont toutes fausses. Certaines personnes avaient allégué au départ que j’avais reçu Rs 3 millions à Saint-Pierre. Ce chiffre est ensuite passé à Rs 5 millions et finalement à Rs 10 millions. Elles avaient aussi allégué qu’il y avait des enregistrements pour prouver ce qui s’était passé ce jour-là. Aujourd’hui, il n’y a ni enregistrement ni preuves. Ce n’étaient que des allégations farfelues. Je vous donne la garantie que si j’avais eu accès aux documents et si j’avais pu les contre-interroger, la vérité aurait surgi. ‘Kifer zot vine fer bane allégations’ ?

Q : Ces allégations comme vous le dites et le rapport Lam Shang Leen vous ont quand même coûté, outre vos postes à la GRA et la LRC, votre carrière politique. Avez-vous l’intention de vous jeter de nouveau dans l’arène politique ?

Cela fait 38 ans cette année-ci depuis que je suis au barreau. C’est une longue carrière. J’étais candidat au no. 3 en 2014 dans un contexte bien précis, car j’étais contre le projet de deuxième république. Éventuellement, je m’étais retrouvé comme candidat et ma campagne était axée justement contre la deuxième république. Depuis la Commission, je suis resté loin de la politique…

Q : …mais vous étiez quand même ‘campaign manager’ au no. 3 aux élections de 2019 !

Non, je n’étais pas ‘campaign manager’, mais j’ai donné un coup de main au régional no. 3. Vous verrez qu’après 2019, je ne siège au sein d’aucune instance. Je suis bien établi au barreau et je le continuerai ainsi.

Q : Adieu donc à la politique ?

Non, je ne dis pas cela. Actuellement, mes pieds restent fermement ancrés dans mon bureau. Je ne sais pas ce qui arrivera après. Mais pour l’instant, je ne suis pas politicien. Je suis avocat et mes portes sont ouvertes pour n’importe qui.

Q : Et si vous devez être nommé à un poste quelconque demain, l’accepterez-vous ?

Je ne peux pas y répondre pour le moment. ‘Quand ou okup ene position important dans Maurice, dimoune avoy kout roches’. Pendant cinq ans, j’ai subi une grande injustice. Je ne le souhaite pas à quelqu’un d’autre.