Règne de terreur

La peur s’installe dans le pays. Doucement, mais inéluctablement. Elle gagne tout le monde : citoyens, politiciens de l’opposition, activistes, journalistes, avocats. Cette frayeur a été déclenchée après certaines arrestations dans des affaires douteuses de drogues, soupçonnées d’avoir été « plantées » par la ‘Special Striking Team’, perçue comme « lekip planteur », des perquisitions et arrestations arbitraires ou encore des menaces et des intimidations pour nuire aux opposants du régime Jugnauth. La circulation de ‘hit-lists’, vrai ou faux, sur les réseaux sociaux n’arrange pas les choses. Ceux qui sont en ligne de mire craignent évidemment pour leur sécurité, surtout après l’affaire Kistnen qui reste désespérément enfouie sous une épaisse fumée de cover-up et d’opacité. Ce qui explique le nombre record de ‘precautionary measures’ consignées ces derniers jours. Ivann Bibi, Alain Malherbe, Percy Yip Tong, Kris Caunhye, Nawaz Noorbux, Al-Khizr Ramdin, Jean-Luc Emile, tous redoutent que des coups ne soient montés contre eux ou qu’ils ne connaissent une fin aussi atroce et tragique qu’a connue Kaya, pourtant un ex-agent du MSM, d’autant que des ‘snipers’ ont aussi été évoqués. Les avocats Shakeel Mohamed et Neelkanth Dulloo ne sont pas en reste et ont ouvertement exprimé leurs appréhensions. La tension ne cesse de monter en crescendo, avec le risque que le ‘tempo’ n’explose à tout moment.

Le problème, c’est que ce climat de terreur n’est pas distillé par des bandits ou des criminels. Mais bien par ce qui semble être une mafia organisée au sein de la force policière. Une clique répartie parmi plusieurs unités policières, qui agit sur les instructions de Lakwizinn et dont le seul but s’apparente à réduire au silence ceux qui dénoncent des abus et des maldonnes. Ce qui ne laisse aucun doute à l’effet que Maurice n’est réduit aujourd’hui qu’à un état policier. Les opposants du gouvernement sont systématiquement inquiétés pour des raisons aussi insignifiantes que révoltantes. La dernière arrestation de Darren Seedeeal, par exemple, nous laisse perplexe, tout comme les conditions attachées à sa remise en liberté provisoire. Pourquoi sa présence gêne-t-elle au point de le tenir loin de toute manifestation, même s’il ne fait que couvrir un événement en tant que reporteur indépendant ? C’est aussi irrationnel que l’arrestation du travailleur social Shahil Budhooa en avril dernier parce qu’il avait traité le maire de Manhattan, pardon de Vacoas-Phoenix, de « gopia ». Posez-vous la question pourquoi c’est la ‘Major Crime Investigation Team’ (MCIT) qui enquête sur une affaire de diffamation criminelle contre le journaliste Axcel Chenney alors qu’il y a tant de crimes qui restent non-élucidés ?

Parallèlement à cette police partisane et servile, il y a aussi certains politiciens au pouvoir qui confondent leur rôle à celui de gangsters et qui incitent outrageusement à la haine et à la violence. Ils sentent que le pouvoir leur échappe entre les mains et ils ont ainsi recours à des méthodes fascistes pour continuer de régner et de dominer. Ce « règne de terreur » vise à contraindre les opposants et la population à rabattre le caquet. Même si les radars ne fonctionnent pas au moment des naufrages comme celui du Wakashio, le radar du Premier ministre, lui, fonctionne à plein régime lorsqu’il s’agit de dénicher ceux qui donnent de la voix contre le gouvernement. Plus l’échéance des élections municipales et générales approchent, plus la campagne de terreur s’accentuera. Mais devrions-nous pour autant nous taire, comme le veut le gouvernement ? NON ! L’éthique, le devoir, les principes exigent que nous continuions à dénoncer les dérives dictatoriales et anti-démocratiques. Car un peuple qui a peur est un peuple qui est dominé. Autant donc qu’on ne se laisse pas intimider. N’ayons pas peur. Ne baissons pas les bras. Ne nous taisons pas. Militons ensemble pour libérer notre pays du joug de ce gouvernement dictateur.