Villageoises : test de popularité pour le gouvernement

Il était temps ! Huit ans après les dernières élections villageoises, les électeurs des 130 villages du pays pourront se rendre de nouveau aux urnes le 22 novembre prochain pour élire leurs nouveaux représentants aux conseils de villages et de districts. La démocratie régionale pourra enfin être rétablie. En novembre 2018, ces élections avaient été renvoyées grâce à un amendement à la « Local Government Act ». La vice-Première ministre et ministre des Collectivités locales d’alors, Fazila Jeewa-Daureeawoo, avait alors justifié cette démarche en prétextant d’abord la réforme électorale, mais aussi la concrétisation d’au moins sept projets. « La priorité du gouvernement est la mise en œuvre rapide des projets. Tenir des élections à ce stade n’est pas opportun », avait-elle souligné lors des débats parlementaires. Ce qui avait évidemment provoqué l’ire des membres de l’opposition, dont celle d’un certain Alan Ganoo, qui trouvaient que les arguments du gouvernement n’étaient pas crédibles.

Longtemps banalisées, les prochaines élections villageoises revêtiront probablement un tout autre enjeu cette fois-ci, surtout après les récentes manifestations citoyennes et le sentiment de ras-le-bol qui anime de nombreux Mauriciens. Certes, les principaux blocs politiques ne seront pas directement impliqués dans ces élections. Mais les différentes formations qui y aligneront leurs candidats ont, dans la plupart des cas, une couleur et une proximité politiques. Ces élections pourront ainsi servir, d’une certaine façon, de baromètre politique pour tâter le pouls des électeurs dans les régions rurales. D’autant qu’il y a un courant de pensée qui estime que les villageois, qui constituent en grande partie la « hindu belt » qui avait soutenu le MSM aux dernières élections générales, n’avaient pas vraiment soutenu les marches citoyennes. Les résultats des prochaines villageoises devront ainsi nous permettre d’y voir plus clair.

Si les partis de l’opposition ont fait savoir qu’ils ne suivront que de loin ces élections, du côté du gouvernement par contre, certains élus n’hésitent pas à y jeter tous leurs poids. Depuis quelques années d’ailleurs, le gouvernement central, plus précisément les élus du MSM, s’est ingéré de façon systématique dans la gestion des administrations rurales. Si bien qu’il a même influencé l’élection des présidents des conseils de district jusqu’à ce que celle-ci ait été suspendue suivant un amendement à la « Local Government Act ». Certains d’entre eux, à l’instar des présidents du conseil de district de Pamplemousses et de Rivière-du-Rempart, s’affichent ouvertement aux côtés des membres du gouvernement et seraient même des « intouchables » à en croire ceux qui les côtoient. Les allégations d’abus logées contre eux ne sont-elles pas tombées dans l’oreille de sourds, si ce n’est dans des tiroirs de la police ou de l’ICAC ?

Cette ingérence dans la gestion des conseils de districts est cependant très mal vue car la perception veut que les présidents ont tendance à favoriser des projets dans leurs villages respectifs au lieu de s’attarder sur le développement d’autres villages et du district en général. Les villages qui ont été les parents pauvres du développement voudront certainement prendre leur revanche lors des prochains scrutins ruraux. Mais au final, l’enjeu sera plutôt de taille pour le MSM et les formations qu’il soutiendra car ces élections lui permettront de jauger sa popularité, ou du moins s’il lui en reste toujours…