Achat de terrains à Angus Road Roshi Bhadain : « Ce ne sont pas des allégations, mais des faits prouvés par des documents »

Roshi Bhadain ne lâche pas prise. Comme promis, il a fait de nouvelles révélations concernant l’acquisition des terrains par Pravind Jugnauth à Angus Road, Vacoas. Mais attention, il n’a pas encore vidé tout son sac. Car le leader du Reform Party promet d’autres surprises, une fois que Pravind Jugnauth s’explique…

 

Zahirah RADHA

 

Q : Pourquoi vous intéressez-vous autant à Angus Road ?

Le Premier ministre se plait à dire que ses mains de politicien sont propres. Il soutient aussi que le peuple doit le juger sur sa moralité et ses actions concernant la corruption, entre autres. Revenons à l’affaire Angus Road. Pravind Jugnauth est l’acquéreur d’un terrain de 7 023 m2,, qu’il a mis au nom de ses enfants mineurs à l’époque mais il en a gardé la jouissance. Le vendeur de ce terrain était Bel Air Sugar Estate (BASE). Or, le paiement a été fait par Alan Govinden à M. Rountree en Angleterre. Pourtant, l’acte notarié stipule que c’est BASE qui a reçu et touché la somme de Rs 20 millions des acquéreurs qui sont Pravind Jugnauth et ses enfants mineurs à l’époque. Ce qui implique que l’acte notarié n’est pas vrai.

Le notaire précise aussi que le paiement a été fait avant que cet acte notarié ne soit rédigé. En fait, le paiement de Rs 20 millions avait été fait sept ans auparavant, soit en 2001. Mais le document a été enregistré chez le notaire en 2008 hors de sa vue et sans son concours. Maintenant, quand la « land transfer tax » de ce terrain a été payée sept ans après son acquisition, il n’aurait pas dû être évaluée à sa valeur initiale de Rs 20 millions. Ce qui implique que la taxe n’a pas été calculée et payée à sa juste valeur.

 

Q : Vous avez révélé l’achat d’un autre terrain en ce même lieu par le Premier ministre, vendredi. Quels sont les dessous de ce nouveau scandale ?

Pravind Jugnuth a acquis tous les terrains qui se trouvent à Angus Road. Ils sont d’une superficie approximative de 4 arpents et valent environ Rs 160 millions au total. Le premier terrain dont j’avais fait état est de 7 023 m2 alors que ce deuxième est de 3 597 m2. Celui-ci est directement à son nom et il l’a acheté pour Rs 7 millions, toujours hors de la vue du notaire. Dans ce cas précis, l’ICAC est en possession d’un ‘office cheque’ de Rs 3 millions, ayant été servi comme moyen de paiement pour ce deuxième terrain. Mais Pravind Jugnauth doit expliquer sous quelle forme il s’est acquitté des Rs 4 millions restants. Il doit dire s’il y a eu de paiement, quand il y en a eu et si c’était en liquide parce qu’il n’y a pas eu de chèque et qu’il n’a pas été payé devant le notaire.

Q : Quels sont les possibles délits liés à ces deux affaires ?

Il est clair que l’ICAC n’enquête que sur les affaires de corruption et de blanchiment d’argent. De plus, il y a possiblement eu une « conspiracy to defraud the state » en ce qu’il s’agit du paiement de la « land transfer tax ». Il faut aussi savoir qu’un faux acte notarié, comme dans le premier cas, est un délit très grave.

 

Q : Avez-vous tout révéler concernant ces acquisitions jusqu’ici ou y en a-t-il d’autres ?

J’ai déjà dévoilé un gros morceau concernant ces deux différentes transactions. Mais il y en aura d’autres. Pravind Jugnauth doit d’abord répondre.

 

Q : Et s’il ne répond pas ?

Il doit répondre ! Il faut d’abord qu’il mette un ordre dans ses mensonges. Et quand il se décidera enfin à parler, je ferai d’autres révélations.

Q : Mais s’il se réfugie derrière l’enquête de l’ICAC pour ne pas répondre, vous ne les révèlerez pas ?

Écoutez, cela fait neuf ans depuis que l’ICAC enquête dessus. La première déposition y avait été faite en 2011.

 

Q : À quoi servent vos révélations s’il n’y a aucune suite et que le PM reste solidement accroché à son poste ?

C’est maintenant aux journalistes de chercher des réponses auprès du Premier ministre qui occupe une fonction publique et qui est payé des fonds de l’État. S’il ne répond pas, vous devrez le rapporter. Vous devrez aussi chercher à savoir où en est l’enquête en Angleterre.

 

Q : Y a-t-il un moyen pour relancer cette enquête du « Serious Fraud Office » pour qu’on puisse au moins connaître la vérité sur toute cette affaire ?

C’est seulement le bureau de l’Attorney General qui peut communiquer avec celui de la Grande-Bretagne sur une base de « mutual legal assistance » pour faire avancer l’enquête. Ce processus avait déjà été enclenché. Cependant, je ne vois pas Maneesh Gobin coopérer avec les autorités britanniques pour enquêter sur celui qui préside le conseil des ministres où il siège. Il en est de même à la commission anti-corruption. L’ICAC a déjà tous les documents en sa possession. Mais elle étouffe l’enquête dans une tentative de faire du « cover up ». N’oubliez pas que Navin Beekarry est un homme de Lakwizinn. Son contrat arrivera à terme à la fin de cette année et ce n’est nul autre que le Premier qui doit le renouveler.

Puisque l’Attorney General et l’ICAC sont tous les deux dépendants de Pravind Jugnauth, il faut impérativement que celui-ci ‘step down’ pour que les enquêtes puissent aboutir. S’il ne le fait pas, il demeurera dans une position où il peut s’ingérer dans les enquêtes. C’est pour cela d’ailleurs que rien n’aboutit. Dans le cas de Collendavelloo, il avait prétendu être un homme de principes pour le révoquer quand ce dernier n’a pas voulu ‘step down’. Le même principe doit également s’appliquer dans son cas.

 

Q : Quelle est la marche à suivre s’il ne démissionne pas ?

La presse doit jouer son rôle et l’opposition doit assumer ses responsabilités. Ce ne sont pas des allégations auxquelles le Premier ministre fait face, mais à des faits prouvés par des documents. Il n’y a même pas d’utilité à enquêter. Les documents sont suffisamment clairs.

 

Q : Il y a quand même la présomption d’innocence !

Il faut donc qu’il vienne se défendre ! Mais encore faut-il que les institutions fassent leur travail pour qu’il puisse donner sa défense. Les institutions sont bloquées parce que Gobin et Beekarry lui sont redevables. On fait face à une crise institutionnelle.

 

Q : On se heurte finalement à un mur ?

Justement, c’est là que l’opposition doit entrer en jeu. Elle doit s’assurer qu’il n’y a pas d’abus et de dérives dans le pays. Si elle n’agit pas, la situation ne changera guère. Elle doit décider si elle continuera à siéger au Parlement ou si elle démissionnera.