Le Premier ministre répète ad nauseam, pour ne pas dire tel un perroquet déboussolé, qu’il ne lésinera pas sur les moyens pour venir à bout du trafic de drogue. Il est sincère dans sa démarche, insiste-t-il à chaque fois qu’il en a l’occasion, en citant avec force la commission d’enquête sur la drogue que son Mentor de père avait instituée du temps qu’il était encore Premier ministre. On aimerait tant lui donner le bénéfice du doute. Sauf que les événements nous convainquent toujours, d’une façon ou d’une autre, que ses paroles ne sont que du vent. Car les autorités persistent à faire et de prouver exactement le contraire de ce que prétend Pravind Jugnauth. Prenons un exemple récent. En début d’année, une vingtaine de détenus de la prison de Richelieu ont pu quitter, le centre pénitencier en toute liberté, à bord d’un van privé, pour se rendre au port où ils ont débarqué du poisson de la cale d’un navire. Une opération qui s’est déroulée durant deux jours.
La zone portuaire est supposément un lieu restreint. Personne ne peut y accéder sans autorisation. L’actuel directeur des douanes, Vivekanand Ramburrun, s’est d’ailleurs fait un point d’honneur pour y contrer toute entrée de drogues. Comment se fait-il donc que des prisonniers aient pu y avoir accès sans qu’il n’y ait eu de contrôle au préalable ? Comment pouvons-nous croire que les mesures qui y ont été mises en place pour combattre la drogue fonctionnent réellement si le système de contrôle d’accès au port n’est même pas fiable ? Comment peut-on s’assurer que la drogue n’a pas été introduite dans l’enceinte du port alors qu’on sait pertinemment bien avec quelle facilité la drogue est circulée dans l’univers carcéral ? Le Commissaire des prisons, Vinod Appadoo, est-il au moins conscient des risques auxquels il a exposé le pays, et le gouvernement avec, en permettant que des prisonniers pénètrent dans cette zone hautement sensible ?
Vinod Appadoo soutient l’avoir fait après avoir obtenu l’aval du ministère de la Défense, dirigé par sir Anerood Jugnauth. Si ce qu’il dit est vrai, l’on aura de sérieuses raisons de s’inquiéter. Car un tel consentement dépasse le seuil du raisonnement. Le ministre Mentor a-t-il perdu sa lucidité ? Eoula ! Il faut vraiment qu’il ait perdu la raison pour donner le feu vert à une décision qui va à l’encontre de ce que prône son fils qu’il a lui-même placé sur le trône. D’ailleurs, même le « Port Master » n’a pas apprécié la démarche du Commissaire des prisons. D’où sa décision de tout suspendre dès qu’il a eu vent de la situation. Une gifle au Mentor, quoi ! L’on ne sait pas encore ce qu’en pense Pravind Jugnauth de toute cette affaire, ce dernier étant absent du pays. Ce qui est certain par contre, c’est que tant que les autorités (in)compétentes ne fournissent pas les efforts nécessaires ou que leurs démarches ne corroborent pas avec les siennes, il n’arrivera pas à bout de sa mission