Ensam tou possible

L’état d’urgence sanitaire dans laquelle on se retrouve exige de nous tous, y compris les politiciens et les médias, un comportement exemplaire et patriotique. C’est ce qu’on s’efforce tous de faire, en gardant pour plus tard certaines questions sensibles. Mais il y a toujours des exceptions à la règle. Certaines craintes, doléances ou critiques doivent être relayées à tout prix, et ce dès que le besoin se fait sentir. Tout simplement parce que demain risque d’être tard, trop tard même. Ces craintes, doléances et critiques sont émises pour que les autorités puissent agir et réagir à temps. Il ne s’agit pas de politiser, de polémiquer ou d’être antipatriotique, NON. Il s’agit surtout de remédier et de redresser une situation qui peut autrement entraîner de graves conséquences.

Si Navin Ramgoolam n’avait pas lancé un appel au Premier ministre dans sa première lettre ouverte, nos frontières seraient probablement restées ouvertes plus longtemps. Si des députés de l’Opposition, à l’instar de Xavier Duval et d’Eshan Juman, n’avaient pas élevé la voix sur le sort des travailleurs du secteur informel, des milliers de familles auraient possiblement toujours été privées d’un moyen de subsistance. S’il n’y avait pas eu une indignation quasi collective contre la fermeture des supermarchés, ceux-ci n’auraient plausiblement pas été ré-ouverts, entraînant ainsi une crise alimentaire comme on n’en a jamais eue ni connue. Tout ça pour vous dire qu’en ce moment de crise sans précédent, la voix de tout un chacun compte, énormément même.

Mais que voit-on du côté du gouvernement ? Alors que l’opposition se dit prête à soutenir le gouvernement pour que le pays et la population puissent sortir grandis de cette bataille qui met déjà les plus grandes puissances du monde à genoux, nos dirigeants s’obstinent, eux, à refuser de prendre la main que lui tend l’opposition parlementaire et extra-parlementaire. Pourquoi ? L’union ne fait-il plus la force ? N’est-ce pas le gouvernement lui-même qui dit que « ensam tou possible » ? Si la suggestion d’Arvin Boolell pour la mise sur pied d’un comité national de crise, regroupant le gouvernement, l’opposition, le secteur privé et la société civile, avait été retenue, cela aurait pu éviter bien des cafouillages. Comme la fermeture irréfléchie des supermarchés ou alors les mesures d’assistance financière annoncées au compte-gouttes. 

Il n’est jamais trop tard pour se rattraper. Nous ne savons même pas combien de temps encore durera le couvre-feu. Au lieu de prétendre qu’il a le monopole de l’intelligence et de compétence, que le gouvernement accepte de prendre ‘onboard’ ses opposants pour affronter ensemble ce défi sanitaire, économique et social. Cela s’avère crucial surtout pour l’après-Covid-19. Car le réveil sera dur. Très dur même. La relance ne sera pas facile, mais elle se fera nettement mieux dans le consensus. D’où notre appel au gouvernement pour qu’il laisse de côté son orgueil et de mettre sur pied un comité national pour gérer cette crise. Si ce comité échoue dans sa tâche, les torts seront partagés. Au cas contraire, le gouvernement devra assumer seul les responsabilités de ses actions.