Étaler sa vie privée sur les réseaux sociaux

Un trend qui peut s’avérer coûteux

Il est désormais devenu à la mode de dévoiler plusieurs aspects de la vie privée sur les réseaux sociaux. Mais cette pratique n’est pas sans danger, et elle peut même être néfaste pour notre équilibre psychologique…

La protection de la vie privée ne fait pas toujours bon ménage avec les réseaux sociaux. Cette problématique se pose en ce moment même dans la société mauricienne. Dans un passé pas trop lointain, relativement peu de personnes se connectaient et partageaient leurs messages et leurs informations sur les réseaux sociaux. Mais aujourd’hui, ceux-ci sont devenus quasiment incontournables pour les internautes, que ce soit Facebook, Twitter ou encore Tiktok, entre autres.

Durant ces dernières années, nous pouvons constater une évolution par rapport à la façon dont les gens utilisent les réseaux sociaux. Ainsi, beaucoup plus de personnes ont commencé à partager des photos, des selfies, des messages, leurs tenues du jour, les plats qu’ils ont cuisinés ou achetés, les trucs qu’ils ont achetés, leurs relations en couple, les photos de leurs enfants ou de leurs animaux ou encore leur maison, tout cela à travers des publications ou même à travers des images ‘live’.

Actuellement, nous pouvons même voir des Mauriciens qui font des ‘live’ pour parler de leur vie. « En gros, parler de sa vie prive en ligne est devenu un ‘trend’ en ce moment », souligne Azeemah Beehary, psychologue. Selon elle, les réseaux sociaux sont un moyen avant tout de rester connecté avec les gens et de se faire de nouveaux amis. Ce sont aussi des outils puissants au niveau du marketing digital. Mais à l’origine, ils n’avaient pas forcément été créés pour dévoiler la vie des utilisateurs.

Est-ce que les réseaux sociaux sont forcément une mauvaise chose et que nous ne devrons pas y être ? « Comme on le sait, toute chose a de bons et de mauvais côtés », rétorque la psychologue. Selon elle, une personne ne signe jamais un contrat l’obligeant de dévoiler sa vie privée quand elle créé un compte. Aucun utilisateur des réseaux sociaux ne peut être forcé à divulguer sa vie privée sur la place publique, et chaque internaute est libre d’utiliser les réseaux sociaux comme il veut, du moment qu’il respecte les paramètres de la loi. « Chaque utilisateur d’un réseau social a un choix à faire. Il doit décider s’il veut exposer sa vie privée en ligne ou pas », explique la psy.

Gundeea Narainen, chargée de cours à l’Université de Maurice, nous explique que « les réseaux sociaux n’ont pas été conçus pour parler de la vie privée mais tout dépend de l’utilisation des gens », dit-elle. Selon la chargée de cours, la démarcation entre la vie privée et la vie publique est en train de s’estomper, et les gens ne savent plus faire la différence entre vie privée et vie publique. On a tendance à tout déballer sur les réseaux sociaux. « On ne sait plus tracer une ligne de conduite sur les réseaux sociaux », résume-t-elle. 

Ce sont ainsi les internautes qui doivent savoir se fixer une limite sur les réseaux sociaux, en ce qui concerne leur vie privée. « Ils doivent savoir faire la différence entre ce qui ressort du domaine privé et ce qui ressort du domaine public. C’est bien de partager mais il faut savoir jusqu’où on doit aller », dit-elle.

Des dangers guettent

Elle aborde ensuite les dangers qui existent sur les réseaux sociaux. « Il y a plusieurs individus qui ont tendance à vous surveiller sur ces plateformes. Ces derniers peuvent faire toute sorte de choses pour vous faire du mal », explique-t-elle. Par exemple, certaines personnes pourraient utiliser vos données pour des actes malveillants. Et dans ce dernier cas de figure, les filles et les femmes sont les plus ciblées.

Cette dernière fait ressortir qu’à Maurice, nous n’avons pas eu jusqu’ici de cas dramatiques, qui ont débouché sur le suicide des victimes, comme cela a été le cas à l’étranger. Ainsi, avant de partager des informations qui ont trait à la vie privée, l’utilisateur doit prendre le temps de se poser des questions si les informations qu’il est en train de diffuser pourraient représenter un danger pour lui-même ou pour sa famille. Si une personne a envie d’exposer sa vie privée sur les réseaux sociaux, il doit savoir assumer ses responsabilités et faire face aux conséquences.

Le hic, c’est que souvent des fois, les internautes dévoilent leur vie privée sans être conscient des dangers. Il y a aussi des jeunes qui ne veulent pas écouter ce que leurs aînés leur conseillent et qui n’en font qu’à leur tête. Ou encore, assez souvent, il y beaucoup de personnes psychologiquement vulnérables qui se tournent vers les réseaux sociaux, par exemple pour avoir des conseils, voire même pour gagner une forme de rassurance avec d’autres personnes.

L’impact psychologique

Il faut savoir qu’exhiber sa vie privée sur réseaux sociaux peut en effet avoir des effets indésirables. Pour commencer, de façon générale, il faut se rappeler que nous n’allons pas récolter que des ‘likes’ mais aussi des critiques, voire des injures, parfois blessantes et cruelles, lorsque nous diffusons quelque chose sur les réseaux sociaux. Et quand une personne dévoile sa vie privée sur les plateformes digitales, elle est en train de se rendre vulnérable en s’exposant à toutes sortes de commentaires. « En prenant toutes ces choses en considération, si l’internaute veut toujours partager sa vie privée en ligne, il faut qu’il se prépare psychologiquement et mentalement pour faire face à des critiques », nous explique Azeemah Beehary.

Dans beaucoup de cas, ces critiques ou injures peuvent mener à des troubles psychologiques tels que des problèmes d’estime de soi, l’anxiété, la dépression, le stress, ou voire même des pensées suicidaires. Des commentaires négatifs peuvent même provoquer des problèmes comme l’insomnie. Gundeea Narainen ajoute qu’une victime pourra même délaisser ses activités quotidiennes en se sentant découragée. Un autre effet pervers est qu’une personne peut devenir accro sur les réseaux sociaux. Cela devient comme un manque dans la vie de certaines personnes s’ils ne peuvent pas se connecter sur les réseaux sociaux.

Donc, même si la majorité des personnes sont au courant des dangers sur les réseaux sociaux, nous devons être plus vigilants en ce qui concerne nos actions et notre comportement en ligne, car il y va de notre santé physique et mentale.