Vaccination des moins de 18 ans : Une décision dangereuse et prise à la va-vite ?

Le Conseil des ministres avait récemment annoncé l’amendement des ‘Public Health Regulations’ de 2021 (‘Covid-19 Vaccines for Emergency Use’) pour permettre aux personnes ayant moins de 18 ans de se faire vacciner contre la covid-19. Or, cette décision du Conseil des ministres est-elle basée sur les avis d’experts ? Actuellement, il y a une certaine contestation qui commence à se soulever à Maurice. Si plusieurs pays européens ont autorisé la vaccination aux moins de 18, il faut se rappeler qu’ils n’ont autorisé que le vaccin Pfizer. En outre, des cas de myocardite (inflammation cardiaque) ont été décelés à l’étranger chez les jeunes qui ont reçu ce vaccin.

Mise en garde du Dr. Vasantrao Gujadhur

L’ancien directeur des services de santé publique, le Dr. Vasantrao Gujadhur, souligne que les pays qui procèdent à la vaccination des moins de 18 ans utilisent le vaccin Pfizer BioNTech, qui est un vaccin à ARN messager (un nouveau type de vaccins).

En outre, plusieurs pays ne font pas la vaccination pour les moins de 18 ans, ou bien sont en attente. Qui plus est, plusieurs jeunes personnes de moins de 30 ans ont eu des inflammations du myocarde, notamment en Amérique.

Selon lui, il est plus important de se concentrer sur la vaccination des personnes âgées, vu que ces derniers sont à risques et vulnérables. Il devait ainsi déplorer que bon nombre de personnes âgées n’aient même pas encore reçu au moins une première dose de vaccin. Le Dr. Gujadur estime ainsi que la priorité aurait dû être donnée aux personnes de plus de 18 ans et aux personnes âgées et vulnérables.

« Est-ce qu’il y a un ‘Vaccination Committee’ ou un autre comité technique pour se pencher sur cela ? », s’interroge le médecin. Il explique que le Conseil des ministres devrait prendre en considération les recommandations du ‘Technical Committee’.

Les pays avancés n’autorisent que le vaccin Pfizer aux jeunes de moins de 18 ans

Le 5 mai, le Canada est le premier pays à approuver le vaccin Pfizer pour ceux âgés de 12 ans ou plus,

Aux États-Unis, les 16-18 ans pouvaient se faire vacciner avec le vaccin Pfizer depuis le 19 avril, autorisation qui a été étendue aux 12-15 ans depuis la mi-mai.

Le 15 juin, l’Agence européenne des médicaments (EMA) a autorisé le vaccin Pfizer pour les jeunes âgés entre 12 et 17 ans, décision qui concerne les 27 pays membres de l’Union européenne.

Ce qu’il convient de noter, c’est uniquement le vaccin Pfizer qui est administré à ces adolescents. Est-ce que ce sera le cas à Maurice ?

Faizal Jeerooburkhan : « Pourquoi forcer les jeunes à se faire vacciner quand le vaccin n’est pas disponible ? »

L’observateur politique et membre de Think Mauritius, Faizal Jeerooburkhan voit cette décision du Conseil des ministres comme « un peu drôle ». Il estime qu’il est important de savoir la motivation derrière cette décision. « Est-ce vraiment pour protéger les jeunes et empêcher la propagation du virus ? », se demande-t-il.

Au lieu d’obliger les jeunes à se faire vacciner, il se demande si on ne ferait pas mieux de s’assurer que les personnes au-dessus de 60 ans et qui présentent des comorbidités soient vaccinées en premier. « Pourquoi forcer les jeunes à se faire vacciner quand le vaccin n’est pas disponible ? », s’interroge-t-il.

L’observateur politique déplore que pour ce gouvernement, les conseils des experts ne comptent que pour du beurre. « On peut se demander si cette décision est basée sur des connaissances scientifiques ou médicales », s’interroge Faizal Jeerooburkhan.

Depuis le début de la crise sanitaire, on a l’impression que le gouvernement prend parfois des décisions médicales, souligne-t-il. Il indique que ces décisions sont prises dans des cercles fermés, qui n’ont pas les mêmes compétences qu’un comité d’experts composé par exemple du Dr. Gunness, du Dr. Bunwaree et du Dr. Gujadhur.

Des cas de myocardites chez les jeunes

C’est en Israël que des cas de myocardite (inflammation du muscle cardiaque) après la vaccination ont été signalés en premier. En France aussi, quelques cas de myocardite ont été détectés.

Au 11 juin, 323 cas de myocardite ou de péricardite ont été confirmés chez des personnes de 29 ans ou moins, qui ont été vaccinées avec les vaccins Pfizer ou Moderna, qui reposent tous les deux sur la technologie de l’ARN messager. Ces cas sont survenus le plus souvent après la deuxième dose de vaccin, et les symptômes se sont déclenchés en général quelques jours seulement après l’injection.

Des experts américains ont souligné qu’il existe un lien « probable » entre les vaccins Pfizer et Moderna et ces (rares) cas de myocardite chez des adolescents et de jeunes adultes. Les autorités sanitaires israéliennes partagent le même avis sur un lien possible entre le vaccin Pfizer et ces cas de myocardite.

Ce sont les jeunes hommes qui sont les plus touchés. Les autorités sanitaires américaines ont conseillé de suspendre l’administration de la seconde dose pour les personnes développant, après la première dose, une myocardite.

La parole aux jeunes

Selon un jeune de 17 ans, habitant Plaine-Magnien, le vaccin a ses avantages et ses inconvénients. Il affiche sa crainte quant aux effets secondaires qui selon certaines sources, peuvent être très dangereux pour les adolescents et les enfants.

« D’une façon, c’est bien de se faire vacciner car nous allons pouvoir avoir accès dans plusieurs établissements et on pourrait aussi nous protéger », dit un autre adolescent de 17 ans. Ce jeune habitant de Plaine-Verte avance toutefois qu’il ne fait pas tellement confiance aux vaccins, ne connaissant rien sur son contenu ou ses effets secondaires.

Une étudiante, Goshita Bissessur, a également peur que les vaccins ne causent des problèmes aux jeunes adolescents. « Certains d’entre nous ne sont pas d’accord pour subir le vaccin mais nous n’aurons pas le choix à la fin », dit-elle.

Zahirah Radha, mère d’un ado de 16 ans

« Des réserves sur cette décision prise sur un apparent coup de tête »

La rédactrice-en-chef de Sunday Times, elle-même mère d’un ado qui fêtera ses 17 ans à la fin de cette année, nous exprime ses craintes quant à cette décision prise, selon elle, à la va-vite. Elle aurait préféré qu’il y ait d’abord une étude ou au moins des débats sur la question avant que la vaccination ne soit pratiquée sur les moins de 18 ans.

« Il est vrai que quelques pays européens, dont la France, a débuté une campagne de vaccination anticovid-19 pour des jeunes de moins de 18 ans. Mais je tiens à faire ressortir d’emblée que Maurice n’est pas la France. Depuis le début de la pandémie, les autorités mauriciennes ont procédé par « trial and error ». D’ailleurs, cette décision a été prise par le Conseil des ministres et non pas, à ce que je sache, par un comité technique ayant l’expertise nécessaire pour donner le feu vert à une telle démarche.

Il convient de souligner que même en France, le comité d’éthique a critiqué l’empressement des autorités françaises à étendre la vaccination anticovid-19 aux adolescents, en évoquant des conséquences limitées d’un point de vue sanitaire, mais importantes d’un point de vue éthique.

Ce qui me pousse donc, légitimement en tant que parent, à avoir des réserves sur cette décision gouvernementale qui me semble avoir été prise sur un coup de tête, bien que je ne sois pas contre la vaccination en elle-même. J’aurai préféré qu’il y ait d’abord un consensus sur la question au niveau international avant qu’on ne la pratique chez nous. J’espère aussi qu’elle ne sera pas rendue obligatoire comme cela est le cas pour les étudiants âgés de plus de 18 ans. »

Covid-19

« Non à la vaccination obligatoire ! »

La décision de se faire vacciner relève-t-elle d’un choix individuel ? Le débat est engagé. Des étudiants et d’autres contestataires sont contre la décision gouvernementale d’avoir sa carte de vaccination pour avoir accès dans des établissements scolaires et de santé. Depuis le lundi 5 juillet, des jeunes manifestent devant l’Hôtel du gouvernement, exprimant leurs craintes et leur désapprobation face à la vaccination obligatoire.

Devant l’Hôtel du gouvernement, on peut voir une dizaine d’étudiants. Sur leurs pancartes, on peut lire :  « Govt violates my right to education with forced vaccination », « Forcing us to give our consent is terrorism », « Vaccinated people can also transmit the covid so why discriminate », « Mo lekor li enn temp sacree, pa 1 laboratoir », « Non à vaccin obligatoir », entre autres.

Ali (prénom fictif), 23 ans, est étudiant dans une université privée. « On me refuse l’accès depuis deux ou trois jours. Mes amis n’ont pas eu le choix et ont dû se faire vacciner. Je suis le seul dans une classe de 34 élèves qui ne s’est pas encore fait vacciner. Je me sens un peu mis à l’écart. Je dois demander aux autres de déposer mes documents », déplore ce jeune.

Pour lui, il est inacceptable qu’il doit suivre ses cours en ligne et non en classe, alors qu’il s’est acquitté des frais universitaires, tout comme ses amis. Ali estime que le gouvernement ne peut pas forcer qui que ce soit à se faire vacciner, surtout qu’on ne connait pas encore les effets secondaires des vaccins. Malgré toutes les pressions qu’il subit, Ali insiste : il ne se fera pas vacciner.   

Même son de cloche chez Stephy Écumoir, 20 ans, qui a fait le déplacement depuis le village de L’Escalier pour venir exprimer son désaccord face à la vaccination obligatoire. Cette étudiante du MITD de Mahébourg s’est vu refuser l’accès à son institution. « Je ne suis pas d’accord pour qu’on m’injecte quelque chose dans mon corps, alors que je ne sais même pas ce qu’il contient. Même le gouvernement n’a pas de réponse à nous donner », martèle la jeune femme.

Pour cette dernière, c’est injuste que d’autres jeunes comme elle n’aient d’autre choix que de rester chez eux car ils n’ont pas envie de se faire vacciner. D’ailleurs, Stephy confie que sa cousine de 19 ans souffre de complications de santé depuis qu’elle est faite vacciner contre la covid-19 la semaine dernière. « Ma cousine a mal au ventre, a des maux de tête et ne peut pas marcher longtemps ni faire de gros efforts. Elle s’étouffe aussi alors qu’elle était une jeune fille en parfaite santé  et n’avait jamais ressenti de tels symptômes auparavant », indique-t-elle.

Mais il n’y a pas que des jeunes qui manifestent. Emma, 40 ans, habitant Bois-Marchand, a quatre enfants âgés entre 8 et 19 ans. Pour elle, la vaccination ne doit pas être obligatoire. « C’est notre choix et c’est nous qui décidons », lâche-t-elle. Selon elle, ses enfants ne souhaitent pas se faire vacciner. Pour elle, il n’est pas question de priver un enfant d’éducation. Elle estime ainsi que les droits des enfants sont en train d’être bafoués. Emma demande au gouvernement de revoir sa décision, qu’elle qualifie de loi tyrannique. « Je suis une mère qui se dévoue pour ses enfants et maintenant on nous demande de ne pas envoyer nos enfants à l’école s’ils ne se sont pas fait vacciner », s’insurge la quadragénaire.

« Le pire dans tout ceci, c’est que le gouvernement fuit ses responsabilités en imposant le ‘Consent Form’. Qui sera responsable s’il m’arrive quelque chose ? », se demande Jacob Dunte, 18 ans. Cet étudiant du HSC ne s’est même pas rendu dans son collège car il sait très bien qu’il ne sera pas autorisé à entrer. Il ne peut pas non plus subir le test PCR chaque semaine. Pour lui, c’est « révoltant » ce qui se passe, surtout que Maurice s’est toujours battu pour que chaque enfant ait droit à l’éducation. « Aujourd’hui, on a un gouvernement qui vient dire qu’on a pas le droit d’entrer à l’école sans se faire vacciner. Je ne peux pas apprendre car je n’ai aucune autre alternative, moi qui ne veux pas se faire vacciner ». Il devait ensuite souligner que le vaccin est toujours en phase expérimental et qu’on ne connait pas bien ses effets secondaires.