Hausse du ticket d’autobus et du métro

Les voyageurs écorchés vifs

Et ce pendant que l’État dispose d’un fonds de Rs 800 millions pour subventionner les opérateurs d’autobus, selon Nando Bodha

Anil Baichoo : “Pourquoi cette hausse pour le métro qui n’utilise pas de carburants”

Encore un coup de massue pour les consommateurs ! Après la hausse des prix des produits alimentaires et ceux des produits pétroliers, cette fois-ci, c’est au tour du ticket d’autobus de prendre l’ascenseur. Le tarif a été ainsi revu à la hausse, de Rs 5 à Rs 10 de plus selon les trajets. C’est à partir d’aujourd’hui (dimanche 8 mai) que cette hausse entre en vigueur.

C’est Alan Ganoo, ministre des Transports terrestres et du Métro léger, qui a fait cette annonce le vendredi 6 mai suivant le Conseil des ministres. Le ministre a parlé de « hausse inévitable » du ticket d’autobus, vu que les prix des produits pétroliers ont récemment connu une hausse.

L’État dispose d’un fonds de Rs 800 millions pour subventionner les opérateurs

Selon l’ancien ministre du Transport, Nando Bodha, et actuel leader du Rassemblement mauricien, il s’agit là d’une « décision inacceptable, révoltante et scandaleuse ». « C’est un nouveau coup de massue terrible pour la population. C’est un crime d’augmenter le prix du ticket maintenant ». Selon lui, une hausse de Rs 5 sur un ticket de Rs 20 équivaut à une augmentation de 25 %, tandis Rs 10 sur un ticket de Rs 35 revient à une augmentation de plus de 30 %.

Il soutient que depuis 2013, le ticket d’autobus n’avait connu aucune hausse. Entre 2014 et 2019, il avait lui-même maintenu le prix du ticket car il était pleinement conscient que « ceux qui voyagent par le bus sont les personnes les plus vulnérables économiquement ». Selon lui, l’État dispose d’un fonds d’environ Rs 800 millions pour venir en aide aux compagnies de bus quand le prix du diesel augmente. « Pendant cinq ans, on a pu gérer ce fonds pour ne pas avoir d’augmentation », dit Nando Bodha.

Il dit aussi son appréhension, vu que cette hausse survient dans le sillage des récents incidents qui ont secoué le pays. « Ce gouvernement mène le pays à la ruine et la population vers une crise sociale inévitable », craint-il. Il souligne qu’aujourd’hui, encore une fois, on peut voir l’incompétence du gouvernement, et aussi le fait flagrant que ce gouvernement est complètement coupé de la réalité, en particulier de la souffrance de la population. « Les gens parlent maintenant en termes de ‘manger un seul repas par jour’, ou encore ‘de ne plus pouvoir se serrer la ceinture’ », fait-il remarquer.

« Quand il s’agit de venir avec des mesures concrètes et urgentes pour soulager la population, Pravind Jugnauth parle de consultations budgétaires et de comité interministériel. On doit attendre le budget dans plusieurs semaines. Alors que les augmentations arrivent les unes après les autres, et cela au plus mauvais moment pour la population », observe-t-il.

En ce qui concerne le Metro Express, il avait premièrement été prévu que le prix du ticket du Metro Express sera le même que celui du bus. En deuxième lieu, il était convenu d’intégrer les différents modes de transport, comme les autobus réguliers, les ‘feeder buses’ et le Metro Express lui-même pour que tout soit ‘sustenable and efficient’. Mais tout cela part à vau-l’eau comme on peut le voir avec ces augmentations. Il fait, par ailleurs, ressortir que le Metro Express est encore à un stade de rodage, et que tout le système n’est pas terminé à 100 %.

Anil Baichoo : « Le gouvernement aurait dû prendre en partie le fardeau sur ses épaules »

Par ailleurs, Anil Baichoo, ancien ministre du Transport lui-aussi, estime que le gouvernement aurait dû alléger la population dans un premier temps, ce qu’il n’a pas fait. Il avance que le gouvernement aurait dû venir en aide aux compagnies de transport publics en leur fournissant des subsides. « Le gouvernement aurait dû prendre en partie le fardeau sur ses épaules et non pas tout mettre sur le dos des consommateurs », faitressortir Anil Baichoo. Il explique que lorsqu’il était au gouvernement, il avait formulé une stratégie pour que le gouvernement puisse venir en aide aux compagnies de transport public.

Il trouve cette augmentation « excessive et inacceptable » pour les consommateurs car déjà ces derniers sont en train de subir une augmentation des prix des produits alimentaires. Selon lui, on aurait pu éviter cela. « Le gouvernement aurait pu venir avec des moyens pour alléger la population au lieu de rendre les choses encore plus difficiles », dénonce-t-il.

Il se demande aussi pourquoi le ticket du Metro Express a été augmenté alors que ce moyen de transport n’utilise ni le diesel ni l’essence. Il fait aussi rappeler qu’à l’époque où on avait lancé la première rame du Metro Express, il avait été dit que le prix du ticket du Metro Express serait dans un premier temps le même que celui des autobus.

Hors-texte

« Un autre coup dur pour le public voyageur »

Priya, une habitante de Trou d’Eau Douce, doit aller travailler dans la capitale tous les jours. Elle fait partie de ces milliers de Mauriciens qui doivent voyager par autobus quotidiennement.

De chez elle à Trou d’Eau Douce, elle doit se rendre à Centre-de-Flacq (ce qui lui coûtait Rs 25) et de là à Port-Louis (ce qui lui revenait à Rs 35). Mais maintenant, avec les nouveaux tarifs en vigueur, elle doit payer Rs 30 le trajet de Trou d’Eau Douce à Centre-de-Flacq et Rs 45 le trajet de Centre-de-Flacq à Port-Louis.

Elle doit ainsi débourser Rs 150 pour les frais d’autobus par jour (comprenant l’aller et le retour) alors qu’auparavant, cela lui revenait à Rs 120. En fin de mois, elle devra maintenant débourser Rs 3 500 pour le transport, au lieu de Rs 2 640. Certes, son employeur lui fournit une ‘travelling allowance’. Mais tel n’est pas le cas pour tous les travailleurs, surtout les ‘self-employed’. Elle fait aussi remarquer que les gens ne prennent pas l’autobus uniquement pour aller travailler. « Je pense que ce sera un autre coup dur pour le public voyageur », résume-t-elle.