Bilan mensuel déficitaire : « Une recapitalisation de la BoM inévitable », selon Eric Ng Ping Cheun

Après que la Banque de Maurice (BoM) ait récemment publié son bilan pour les mois de mai et de juin, et dans le sillage du récent rapport du Fonds monétaire international (FMI) sur elle, il convient de jeter un œil critique sur ce qui se passe au niveau de notre banque centrale. Le point avec l’économiste Eric Ng Ping Cheun.

Le FMI, dans son dernier rapport sur la Banque de Maurice (BoM), avait préconisé que le gouvernement promeut l’indépendance de la Banque, que la Mauritius Investment Corporation (MIC) ne soit plus sous son égide, et que le gouvernement la recapitalise en y injectant des fonds. Au niveau local, dans le dernier rapport des auditeurs de la Banque de Maurice,il y a un déficit sur le bilan (‘Balance Sheet’) de la banque pour le mois de mai, ce qui ne laisse présager rien de bon d’un point de vue économique.

L’économiste Eric Ng Ping Cheun nous explique qu’une banque doit avoir son fonds propre de Rs 10 milliards comme capital. Or, la Banque de Maurice a un chiffre négatif au niveau de son bilan mensuel. « Ce qui s’est passé, c’est qu’il y a eu un ‘negative equity’, c’est-à-dire un fonds propre négatif, après que la Banque de Maurice ait réalisé des pertes, occasionnées par ses investissements à l’étranger, des pertes qui se chiffreraient à environ Rs 5 milliards », nous explique Eric Ng. « Toutefois, pour l’heure, on ne peut rien dire sur la véritable situation qui prévaut à la Banque de Maurice car les auditeurs n’ont pas encore soumis leur rapport pour le mois de juillet et il faudrait attendre cela pour pouvoir analyser en profondeur », fait ressortir l’économiste.

Selon Eric Ng parmi les facteurs qui ont conduit la Banque de Maurice vers cette situation, il y a les pertes occasionnées par ses investissements à l’étranger. Lorsque la BoM subit des pertes pareilles, elle doit puiser de ses réserves pour combler ces pertes. Ces pertes se reflètent sur ses fonds propres, ce qui les rend négatifs. D’autre part, la Banque de Maurice peut aussi subir des pertes à travers la Mauritius Investment Corporation (MIC) car le bilan de la MIC est indissociable de celui de la BoM. « C’est d’ailleurs pour cette raison que le Fonds monétaire international (FMI) avait demandé à ce que la BoM enlève la MIC de son ‘Balance Sheet’ », ajoute Eric Ng.

Par ailleurs, la Banque de Maurice a réalisé des investissements à travers la MIC mais nous ne savons pas combien d’argent ces investissements nous rapporterons. Mais si jamais ces revenus ne sont pas bons, cela pourrait avoir un impact sur le bilan de la Banque de Maurice, et ainsi sur ses fonds propres.

Quel est l’impact que cela pourrait avoir sur l’économie mauricienne ? Une des conséquences que cela pourrait avoir est que la Banque de Maurice n’aura pas les moyens d’adopter une bonne politique monétaire pour combattre l’inflation, explique Eric Ng. La Banque de Maurice dispose-t-elle d’une marge de manœuvre pour pouvoir remonter la pente ? Avec la dépréciation de la roupie, Eric Ng Ping Cheun pense que la Banque de Maurice a la possibilité d’augmenter ses fonds avec les gains d’échanges pour les préserver dans ses fonds de réserve, car ainsi il pourra augmenter son capital en devises. Toutefois, notre interlocuteur nous indique que ces gains sont « artificiels » car ils ne se reflètent pas vraiment sur les chiffres réels.

L’économiste indique ainsi qu’il faudra que la Banque de Maurice se recapitalise. Le gouvernement devra ainsi injecter de l’argent pour rebooster ses fonds. « Il faudra donc augmenter son capital pour que demain, si la Banque de Maurice subit des pertes, il pourra remonter la pente avec l’argent injecté par le gouvernement », fait comprendre Eric Ng.