Hadj à Rs 300 000 ou plus

Consternation suivant le coût excessivement élevé

Les Mauriciens de foi musulmane n’ayant pas pu accomplir le hadj durant les deux dernières années se réjouissaient à l’idée de pouvoir enfin l’accomplir cette année. Leur joie a cependant été de courte durée. Outre le nombre réduit de visas accordés à Maurice, au nombre de 672, le coût exorbitant, avoisinant les Rs 300 000 à Rs 325 000, fait également tiquer. Ainsi, des aspirants pèlerins qui se sont retrouvés sur la liste du Centre Culturel Islamique (ICC) pour le prochain pèlerinage ont été contraints de céder leur place. Et pour cause, ils n’avaient pas prévu un budget aussi conséquent, croyant que les frais ne leur reviendraient pas plus qu’environ Rs 225 000.

Ces aspirants hadjis ne cachent pas leur déception, d’autant que certains se trouvaient sur la liste d’attente depuis plusieurs années. « Je n’avais pas prévu que le coût s’élèverait à Rs 300 000. Si je refuse maintenant, devrais-je faire une nouvelle application et attendre encore de longues années avant de pouvoir effectuer le hadj ? », s’interroge Hassen qui s’était inscrit auprès de l’ICC depuis 2017. Jusqu’ici, il dit n’avoir pas eu de réponses à ces questions. Le Maulana Shamim Khodadin monte également au créneau pour dénoncer le coût exagéré du hadj. « Rs 300,000 est extrêmement exorbitant pou ban ki au bas de l’échelle et ki fine économise sou par sou pour accomplir le dernier piller de l’Islam », dénonce-t-il.

Le Maulana Khodadin veut ainsi savoir s’il y a quelqu’un au gouvernement qui négocie avec les autorités concernées pour revoir ce prix à la baisse, d’autant que Showkutally Soodhun, ambassadeur de Maurice en Arabie saoudite, semble avoir été écarté des négociations. Il se demande, dans la même foulée, si le « service spécial » réservé pour le « catering » est toujours obligatoire, surtout qu’il semble être passé de Rs 20 000 en 2019 à Rs 82 000 en 2022. Et pourquoi, poursuit-il, le coût du visa a-t-il plus que doublé en deux ans, passant de Rs 7 000 en 2019 à Rs 15 000 en 2022 ? Le président du ‘Sunniy Ulama & Aïmmah Council’ se demande également si le gouvernement mauricien négocie directement avec son homologue saoudien ou si c’est l’ICC qui mène les négociations avec l’organisme chargé du hadj.

Nous avons tenté d’obtenir des explications de la part du chairman de l’ICC, Samad Sairally, depuis vendredi, mais en vain.

Hors-texte 1

Osman Mahomed : « Le froid entre l’ICC et l’ambassadeur Soodhun se répercute-t-il sur ce prix ? »

Le député Osman Mahomed, qui a adressé une question parlementaire au ministre Avinash Teeluck à ce sujet, se dit interpellé par le coût du hadj. Pourquoi ce coût a-t-il doublé comparé à 2019 ?, veut-il savoir du ministre des Arts et du Patrimoine culturel. « Un de mes mandants qui vient d’accomplir l’Umrah m’a confié avoir payé moins cher en passant par l’Afrique du sud au lieu de Maurice. Je me demande pourquoi ce prix pratiqué à Maurice est-il différent des autres ? », s’interroge-t-il. Il se demande, dans la même foulée, si le froid entre la direction de l’ICC et l’ambassadeur de Maurice en Arabie saoudite, Showkutally Soodhun, ne se répercute pas sur ce prix. D’autant qu’à travers les négociations de ce dernier, Maurice a pu, auparavant, bénéficier de certaines facilités, telles que l’octroi additionnels de visas, entre autres.

Osman Mahomed insiste sur le fait que certains facteurs externes ayant provoqué la hausse du coût du hadj, comme le taux de change, ne sont pas proportionnels au prix auquel le hadj nous revient cette année-ci, soit dans les alentours de Rs 300 000 à Rs 325 000. Un montant élevé que n’arrivent pas à débourser des aspirants pèlerins qui ont économisé sou par sou pour pouvoir accomplir ce pilier de l’Islam. De ce fait, le député Mahomed souhaite connaître ce que fera le ministre Teeluck pour y mettre de l’ordre. « J’espère que le bon sens va prévaloir et que le ministre Teeluck interviendra pour mitiger cette forte augmentation », dit-il.

À noter que le député travailliste Eshan Juman a également adressé une question au ministre Teeluck à ce même sujet.

Hors-texte 2

Imam Zaheer Peerbux : « Le ministre Ganoo était choqué par ce prix »

L’imam Zaheer Peerbux dit avoir rencontré le ministre des Affaires étrangères, Alan Ganoo, pour évoquer cette hausse exagérée du coût du hadj et pour lui demander d’intervenir afin de revoir ce prix à la baisse. Une lettre en ce sens lui a été remise. Selon l’imam Peerbux, Alan Ganoo a été choqué d’entendre que le prix est passé à plus de Rs 300 000. « Line dire moi pas korek ditou et li pou suivre sa de près », confie-t-il. Et d’ajouter qu’Alan Ganoo a soutenu qu’il faut que la transparence prime. L’imam Peerbux dit avoir insisté pour que Showkutally Soodhun intervienne s’il le faut afin que le nécessaire soit fait. Notre interlocuteur soutient également avoir réclamé que les autorités mauriciennes négocient, dans l’intérêt des pèlerins mauriciens, avec Qatar Airways, dans l’éventualité que le prix du billet d’avion pratiqué par Emirates Airline ou Saudia est plus élevé que celui de Qatar Airways. Et d’ajouter : « Nou envi ki ICC explik nou kifer si ena 1 million dimoune dans Al-Haram, pe bizin vine koz menti pou dire nou ki bizin met zis 2 dimoune dans ene la chambre, akoz sa pe bizin prend sa somme la ? », martèle l’imam Peerbux.

Hors-texte 3

Silence radio du côté de Showkutally Soodhun

Alors qu’il est d’habitude très prompt à réagir lorsqu’il s’agit du dossier hadj, Showkutally Soodhun, de Dubaï où il se trouve, garde le silence. Est-il toujours souffrant ou s’agit-il d’une stratégie visant à faire de sorte que son absence soit ressentie ? La question se pose. D’ailleurs, il avait déjà prévenu, lorsqu’il avait été écarté lors des négociations avec les autorités saoudiennes, que la direction de l’ICC avait compliqué la situation et que celle-ci serait désormais difficile à gérer. « I consider that the Minister of Art and Culture Mr Teeluck is at fault. He will take his responsibilities », avait-il posté sur sa page Facebook. C’était peu avant son hospitalisation. Showkutally Soodhun avait auparavant, soit au début du mois d’avril, eu des négociations avec Saudi Airlines pour la transportation des pèlerins mauriciens pour le hadj. Le test PCR, avait-il précisé, ne serait pas requis. Il avait aussi annoncé que l’ICC serait responsable de « managing all processes concerning the Hajj and in Saudi Arabia. Our Ambassador Showkutally Soodhun and his team will do same ». Mais c’était avant que le froid ne s’installe entre eux.

Hors-texte 4

Arabie saoudite : Nouveaux frais et hausse de la TVA

Le coût du hadj a accusé une hausse partout à travers le monde. Mais il n’est certainement pas aussi cher que celui pratiqué à Maurice. Selon le site en ligne « Saudi Arabia E-Visa », la pandémie de la Covid-19 serait à l’origine de cette augmentation du coût du hadj. Des frais additionnels ont ainsi été imposés, notamment pour le test PCR, l’assurance maladie devant couvrir les dépenses médicales en cas de contamination à la Covid-19 et un ‘quarantine package’. Outre la hausse du taux d’inflation en Arabie saoudite, causant une augmentation des prix et des services, la TVA est également passée de 5% à 15 % depuis juin 2020. Nous ne savons cependant pas si ces frais sont inclus dans le coût imposé chez nous, aucune explication officielle n’ayant encore été fournie.