Le réveil de l’ICAC

Il a suffi que le Premier ministre réfère l’affaire Alvaro Sobrinho à l’ICAC, en lui transmettant une correspondance qu’il a reçue, pour que celle-ci, comme par enchantement, se réveille de sa torpeur. Telle la Belle au bois dormant qui fut réveillée, après un profond sommeil, par le baiser du prince charmant ! Acculée par les critiques corrosives de l’opposition et de la presse ces derniers temps, la commission anti-corruption a pris tout le monde de court par ses exécutions express et calculées cette semaine. Les hommes de Navin Beekarry ont soudainement retrouvé leur verve, comme au temps où, après les dernières élections générales, ils menaient la vie dure aux proches de l’ancien gouvernement. Nous aurions tant aimé que la commission anti-corruption, qui nous coûte les yeux de la tête annuellement, agisse ainsi dans tous les cas qui lui sont référés et qu’elle prouve que l’ICAC « pas guette figir » avant d’agir. Ce qui n’est certainement pas le cas actuellement avec le nombre important de dossiers, concernant surtout des proches du pouvoir, qui s’empilent et qui semblent prendre la poussière dans ses locaux à Moka.

On est ainsi en droit de se demander si l’ICAC a déjà initié des enquêtes par rapport à Vijaya Sumputh et Youshreen Choomka. Ces deux affaires, soulignons-le, ont également été référées à la commission anti-corruption par le chef du gouvernement. Étonnamment, les enquêteurs n’ont pas encore débarqué dans les locaux du Cardiac Centre ou à l’Independent Broadcasting Authority (IBA) pour saisir des documents relatifs à ces deux cas. On ne peut que croiser les doigts et s’attendre à ce que l’ICAC se montre aussi énergétique dans le cas de ces deux charmantes dames. La perception qu’on a à ce stade c’est que la commission procède par une certaine hiérarchisation dans le traitement de ses enquêtes alors que tel ne devrait pas être le cas. Tous les cas rapportés ou référés à cet organisme doivent être traités avec le même zèle et la même rigueur. On espère que la rapidité d’exécution de l’ICAC dans l’affaire Alvaro Sobrinho n’a rien à voir avec l’identité de ceux ou celles qui y sont mis en cause. D’autant que celle qui est particulièrement visée n’est autre qu’Ameenah Gurib-Fakim.

Le fait que cette dernière ait déjà été jugée et condamnée par le gouvernement aurait-elle apporté de l’eau au moulin de l’ICAC ? À l’opposé, les Sumputh et Choomka sont, elles, toujours dans les bons papiers de nos élus. Ce qui pourrait expliquer la différence de traitement entre ces trois cas. L’ICAC, on l’ose espérer, ne démontrera pas qu’elle n’est qu’un simple instrument politique. Elle doit faire preuve d’impartialité et de diligence dans les cas de Sumputh et de Choomka également. Elle devra aussi tenir la population informée de ses actions comme elle le fait actuellement dans l’affaire Sobrinho. Peut-être alors qu’elle inspirera de nouveau confiance à la population. Bien qu’on n’y croit plus vraiment…