Le Wakashio disloqué en deux

Le MV Wakashio, échoué au large de Pointe D’Esny, s’est quasiment disloqué en deux ce samedi 15 août. Quelles en seront les retombées ? On a fait le point avec deux biologistes, Sarojini Seeneevassen et le Dr. Rajiv Bheeroo.

Cela fait plus de 21 jours que le navire MV Wakashio s’est encastré sur nos récifs. La coque du Wakashio commencait à se fissurer depuis quelques temps. C’est maintenant chose faite : hier après-midi, le navire s’est quasiment disloqué en deux.

Or, avec de nouvelles fissures, les vents et les vagues qui deviennent de plus en plus fort et qui donnent des coups violents à la structure branlante du navire, il est à craindre de nouvelles dislocations.

Il y a une quantité résiduelle de mazout dans les réservoirs du navire, malgré l’exercice de pompage. Des ‘booms’ avaient été mis dans le lagon tout autour du bateau pour bloquer d’éventuels ‘oil sludges’. Mais sur les conseils des experts, la production de booms artisanaux aurait été stoppée pour le moment.

L’écoulement du fioul continuera-t-il ?

Le maximum de carburant a été retiré des soutes du navire, nous explique le Dr. Rajiv Bheeroo. Le risque de marée noire majeure est donc moindre. Cependant, les moteurs et les pièces de moteur connexes contiennent encore de l’huile lourde, qui continuera à s’écouler hors du navire.

Selon les conditions des vagues sur le site, le déversement de l’hydrocarbure residuel s’écoulera en pleine mer ou pénétrera dans la lagune.

Un impact écologique majeur

Selon Rajiv Bheeroo, un impact écologique majeur a déjà été observé dans la lagune au nord de Pointe d’Esny. Les principales régions touchées se situent au nord des plages de sable de Pointe d’Esny, affectant principalement les régions côtières, tels que Mahébourg, Rivière-des-Créoles, Ferney, et Bois-des-Amourettes.

Certaines de ces régions ont une forte ‘population’ de mangroves, avec une grande diversité de vie côtière et marine. Celles-ci jouent un rôle important dans la chaîne écologique qui relie les écosystèmes offshore, lagunaire et côtier. Les dégâts sont élevés et mettront de nombreuses années à se rétablir en fonction des actions de contrôle des dégâts.

Les actions qu’il faudrait entreprendre

Les efforts devraient être maximisés pour nettoyer le navire du pétrole lourd existant et d’autres produits d’hydrocarbures, l’eau de ballast doit être enlevée et éliminée à l’intérieur des terres, selon le Dr. Rajiv Bheeroo.

Les eaux côtières, en particulier dans les régions à forte population de mangroves, devraient être nettoyées (des méthodologies existent pour cela, selon le Dr. Bheeroo).

Un audit environnemental immédiat de grande envergure nécessaire

« Un audit environnemental immédiat de grande envergure de la lagune du sud-est, y compris la région de l’avant-récif, devrait être réalisé pour évaluer les dommages dus à la marée noire. Les principaux écosystèmes tels que les coraux, les herbiers marins et les mangroves devraient être cartographiés pour quantifier leurs zones géographiques et leur étendue. Les données de base de la région devraient être utilisées pour comparer la santé de ces principaux écosystèmes après la marée noire », avance le Dr. Bheeroo.

D’ailleurs, il souligne que l’approche experte doit être maintenue, notamment avec les experts locaux et étrangers travaillant ensemble.

Il est rejoint dans ses propos par Sarojini Seeneevassen, biologiste elle-aussi qui avance qu’on devra faire un ‘assessment’ complet de la situation. 

Il y a certaines plages qui sont encore non polluées et d’autres qui sont subi l’impact de la marée noire. Un ‘Proper Survey’, dit la biologiste, est nécessaire.

Elle déplore aussi que l’avis des pêcheurs n’ont pas été pris en considération. « Personne ne connait mieux les courants que les pêcheurs et les skippers », explique-t-elle. Selon elle, on aurait pu obtenir un meilleur résultat si les ONG et les autorités collaboraient ensemble. « On ne nous informe de rien et ce manque d’informations nous met dans l’incertitude», dénonce-t-elle.